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Retour à Kagitumba, berceau historique de la libération du Rwanda

Redigé par Alain-Bertrand Tunezerwe
Le 2 octobre 2024 à 03:53

Le 1er octobre 1990, dans le silence d’une aube qui semblait ordinaire, un événement bouleversant se préparait à Kagitumba, un poste-frontière tranquille au nord-est du Rwanda. Ce jour-là, le Front Patriotique Rwandais (FPR), sous la direction du Général-Major Fred Gisa Rwigema, lança son offensive pour libérer le Rwanda du régime autoritaire et meurtrier de Juvénal Habyarimana. Cette journée historique marqua le début de la guerre de libération, un conflit qui allait radicalement transformer le Rwanda.

L’assaut décisif du Front Patriotique Rwandais

Fred Gisa Rwigema, figure emblématique de la lutte, conduisit des centaines de soldats à traverser la frontière depuis l’Ouganda. Leur mission : instaurer un Rwanda libre et mettre fin à des décennies de dictature et d’exclusion ethnique. Les premières heures du 1er octobre 1990 furent marquées par des combats intenses à la frontière. Les troupes gouvernementales, prises par surprise et peu préparées à une attaque d’une telle ampleur, furent rapidement submergées et durent battre en retraite.

À mesure que la journée avançait, les forces du FPR s’enfonçaient dans le territoire rwandais. L’après-midi, Fred Gisa Rwigema, debout sous deux arbres historiques à Kagitumba, prit la parole devant ses troupes. Environ 600 soldats étaient présents, prêts à combattre pour la cause de la liberté. Le Général-Major réorganisa ses forces en plusieurs bataillons, confiant le premier bataillon au Major Chris Bunyenyezi, le quatrième au Colonel Ndugute Stephen, le sixième au Lieutenant-Colonel Adam Waswa, et le neuvième à Sam Kaka.

Dans un geste symbolique, Rwigema se débarrassa de ses insignes militaires ougandais, suivis de ses hommes, jetant ainsi symboliquement leur allégeance passée dans la rivière Umuvumba, qui serpente à travers Kagitumba. Ce moment incarnait un engagement solennel à la cause du Rwanda, renforçant le moral des troupes avant la rude bataille qui s’annonçait.

La perte tragique de Fred Gisa Rwigema

Le lendemain, 2 octobre 1990, le FPR poursuivit sa progression. Deux bataillons prirent la direction de Kigali, tandis que les autres se dirigèrent vers Nyagatare. Mais lors d’une reconnaissance près de Nyabwishongwezi, Fred Gisa Rwigema fut mortellement touché par une balle tirée par des soldats des Forces Armées Rwandaises (FAR), qui tentaient de freiner l’avancée du FPR.

La mort de Rwigema fut un coup dévastateur pour le mouvement, mais dans un premier temps, la nouvelle ne se propagea pas immédiatement parmi les troupes. Les forces du FPR, ignorant la perte de leur chef, continuèrent à mener leurs opérations. Le 3 octobre, elles prirent le contrôle de Nyagatare, puis, dès le lendemain, s’emparèrent de Gabiro. Le régime de Habyarimana, conscient de l’ampleur de la menace, fit appel à l’aide internationale, sollicitant des renforts de ses alliés, notamment le président zaïrois Mobutu Sese Seko, qui envoya des troupes en soutien. De violents combats s’ensuivirent, particulièrement dans la région de Gabiro.

À Kagitumba et Nyagatare, les populations locales, principalement rurales, furent rapidement prises dans le tourbillon de la guerre. Peu informés, les habitants apprirent souvent tardivement que leur pays venait d’entrer dans un conflit armé. La région, en grande partie dominée par le parc national de l’Akagera, n’abritait que peu d’habitants à cette époque. Pour ceux qui vivaient à proximité, la peur et la confusion régnèrent dans les premières heures de l’invasion.

Mukarubayiza Donatha, une résidente de Kagitumba, se souvient de ce matin-là. "Nous étions sur le point de partir travailler aux champs quand mon mari m’a dit qu’une annonce avait été faite à la radio, disant que le pays avait été attaqué." Ce n’est qu’au bulletin de 18h que la confirmation de l’assaut fut communiquée au grand public, déclenchant la panique. "On nous a ordonné de ne pas sortir de nos maisons. Nous avions tellement peur, car c’était la première fois que nous entendions des coups de feu," se remémore Donatha.

Le 4 octobre, elle vit pour la première fois les soldats du FPR, appelés "Inkotanyi". "Ils étaient différents des soldats que nous avions l’habitude de voir. Ils parlaient luganda ou kinyankole, mais ceux qui comprenaient leur langue nous ont traduit leurs paroles. Ils disaient que nous devions rester calmes, continuer à cultiver nos terres et que nous n’avions rien à craindre d’eux," raconte-t-elle. Contrairement aux forces gouvernementales, les Inkotanyi se comportaient avec respect envers les civils, payant même les denrées qu’ils prenaient dans les magasins.

Près d’un mois après le début du conflit, la nouvelle de la mort du Général-Major Fred Gisa Rwigema commença à se répandre, portant un coup dévastateur au mouvement de libération. Cette information se propagea rapidement parmi les populations locales, plongeant les combattants du FPR dans une profonde incertitude. "On nous a dit que Fred avait été tué sur la colline de Nyabwishongwezi et que les Inkotanyi avaient été défaits," se souvient Donatha. Pendant un certain temps, le régime de Habyarimana tenta de capitaliser sur cette tragédie, proclamant que la guerre était terminée et que les troupes rebelles avaient été repoussées.

Cependant, la résistance du FPR ne faiblit pas. Muzatsinda Pheneas, un commerçant de Kagitumba, se rappelle comment il fut capturé par les FAR après avoir tenté de fuir les combats. Il se souvient de ses compagnons d’infortune qui périrent à Byumba, tandis que lui-même réussit miraculeusement à s’échapper. "J’ai vu trois de mes compagnons mourir, mais par chance, j’ai pu m’enfuir et rejoindre les Inkotanyi," explique-t-il.

La montée en puissance du FPR sous la direction de Paul Kagame

Après la mort de Fred Gisa Rwigema, beaucoup pensèrent que la guerre était perdue. Pourtant, c’est à ce moment-là qu’un autre leader du FPR, Paul Kagame, alors en formation militaire aux États-Unis, prit la tête du mouvement. Son arrivée marqua un tournant décisif dans la guerre. Sous sa direction, le FPR changea de stratégie, s’enfonçant dans les montagnes des Virunga pour mener une guérilla plus adaptée à la situation.

Au fil des mois, les combats se poursuivirent, et malgré les nombreux obstacles, le FPR parvint à prendre l’avantage, contraignant le gouvernement rwandais à entamer des négociations. La mort du président Habyarimana, suivie du déclenchement du génocide contre les Tutsi en avril 1994, obligea les troupes du FPR à reprendre les armes pour stopper les massacres. Elles progressèrent inexorablement vers Kigali, mettant fin en même temps au régime d’Habyarimana et au génocide contre les Tutsi, qui avait coûté la vie à plus d’un million de personnes.

Aujourd’hui, Kagitumba reste un symbole puissant de la lutte pour la liberté au Rwanda. Pour ceux qui ont vécu les événements de 1990, ce petit poste-frontière représente bien plus qu’un lieu de passage. C’est ici que tout a commencé, dans ce coin reculé du Rwanda, où des hommes et des femmes ont décidé de se battre pour la dignité et l’avenir de leur pays.

Kagitumba, ce berceau de la résistance, demeure un témoin silencieux de l’un des tournants les plus cruciaux de l’histoire du Rwanda. Les souvenirs de cette époque, bien qu’empreints de douleur, résonnent encore dans les récits des habitants qui se souviennent du prix de la liberté et du sacrifice consenti pour construire un Rwanda nouveau, fondé sur l’unité, la justice et la réconciliation.

Le général-major Paul Kagame aimait s'exprimer dans les médias, affirmant que ce que ses troupes désiraient, c'était d'avoir le droit de participer à la gestion du pays, et qu'elles avaient pour objectif de protéger les Rwandais qui avaient été exilés pendant de nombreuses années.
Certains des soldats de la RPA qui faisaient partie de la garde rapprochée du général-major Paul Kagame incluaient Mugisha Pepekale, Happy Ruvusha, James Kabarebe, Alex Kagame, Charles Kayonga et John Gasana, qui était assis.
La RPA a commencé à partir de rien, sans équipement ni base opérationnelle, mais elle a fini par triompher grâce à la lutte pour la vérité.
Le général-major Paul Kagame est accompagné d'autres membres du FPR, dont des politiciens comme Tito Rutaremara (à droite).
Les jeunes filles qui ont accepté de sacrifier leur jeunesse se sont engagées à servir leur pays.
Pendant la guerre de libération, il était difficile de trouver des endroits où les médecins pouvaient soigner les blessés. À cette époque, ils se réfugiaient dans les buissons et accomplissaient leurs tâches avec efficacité.

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