Adresse à la nation annoncée et dévoyée

Redigé par Tite Gatabazi
Le 9 décembre 2025 à 08:35

Sous l’intitulé révélateur de la politique d’autruche érigée en méthode, se déploie un mode de gouvernance où l’esquive tient lieu d’analyse et où l’aveuglement volontaire supplée à toute clairvoyance stratégique.

L’on y voit se cristalliser une attitude consistant à enfouir les responsabilités sous des couches successives de dénégation, à travestir l’évidence par des récits commodes et à substituer à l’examen rigoureux des faits une gesticulation verbale aussi sonore qu’inopérante.

Cette posture, devenue doctrine officieuse du pouvoir, s’illustre par la manie obstinée d’éluder les crises, de congédier leurs causes profondes et de substituer à la lucidité un confort illusoire où la victimisation se mue en argument politique.

En érigeant l’évitement en principe, l’exécutif renonce à l’exigence élémentaire de responsabilité et transforme la fuite en avant en horizon indépassable, comme si la dissimulation du réel suffisait à en dissoudre les périls.

Ainsi s’installe, au sommet de l’État, un régime où l’autosatisfaction tient lieu de boussole, où l’illusion prévaut sur la vérité, et où l’autruche, loin d’être une métaphore, devient la figure tutélaire d’un pouvoir qui préfère l’ombre à la lumière, le mensonge à l’aveu et l’inaction à la lucidité.

Dans un crescendo de proclamations tonitruantes, savamment orchestré par les thuriféraires du pouvoir et par le zèle quasi liturgique du professeur Mbata, l’adresse à la nation du 8 décembre 2025 avait été présentée comme un tournant décisif, une sorte de moment oraculaire censé dissiper les incertitudes qui obscurcissent le destin du pays.

Las. À l’instar des précédentes mises en scène, dont la théâtralisation de l’épisode de Washington, D.C. et le vacarme rituel qui entoura la signature des accords de Washington, l’exercice s’est révélé n’être qu’une répétition générale de promesses inconsistantes, d’envolées verbeuses et de proclamations dépourvues de substance.

Le chef de l’État, fidèle à la dramaturgie qui est devenue sa marque de fabrique, s’est complu dans un discours de pure vacuité, alignant les formules creuses avec l’assurance placide de celui qui s’écoute parler sans jamais se risquer à regarder la réalité en face.

L’on y retrouve, intact, le triptyque qui caractérise sa gouvernance : le déni obstiné, l’art consommé de la désignation du bouc émissaire, et une inclination systématique au transfert de responsabilité. Jamais un mot d’introspection, jamais l’ombre d’une redevabilité : Félix Tshisekedi persiste à s’ériger en victime sacrificielle d’un destin hostile, rejetant sur d’hypothétiques forces extérieures les conséquences de décisions inconséquentes et d’un pilotage approximatif de l’État.

Il a même poussé la témérité jusqu’à affirmer que « les FARDC ont démontré une farouche résistance », assertion stupéfiante lorsque, chacun le sait, se déroule sous nos yeux la débâcle simultanée de Goma, de Bukavu et d’Uvira. Pire encore, il s’est permis de railler les troupes de la Southern African Development Community, défaites à Goma dans l’une des plus cuisantes humiliations jamais infligées à des forces régionales.

Il s’abrite derrière des narrations héroïsées sans rapport avec les faits, comme pour effacer d’un trait la réalité des revers militaires et des errements stratégiques accumulés.

Quant aux accords de Doha et de WDC, le président en propose une lecture profondément erronée, caricaturale même, qui trahit moins une incompréhension qu’une volonté manifeste de les instrumentaliser pour justifier l’injustifiable. Il travestit leur esprit, en inverse les termes et s’obstine à y voir ce qu’ils ne disent nullement : un brevet de légitimité ou un blanc-seing pour persévérer dans une diplomatie de posture.

Ainsi, Tshisekedi fait du Tshilombo : c’est-à-dire qu’il demeure immuablement fidèle à lui-même, confiné dans une politique d’autruche devenue doctrine officielle. Rien de nouveau sous le soleil, rien qui résonne comme une prise de conscience, rien qui s’apparente à une vision stratégique. Seulement l’éternel ressassement, l’éternelle litanie, l’éternelle fuite en avant.

Et, pour reprendre la mélodie mélancolique que fredonnait Dalida, il n’aura offert à la nation que cela : des paroles, des paroles, et encore des paroles.

L’adresse à la nation du 8 décembre 2025, présentée comme un tournant décisif, n’a finalement été qu’un nouvel exercice de promesses creuses et de proclamations sans substance

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