L’auteure de cette tribune ose affirmer que les réfugiés, les exilés et les groupes d’opposition, détiendraient à eux seuls les clefs d’une paix durable dans la région des Grands Lacs. Une telle assertion, formulée sans nuance ni regard critique, révèle une volonté manifeste de reconfigurer le débat politique en dissimulant la nature réelle de certaines forces en présence.
Car de quels "dissidents" parle-t-on ici ? Le silence assourdissant de Victoire Ingabire sur les FDLR, organisation génocidaire classée comme groupe terroriste par les Nations Unies, est à ce titre révélateur. Elle ne les nomme pas, mais les absout implicitement, en les noyant dans la catégorie vertueuse de l’"exil politique".
En qualifiant les éléments survivants de cette nébuleuse criminelle de simples dissidents, elle accomplit une dangereuse opération de blanchiment historique. Elle accorde, par le truchement du langage, une respectabilité à une organisation dont le socle idéologique demeure structuré autour d’un négationnisme militant et d’un objectif explicite : revenir au Rwanda pour "terminer le travail", selon leurs propres mots.
La prudence lexicale d’Ingabire ne saurait donc être interprétée comme une maladresse : il s’agit bel et bien d’une stratégie, mûrement réfléchie, visant à offrir une nouvelle légitimité à ceux que l’Histoire a définitivement disqualifiés.
Cette entreprise d’inversion morale s’accompagne d’une série d’accusations dirigées contre le gouvernement rwandais : absence de démocratie, déni de justice, violations des droits humains, exclusion sociale et économique. Rien ne manque au catalogue des griefs habituellement dressés par les contempteurs du Rwanda contemporain. Pourtant, ces accusations, assénées sans démonstration, relèvent davantage du discours incantatoire que de l’analyse politique rigoureuse.
Elles trahissent surtout l’incapacité, voire le refus, de reconnaître les avancées spectaculaires qu’a connues le Rwanda depuis 1994 en matière de gouvernance, de réconciliation nationale, de justice transitionnelle et de développement humain.
Victoire Ingabire se pare des oripeaux de la démocratie, mais elle en trahit l’essence par ses accointances. Car ses alliances ne relèvent pas de l’opposition politique au sens noble et républicain du terme. Elles sont scellées avec les forces les plus rétrogrades, les plus violentes, et les plus révisionnistes de la région. Elle a fait sienne la cause des FDLR, tout comme elle s’inscrit dans une connivence tacite avec les coalitions militaires qui, ces derniers mois, ont vu s’unir les FARDC, les FDLR, des mercenaires étrangers, les milices burundaises, les "Wazalendo", et des éléments de la SADC dans une guerre ouverte contre le M23.
Or, c’est précisément cette coalition, défendue par Ingabire à mots couverts, qui a été mise en déroute par les forces de l’AFC/M23, avec pour conséquence directe la libération de nombreuses populations hutu longtemps prises en otage par les FDLR.
Grâce au soutien du HCR, ces populations rentrent aujourd’hui au Rwanda dans la dignité, brisant ainsi le narratif victimaire que certains continuaient d’entretenir depuis l’extérieur.
La défaite militaire de cette coalition hétéroclite, et la dislocation de la base arrière idéologique et logistique dont bénéficiait Victoire Ingabire dans l’Est congolais, expliquent la virulence renouvelée de son discours. Ce n’est pas la paix qu’elle défend, mais la survie d’un combat perdu. Ce n’est pas la démocratie qu’elle incarne, mais le masque d’un projet fondamentalement incompatible avec le vivre-ensemble rwandais, fondé sur la reconnaissance du génocide des tutsi, la justice réparatrice et la réintégration sociale des rescapés.
La paix véritable dans la région des Grands Lacs ne saurait advenir par des compromis avec les ténèbres. Elle exige la clarté morale, la lucidité historique, et le rejet sans équivoque de toute collusion avec les entreprises génocidaires. À ce titre, les prises de parole de Victoire Ingabire ne peuvent être considérées comme de simples divergences d’opinion dans le champ démocratique. Elles relèvent d’un positionnement idéologique qui fait le lit de la haine et du révisionnisme, sous couvert d’un humanisme frelaté.
Il appartient aux observateurs attentifs de la région de ne pas se laisser abuser par le lexique enjolivé des faussaires de la paix. Le Rwanda n’est pas parfait, mais il avance, il reconstruit, il réintègre. Ce chemin est fragile, mais il est réel. Et il ne saurait être entravé par celles et ceux qui, à distance, nourrissent les braises du passé en prétendant parler au nom des "voix étouffées", tout en occultant leur alliance avec les forces les plus bruyantes du malheur.

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