Après que Luanda, las du poids de ce mandat, s’en est délesté à la faveur de sa présidence tournante de l’Union africaine, c’est vers les rivages du Golfe de Guinée que semble s’être déplacé le centre de gravité de cette médiation régionale.
Mais déjà, l’ombre des calculs politiques plane sur cette relocalisation. À peine la rumeur enflait-elle que Félix Tshisekedi, fidèle à son goût pour les manœuvres de coulisse, a effectué une halte « technique » pour le moins opportune à Lomé, début novembre. Officiellement, l’avion présidentiel congolais devait faire escale au Nigeria. Pourtant, à moins d’une heure de l’approche, les autorités togolaises furent avisées que l’appareil se poserait finalement sur leur tarmac, invoquant de prétendues « raisons météorologiques ».
L’accueil, d’un faste discret, fut assuré par le ministre togolais des Affaires étrangères, accompagné de quelques conseillers rompus au dossier congolais. Plus surprenant encore, le président Faure Gnassingbé en personne jugea bon de se rendre à l’aéroport pour saluer son homologue congolais.
Les communiqués officiels évoquent une rencontre « purement protocolaire » — mais chacun sait que dans le lexique diplomatique africain, les escales techniques sont rarement innocentes.
Sous des dehors affables, Félix Tshisekedi aurait fait preuve d’une générosité aussi spectaculaire que suspecte, se proposant de prendre à sa charge les frais afférents aux futures négociations. Une offre qui, sous couvert d’altruisme, dissimule mal une volonté d’influence : car comment un médiateur pourrait-il prétendre à l’impartialité dès lors qu’il dépend financièrement d’un protagoniste de la crise ?
Il serait, pour le moins, téméraire que Lomé se laissât charmer par les séductions vénéneuses de cette diplomatie du chéquier sans provision.
L’expérience de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) demeure à cet égard éloquente : M. Tshisekedi, déjà, s’était illustré par de fastueuses promesses et de mirifiques engagements, destinés à s’attirer les bonnes grâces de l’organisation régionale et à obtenir son appui militaire dans ses expéditions contre l’AFC/M23.
Mais, une fois les caméras éteintes et la ferveur médiatique dissipée, la réalité s’imposa dans toute sa crudité : les contingents de la SADC, défaits sur le terrain, regagnèrent leurs quartiers sans gloire, tandis que les engagements financiers de Kinshasa s’évanouissaient dans l’éther des illusions diplomatiques. Il ne resta, pour tout viatique, qu’une ardoise demeurée impayée et un profond sentiment d’avoir été dupé par un pouvoir rompu à l’art de l’instrumentalisation et de la promesse sans lendemain.
Le Togo, en acceptant d’endosser le rôle d’arbitre, s’expose à devenir la prochaine victime d’un scénario déjà bien rodé : celui d’un Congo-Kinshasa prompt à solliciter les médiations étrangères mais rétif à toute reddition de comptes.
Si Faure Gnassingbé n’y prend garde, Lomé pourrait se voir entraînée dans la spirale d’un dialogue sans fin, dont le seul vainqueur serait, encore une fois, la duplicité politique d’un pouvoir congolais rompu à l’art de la diversion.
Sous ses airs de diplomatie africaine autonome, cette transhumance des négociations d’un pays à l’autre illustre en réalité le désarroi d’un processus vidé de sa substance, où chaque capitale devient à son tour décor de substitution pour masquer l’absence de volonté réelle de réconciliation.
Lomé ferait donc bien de se souvenir que dans les crises congolaises, les promesses d’amitié ne sont souvent que les préludes de nouvelles dépendances.
Ainsi, derrière le vernis d’une coopération fraternelle, se profile une question de fond : jusqu’où les États africains accepteront-ils de prêter leur crédibilité à un dirigeant dont la diplomatie oscille entre opportunisme et marchandage ?
Car à force de vouloir apparaître comme le centre d’une solution continentale, le président Tshisekedi risque fort de transformer l’Afrique de l’Ouest en un simple théâtre d’ombres, où les mots « dialogue » et « souveraineté » ne seraient plus que des artifices rhétoriques masquant la faillite morale d’un leadership à bout de souffle.














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