L’Eglise et le génocide au Rwanda : plus que complice

Redigé par Jean Bosco Siborurema
Le 7 janvier 2014 à 04:09

Le diable hante-t-il toujours les Rwandais. Sème-t-il toujours la zizanie comme aux temps coloniaux où les différences ethniques hutu tutsi ont été lentement et sûrement incrustées chez les Rwandais avec des accents manichéens des missionnaires et autre clérgé catholique ?
Un certain Jean Bosco Siborurema sur le forum DHR de ce 7 janvier 2014 réfléchit sur l’échancrure délibérément causée par le Clergé catholique dans la société rwandaise. Une idéologie de la zizanie administrée à des doses apparemment (...)

Le diable hante-t-il toujours les Rwandais. Sème-t-il toujours la zizanie comme aux temps coloniaux où les différences ethniques hutu tutsi ont été lentement et sûrement incrustées chez les Rwandais avec des accents manichéens des missionnaires et autre clérgé catholique ?

Un certain Jean Bosco Siborurema sur le forum DHR de ce 7 janvier 2014 réfléchit sur l’échancrure délibérément causée par le Clergé catholique dans la société rwandaise. Une idéologie de la zizanie administrée à des doses apparemment normales pendant plusieurs décades voir cent ans.

Les nouveaux stratèges de désidéologisation avec l’idéologie de la rwandité, à moins qu’ils aient une baguette magique, pourront-ils déterrer cette ivraie qui s’est enracinée dans le vécu quotidien des Rwandais en quelques années ?

Note introductive de l’Editeur

« 
« Le Rwanda-Urundi constitue la région où l’évangélisation est la plus avancée. Les chefs sont en majorité catholiques, le clergé local abondant, surtout au Rwanda. L’ensemble nous offre le joyau de
l’Afrique. » »


(Histoire universelle des missions catholiques, t.4, Grund, Paris,
1958, page 167).

Les images de ce génocide sont encore fortement gravées dans les mémoires de chacun. Il avait débuté le 6 avril 1994, et conduit en 100 jours à l’extermination brutale de 800 000 personnes au minimum,l’ensemble d’entre elles appartenant essentiellement à l’ethnie Tutsi. Un massacre horrible qui eut lieu dans l’indifférence quasi totale de pratiquement tous les responsables de la communauté internationale !

Il est fort intéressant de noter que la première liste officielle des présumés génocidaires égrenait quelques deux mille personnes toutes responsables du crime de génocide, or parmi celles-ci figuraient onze ecclésiastiques de l’Eglise Catholique. Voici, et leurs noms, et leurs fonctions :

 Rwamayanja, prêtre de Ndusu, Janja (Ruhengeri)
 Munyeshyaka Wenceslas, abbé de Sainte Famille (Kigali)
 Gakuba, curé de la paroisse Ndera, Gikomero (Kigali)
 Hitayezu Marcel, prêtre de la paroisse Mubuga, Gishyita (Kibuye)
 Maindron Gabriel (alias Muderere), abbé, curé de la paroisse de
Kongo-nil, Rutsiro (Kibuye)
 Ntamugabumwe Jean, prêtre, directeur de l’école secondaire de
Murunda, Rutsiro (ami personnel de l’abbé Maindron)
 Seromba Athanase, curé de Nyange, Kivumu (fils spirituel de l’abbé Maindron)
 Twagirayesu Urbain, prêtre de la paroisse de Kongo-nil, Rutsiro
Bellomi Isaco Carlo, prêtre, Rusumo
Rusingizandekwe Thaddée, abbé,prêtre, Kibeho
Harmisidasi, abbé, prêtre, directeur d’école,Nyabisindu, Nyanza !

Père Theunis en habit de prisonnier

Autre point fort important à remarquer, c’est que parmi ces onze personnes il y a deux missionnaires européens, ce sont : l’abbé Maindron Gabriel (de France) et le prêtre Bellomi Carlo (d’Italie) !

L’affaire du génocide au Rwanda est clairement à rattacher à toute une idéologie extrémiste catholique qui s’est installée en un laps de temps d’au moins 30 ans. La façon dont s’est opérée cette mise en place mérite maintenant d’être sérieusement remise en question.

Dans le compte rendu analytique du 16 mai 1997 sur les auditions de la commission d’enquête parlementaire belge concernant le dossier Rwandais, au sénat, on peut lire des choses bougrement intéressantes et, entre autres, des témoignages mettant en cause directement l’Eglise catholique et ses filières.

On y traite, par ex., de l’abbé Rukundo Emmanuel, pour lequel de nombreux témoignages concordants démontrent l’évidence de ses responsabilités dans le génocide. Cet abbé aurait ultérieurement pu profiter, pour fuir le Rwanda, des services de "Caritas Catholica" la filière vaticane par excellence.

Ce prêtre, avec du sang plein les mains, s’est alors retrouver sain et sauf au Vatican, où, dorénavant, il passera tranquillement son temps à étudier... le droit canon, les règles de droit vaticanes... ça peut toujours servir... à lui d’abord sans doute !

Mais "Caritas Catholica" n’est sûrement pas la seule filière dont dispose le Vatican, les réseaux de "Caritas International", ceux de "l’Internationale Démocrate-Chrétienne" - qui aurait, dit-on, des liens étroits avec l’Opus Dei - auraient, pour leur part, permis à une cinquantaine de prêtres Rwandais génocidaires de fuir vers l’Europe et le Canada.

Ainsi d’un père blanc, Johan Pristil, c’était un fervent supporter du Hutu-power, de l’extrémisme Hutu - les Hutus sont presque tous catholiques au Rwanda - il lui fut donné à un certain moment d’être désigné pour participer à la création d’une radio au Rwanda, une fois cette radio mise en ondes, il y anima des séances où il traduisit en Kinyarwanda... rien moins que le "Mein Kampf de Hitler, afin d’inciter à la haine, non pas envers les juifs cette fois-ci, mais envers les Tutsis !

Les fonds pour la création de cette radio aurait été donnés par la démocratie chrétienne allemande !

Selon ce compte rendu analytique ainsi que les documents et les témoignages recueillis, nombreuses seraient les ONG catholiques qui auraient financé l’armement des milices hutues au Zaïre [l’actuelle R.D.C], dans les camps de réfugiés !

Il y a même des témoignages affirmant que des prêtres catholiques auraient, durant le génocide, mis des habits militaires pour participer activement à cette odieuse besogne !

Certaines "bonnes sœurs" ("bonnes"... vraiment ?), ont été jugées, par des tribunaux belges, coupables d’avoir livré aux milices Hutus génocidaires des personnes de l’ethnie Tutsi qui étaient venus prendre refuge chez elles... au sein même de leurs couvents respectifs ; il s’agît, notamment, de Consolata Mukangango (sœur Gertrude), et de Julienne Mukabutera (sœur Maria Kizito).


Mais comment est-ce possible des horreurs pareilles ? Comment l’Eglise peut-elle être impliquée à un tel niveau dans un génocide d’une telle envergure ?

Pour bien saisir comment une telle folie meurtrière peut arriver à se produire, jetons un coup d’œil sur l’histoire du Rwanda. En pleine campagne de colonisation (donc aussi de son corollaire constant : la campagne d’évangélisation), vers 1890, les premiers missionnaires catholiques (chrétiens) ont dû faire face à une grande résistance de la part des rois (Mwamis) Tutsis ; ceux-ci n’avaient pas du tout
l’intention de se laisser "convertir".

Ainsi, dans tout le pays, ce n’est que chez les Hutus que les missionnaires trouvèrent des "âmes" à convertir. Puis, en 1922, Le Rwanda et le Burundi tombèrent officiellement sous Administration de la Belgique. Plus tard, la Belgique va serrer la main à une aristocratie Tutsi, celle qui était opposée au Roi Tutsi (le Mwami), et elle destitue, en quelque sorte, les chefs Hutus. Donc, dit autrement, les belges poignardent dans le dos leurs alliés de la première heure, les bons Hutus convertis, et ils prennent comme alliés les membres de l’aristocratie Tutsis qui sont en opposition avec leur propre Roi.

On peut dire qu’il s’agit là du choix d’une nouvelle stratégie politique : une fois tous les Hutus convertis à leur Religion, les belges se mettent dans le camp de l’autre ethnie, ils privilégient les Tutsis et défavorisent les Hutus... de toutes façons, ceux-là étaient déjà convertis alors... Du coup ce sont les Tutsis qui commencent à affluer dans les Eglises et les Ecoles catholiques.

Un peu plus tard, en 1931 exactement, l’Eglise va obtenir de ses partenaires, les autorités belges bien sûr, la destitution du Roi Tutsi Musinga, accusé par elle de s’opposer à la Christianisation de son peuple. Et bien évidemment le colonisateur et l’Eglise se sont arrangés pour que succède à ce roi un africain "traître", une marionnette à eux, docile à souhait.

Ainsi, en 1946, le successeur de Musinga fut Mutara III, lequel s’empressa de consacrer officiellement le Rwanda au "Christ-Roi"... ô un heureux hasard simplement... ! Le Vatican jurerait volontiers qu’il n’y est pour rien, que c’est une décision du roi "très croyant" Mutara III... ben voyons... il ne nous reste qu’à être assez naïfs pour le croire !

En fait, à ce moment là, c’était l’idéal pour l’Eglise et aussi pour la Belgique, les deux mains sur un autre gros ventre, celui d’Albert 1er cette fois ! Le simple peuple Hutus était converti au christianisme, et il y avait une trinité fantastique : Le trône du roi Tutsi consacré au Christ-Roi, l’Eglise, et l’aristocratie Tutsi !
Comme on dirait maintenant, quand tout va si bien : "que veut le peuple ? " Mais à cette époque là, que le peuple eut une volonté à exprimer c’eut été vraiment incongru !

Mais, comme partout en Afrique, au milieu des années cinquante, voire fin de ces années cinquante, un vent de réclamation d’indépendance commença cependant à souffler chez les Tutsis. Et l’Eglise, avec, bien évidemment, quelque part dans le décor comme toujours sa comparse la Belgique, l’Eglise donc va à nouveau ajuster sa stratégie politique, toujours dans le sens de ses intérêts comme d’habitude : elle va à nouveau rompre une alliance pour en créer une autre qu’elle estime plus avantageuse pour elle.

Les Tutsis "indépendantistes" sont largués et traités de "communistes", et donc de gens "athées", des "mauvais fidèles" quoi !

Et les Hutus sont à nouveau les chéris privilégiés. Cette attitude, toujours délibérément agressive à l’égard de l’une ou l’autre de ces deux ethnies - qui pourtant jusqu’alors, cohabitaient depuis des siècles sans aucune animosité, se mariant entre eux, vivants en bons voisins - cette attitude des pouvoirs religieux, comme politiques, créera dès lors dans la société Rwandaise, une division de fait qui n’ira qu’en s’approfondissant jusqu’à devenir une division raciale totale.


P.S
Le préposé à l’Edition française d’IGIHE s’est autorisé à publier une partie de ce long texte qu’il a illustré pour souci d’aération. Il espère que cela ne portera aucun préjudice à l’auteur. Au cas contraire, ses souhaits seront pris en considération.


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