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Les leçons de l’exception kényane

Redigé par IGIHE
Le 9 septembre 2017 à 11:02

Un jugement sec, sans appel. Lorsque les austères juges kényans, souvent jugés ridicules avec leur toge et leur perruque blanche, ont rendu leur verdict, c’est l’Afrique tout entière qui a frissonné : en toute indépendance, la Cour Suprême de justice a invalidé l’élection présidentielle du 8 août dernier qui avait donné la victoire à Uhuru Kenyatta, le président sortant.
En octobre prochain, les Kényans devront retourner aux urnes, les cartes seront rebattues et chacun espère qu’auront été corrigées les (...)

Un jugement sec, sans appel. Lorsque les austères juges kényans, souvent jugés ridicules avec leur toge et leur perruque blanche, ont rendu leur verdict, c’est l’Afrique tout entière qui a frissonné : en toute indépendance, la Cour Suprême de justice a invalidé l’élection présidentielle du 8 août dernier qui avait donné la victoire à Uhuru Kenyatta, le président sortant.

En octobre prochain, les Kényans devront retourner aux urnes, les cartes seront rebattues et chacun espère qu’auront été corrigées les irrégularités qui avaient marqué l’exercice précédent. Qui l’emportera ? Uhuru Kényatta, fils du premier président du pays son rival Raila Odinga, qui avait peine à croire à ce rebondissement ? A ce stade, l’issue des nouvelles élections est moins importante que le seul fait qu’elles puissent avoir lieu : cette invalidation de l’élection d’un chef d’Etat africain représente une première pour le continent.

Les « réalistes », les « connaisseurs de l’Afrique », si prompts à trouver des excuses aux scrutins truqués et à la loi du plus fort devront peut-être se faire une raison : la fameuse « exception africaine » en a pris un coup. Les juges kényans ont démontré qu’il n’était pas irréaliste de rêver d’une justice indépendante, de magistrats rendant leur verdict en toute liberté d’esprit, de peuples réussissant à faire respecter leur volonté réelle.
D’un bout à l’autre du continent, combien de fois n’a-t-il pas fallu s’incliner devant le verdict d’élections bâclées ou jouées d’avance, accepter l’indulgence des observateurs internationaux (hélas parfois mandatés par des institutions africaines ou des organisations internationales…) qui estimaient acceptables, « à l’aune de l’Afrique » des scrutins dont partout ailleurs ils auraient relevé les truquages, les intimidations, les violences.

Le verdict des juges kenyans est tombé à l’heure où, au Burundi, le président Nkurunziza prépare déjà son quatrième mandat, où le président Kagame vient de prêter serment en grande pompe après qu’un referendum voté à 99% l’ait autorisé à se représenter, où, en République « démocratique » du Congo, toutes les institutions, tous les élus sont frappés de péremption car les délais n’ont pas été respectés et les « dialogues » à répétition ont remplacé le libre choix des électeurs.

Qu’on ne s’y trompe pas : au Kenya rien n’est joué et partout ailleurs, les autocrates désireux de s’accrocher au pouvoir ont encore de beaux jours devant eux. Il n’empêche que le message venu du Kenya est clair : dans l’un des pays d’Afrique jugé parmi les plus corrompus, des hommes libres ont été capables de s’exprimer en âme et conscience. Un tel miracle, assorti à l’éveil d’une jeunesse de plus en plus éduquée et connectée, pourrait faire des vagues sur tout le continent.

Avec Colette Braeckman


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