Après deux jours d’extrêmes violences, qui ont fait au moins 28 morts et des centaines de blessés, le président ukrainien Viktor Ianoukovicth a annoncé avoir conclu une trêve avec les principaux chefs de file de l’opposition : l’ancien ministre de l’économie Arseni Iatseniouk, l’ex-boxeur Vitali Klitschko et le nationaliste Oleh Tiahnibok.
Selon lui, des négociations vont débuter pour éviter de nouvelles effusions de sang et « stabiliser la situation dans l’intérêt de la paix sociale ». Ces derniers n’ont pas confirmé avoir avalisé cette trêve.

Veillée d’armes à Kiev
Les lignes d’affrontements entre manifestants et forces de l’ordre ont peu bougé dans la capitale ukranienne. La police, dont l’assaut final était redouté par l’opposition jusqu’à l’annonce de la trêve, tient toujours une partie de la place de l’Indépendance, mais des manifestants résistaient derrière une barrière de pneus en flammes.
Il y a eu peu d’affrontements directs, mercredi. Une atmosphère de veillée d’armes régnait dans le centre-ville, entre d’un côté la police antiémeute, prête à poursuivre son assaut, et de l’autre les opposants, toujours regroupés dans le centre, place de l’Indépendance, mais ayant perdu leur principale base logistique : la Maison des syndicats, dont les étages ont en grande partie brûlé dans la nuit de mardi à mercredi. Les forces de sécurité occupaient un tiers de la place, y démolissant les installations déployées.
Au milieu de la place, des prêtres récitaient des prières, des manifestants renforçaient leurs boucliers de fortune et d’autres préparaient des cocktails Molotov, comme le montre cette vidéo publiée par le Kyiv Post :
Un état d’urgence qui ne dit pas son nom
Les autorités ont annoncé le lancement d’une vaste opération « antiterroriste » contre les « groupes extrémistes » ayant occupé plusieurs bâtiments publics.
« Des tribunaux sont incendiés, des vandales détruisent des logements privés, tuent des civils pacifiques », a expliqué le chef des services spéciaux de sécurité, Oleksandr Iakimenko, qui accuse les manifestants d’avoir pris possession d’environ 1 500 armes à feu et 100 000 munitions.
Ces chiffres ne sont pas vérifiables, mais dans la nuit de mardi à mercredi, des manifestants à Lviv, dans l’ouest de l’Ukraine, ont pris possession de bâtiments militaires, dont des dépôts d’armes.
Concrètement, les mesures d’exception comprises dans cette opération permettront à l’armée de faire usage de ses armes et de limiter la circulation des transports et des piétons. Les militaires pourront effectuer des contrôles d’identité et arrêter les personnes ayant commis des « actes illégaux ».
Selon un expert interrogé par le Kyiv Post, en vertu de ces mesures, les autorités pourraient également détenir les protestataires sans mandat pendant soixante-douze heures.
« Le but principal de l’opération antiterroriste est [...] de protéger les civils et éviter une guerre civile », assure le ministère, alors que le métro est déjà entièrement fermé, et la circulation limitée dans le centre-ville.
Menaces de sanctions européennes
Dans les chancelleries occidentales, les condamnations de la violence se sont succédé, de Paris à Washington en passant par Berlin. La crise ukrainienne a été au centre d’un conseil des ministres franco-allemand qui se tenait à l’Elysée. Lors d’une conférence de presse commune, François Hollande et Angela Merkel ont menacé Kiev de sanctions.
Jeudi, les ministres des affaires étrangères français, allemand et polonais se rendront à Kiev, avant une réunion d’urgence à Bruxelles, où des sanctions (notamment des interdictions de visa et des gels d’avoirs pour des dirigeants ukrainiens) pourraient être décidées.

Lire les réactions européennes : Hollande et Merkel promettent des sanctions contre les auteurs de la répression en Ukraine
La Russie a continué à accuser les pays occidentaux de soutenir une « tentative de coup d’Etat ». Selon le Kremlin, l’Europe et les Etats-Unis ont « suffisamment fait les médiateurs » à Kiev. Moscou a demandé aux Européens de se contenter de faire cesser les violences et de convaincre l’opposition de coopérer avec les autorités ukrainiennes.
Le chef de l’armée remplacé
Véhicules en feu à Kiev, mardi 18 février.
A l’issue de cette deuxième journée de violence, Viktor Ianoukovitch a annoncé le remplacement du chef de l’armée, Volodymyr Zamana. Ce remaniement intervient alors que l’entrée en jeu des forces armées est pressentie pour la première fois, dans le cadre de l’« opération antiterroristes » des autorités.
Les services spéciaux ukrainiens ont par ailleurs annoncé l’ouverture d’une enquête pour tentative de prise illégale du pouvoir. L’enquête, qui vise « certains hommes politiques » non nommés, porte sur « des actions politiques illégales visant à la prise du pouvoir ».
Mardi, c’est le changement d’ordre du jour à la Rada, le Parlement ukrainien, qui a mis le feu aux poudres : alors que devait être examinée une réforme constitutionnelle (l’une des principales demandes des manifestants), la mesure avait été retirée de l’agenda au motif que la motion n’avait pas reçu suffisamment de signatures. Cette décision a entraîné la colère de manifestants qui ont marché vers le Parlement et la réponse musclée des forces de l’ordre, qui ont lancé l’assaut contre Maïdan.
A l’ouest, l’Assemblée régionale de Lviv proclame son autonomie
Plusieurs actions de protestation ont eu lieu dans des villes de l’ouest de l’Ukraine. A Lviv, des manifestants se sont emparés de plusieurs bâtiments publics.

L’assemblée régionale de cette ville de 750 000 habitants, bastion du nationalisme ukrainien, a diffusé un communiqué dénonçant la « guerre ouverte » lancée par le gouvernement et annoncé qu’elle assumerait désormais localement le pouvoir exécutif, proclamant son autonomie de facto : « Le Parlement prend sur lui-même la responsabilité de l’avenir de cette région et de son peuple. »
D’après la Pologne, des Ukrainiens bloquaient également le poste-frontière de Korczowa, près de Lviv, et selon les médias locaux des bâtiments publics ont été envahis par des opposants dans d’autres villes d’Ukraine occidentale : à Khmelnitski, Ivano-Frankivsk, Oujorod et Ternopil.
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