Aubin Minaku et Emmanuel Ramazani Shadary, respectivement vice-président et secrétaire permanent de cette formation politique longtemps inféodée à l’ancien président Joseph Kabila, viennent d’être formellement interdits de quitter le territoire congolais. L’ordre, émanant du ministre d’État en charge de la Justice et garde des sceaux, Constant Mutamba, leur a été notifié concomitamment à une convocation les enjoignant de se présenter à l’auditorat militaire supérieur de la Gombe afin de répondre à des soupçons de collusion avec les factions rebelles du M23/AFC.
La nouvelle, relayée par plusieurs médias, sonne comme un coup de tonnerre dans un paysage politique déjà fragmenté. Selon les termes du communiqué officiel, les deux dignitaires du régime kabiliste sont appelés à « éclairer la justice » sur leurs liens présumés avec cette organisation armée, tristement célèbre pour son activisme belliqueux dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, et que Kinshasa accuse d’être soutenue par Kigali.
Si le procureur militaire s’est gardé de détailler les motivations exactes de cette convocation, le ministre Mutamba, lui, a adopté un ton sans équivoque, révélant que ces hauts cadres du PPRD seraient impliqués dans des manœuvres subversives au profit du M23/AFC. Une telle affirmation, lancée avec fracas, s’inscrit dans une tendance récurrente du pouvoir en place : celle d’un volontarisme affiché, souvent démenti par des actions paradoxales.
Un pouvoir en quête de cohérence : entre velléités répressives et discours d’apaisement
Cette convocation intervient dans un climat politique où le pouvoir oscille entre l’annonce de grandes réformes et des actes en flagrante contradiction avec ses propres engagements. Tandis qu’il est question de la formation d’un gouvernement d’union nationale et que certaines libérations de prisonniers politiques sont orchestrées à grand renfort de communication, le même régime ne semble pas hésiter à actionner les leviers de la répression contre des figures de l’opposition et de l’ancien régime.
Un paradoxe symptomatique d’un système vacillant, où les postures conciliantes masquent mal une gouvernance où la volonté de rupture se heurte à la perpétuation des pratiques liberticides.
Ainsi va la République démocratique du Congo, ballottée entre les promesses d’un renouveau démocratique et les écueils d’un pouvoir dont l’autorité oscille entre calculs politiques et gesticulations spectaculaires. Dans ce jeu d’ombres et de lumières, la justice militaire agit-elle en toute indépendance, ou n’est-elle qu’un instrument au service d’un pouvoir soucieux d’asseoir son emprise sur ses adversaires d’hier ? La réponse, sans doute, ne tardera pas à émerger des méandres d’une scène politique où le droit peine encore à se soustraire aux impératifs de la raison d’État.

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