En affirmant sans ambages que « si tu veux aider un pays, travaille avec son gouvernement, pas une ONG qui va trouver un moyen de faire du business », le diplomate américain scelle un changement de paradigme aussi radical que lourd de conséquences.
Les grandes organisations non gouvernementales, longtemps perçues comme les vecteurs incontournables de la solidarité et de l’assistance humanitaire, se trouvent ainsi mises au régime sec, sommées de justifier leur utilité réelle et leur probité financière.
Cette inflexion stratégique, annoncée par la première puissance mondiale, marque un tournant doctrinal décisif : l’aide internationale ne transiterait plus prioritairement par les ONG, mais reviendrait désormais aux États, considérés comme les dépositaires légitimes de l’action publique.
Ce rééquilibrage, qui peut apparaître comme un retour au bon sens institutionnel, sonne pourtant comme un désaveu cinglant pour un secteur souvent accusé de captation de ressources, d’opacité comptable et de multiplication de micro-projets sans vision structurante. Le reproche, récurrent mais rarement exprimé de manière aussi frontale, est désormais officiel : trop d’organisations se serviraient avant d’aider.
Au-delà de la formule percutante du diplomate américain, c’est l’ensemble de l’architecture globale de l’aide humanitaire qui se trouve interrogée. En érigeant l’État en pivot de toute assistance durable, Washington entend rappeler que le développement ne peut être externalisé à des acteurs privés, aussi vertueux se prétendent-ils.
Il s’agit, selon la logique défendue, de redonner aux gouvernements la responsabilité première de l’action publique, de renforcer leur capacité d’absorption et de restaurer une souveraineté trop souvent contournée par des organisations internationales devenues des États parallèles.
Pour les ONG, l’avertissement est clair, presque brutal : il leur faudra s’ajuster, revoir leurs modes d’intervention, justifier leurs pratiques et refonder leur légitimité. Nombre d’entre elles devront abandonner leurs réflexes de rente humanitaire, se départir de la bureaucratie tentaculaire qui absorbe une part disproportionnée des fonds, et démontrer qu’elles ne sont pas seulement des entreprises déguisées sous le manteau de la compassion. A défaut, elles risquent non seulement la marginalisation, mais peut-être une lente obsolescence.
Cette recomposition annoncée pourrait pourtant, si elle est bien conduite, inaugurer un cycle vertueux. En confiant davantage de responsabilités aux États, la coopération internationale pourrait cesser de contourner les souverainetés fragiles pour, au contraire, contribuer à les renforcer.
A condition, toutefois, que ces États soient dotés d’institutions crédibles, transparentes et redevables, faute de quoi l’aide risque de glisser d’un intermédiaire hégémonique à un autre, sans bénéfice réel pour les populations vulnérables.
Ainsi, la déclaration américaine ouvre un chantier immense : celui de la redéfinition de l’action humanitaire dans un monde où les crises se multiplient et où les ressources s’épuisent.
Les ONG, désormais averties, devront intégrer ce nouveau paradigme si elles veulent continuer d’exister. L’ère de l’impunité morale et de l’autorité incontestée touche à sa fin ; commence celle de l’exigence, de la transparence et de la responsabilité.
Le temps des ONG au régime sec est arrivé, et il impose à chacune un examen de conscience aussi salutaire que nécessaire.














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