Benoît XVI, un théologien allemand conservateur qui a été pape pendant huit ans avant de démissionner en 2013, est décédé le 31 décembre à l’âge de 95 ans.
Quelques jours après sa mort, son assistant le plus proche, Georg Gaenswein, a révélé les inquiétudes de Benoît concernant certains des changements apportés par son successeur le pape François, notamment sa décision de restreindre l’utilisation de la messe en latin.
La critique n’était pas nouvelle. De nombreux membres de l’aile conservatrice de la Curie romaine, qui gouverne l’Église, se plaignent depuis longtemps que le pontife argentin est autoritaire et trop concentré sur les questions pastorales au détriment de la rigueur théologique.
Mais cela a été suivi par la mort du cardinal australien George Pell, et la révélation subséquente qu’il était l’auteur d’une note anonyme publiée l’année dernière qui attaquait directement François.
La note avait décrit la papauté actuelle comme une "catastrophe", et critiquait entre autres les "lourds échecs" de la diplomatie vaticane sous sa direction.
Pell, un ancien proche conseiller de Francis, a été emprisonné pour abus sexuels sur des enfants avant d’être acquitté en 2020.
Puis, à la fin du mois, le cardinal allemand Gerhard Mueller a publié un livre mettant de l’huile sur le feu.
L’ancien chef de la puissante congrégation pour la doctrine de la foi du Vatican a dénoncé la "confusion doctrinale" de François et critiqué l’influence d’un "cercle magique" autour de lui.
Guerre civile
Le livre de Mueller a provoqué la consternation parmi certains à l’intérieur du Vatican. « Lorsque vous acceptez le bonnet de cardinal, vous acceptez de soutenir et d’aider le pape. Les critiques sont faites en privé, pas en public", a déclaré un haut responsable de la Secrétairerie d’État.
Le pape François lui-même a déclaré dimanche dernier aux journalistes dans son avion de retour du Soudan du Sud que ses détracteurs avaient "exploité" la mort de Benoît XVI pour faire avancer leur cause.
"Et ceux qui exploitent une si bonne personne, un tel homme de Dieu... eh bien je dirais que ce sont des gens sans éthique, ce sont des gens appartenant à un parti, pas à l’Église", a-t-il dit.
L’expert italien du Vatican, Marco Politi, a déclaré que le livre de Mueller "est une nouvelle étape dans l’escalade imparable des adversaires du pape".
"Il y a une guerre civile au cœur de l’église qui va se poursuivre jusqu’au dernier jour de la papauté", a-t-il déclaré à l’AFP.
Consultations mondiales
Les tensions surviennent alors que l’Église catholique mène une vaste consultation mondiale sur son avenir, le “Synode sur la synodalité” lancé par le pape François en 2021.
Conçu pour décentraliser la gouvernance de l’Église, il a révélé des différences essentielles, l’Église catholique allemande, par exemple, montrant nettement plus d’appétit pour la réforme que Rome.
Les discussions portent sur tout, de la place des femmes dans l’Église à la manière de gérer le scandale des abus sexuels sur les enfants, de la question de savoir si les prêtres doivent se marier à la manière dont l’Église accueille les croyants LGBTQ.
Avec le synode, qui doit se conclure en 2024, "nous verrons le poids des différents courants au sein de l’Église", a déclaré Politi.
Il a déclaré que les critiques du pape François convergent déjà vers un "courant de pensée capable d’influencer le prochain conclave", et par extension la prochaine papauté.
Un conclave, un rassemblement mondial de cardinaux, serait convoqué si François mourait ou démissionnait.
Le pape a déclaré qu’il serait prêt à suivre l’exemple de Benoît et à démissionner si sa santé l’empêchait de faire son travail.
Mais malgré des problèmes de genou qui l’ont amené à utiliser un fauteuil roulant ces derniers mois, il reste actif et responsable - et extrêmement populaire dans le monde entier, comme l’ont montré les foules lors de son récent voyage en Afrique.
"Ce genou est agaçant, mais j’avance, doucement, et on verra", a déclaré dimanche l’homme de 86 ans, en plaisantant : "Vous savez que la mauvaise herbe ne meurt jamais !"

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