La pression des milieux d’affaires britanniques était trop forte : lundi 19 mars, Londres a abandonné à peu près toutes ses revendications et a accepté les conditions posées par Bruxelles pour la période de transition que le gouvernement May réclamait, dans la foulée du Brexit. Une période durant laquelle le Royaume-Uni pourrait continuer à négocier sa « relation future » avec l’Union européenne (UE), sans perdre brutalement tous les avantages d’un Etat membre.
La transition ne devra durer que vingt et un mois, du 30 mars 2019, lendemain du Brexit, jusqu’au 31 décembre 2020, comme le réclamaient les Européens. Et pas jusqu’en mars 2021, comme le souhaitait initialement le gouvernement de Mme May. Autre concession, bien plus conséquente : Londres a accepté que les citoyens de l’UE venant s’installer au Royaume-Uni durant la période de transition puissent bénéficier du même droit de séjour, à la fin de la période de transition, que ceux arrivés dans le pays avant le Brexit.
Londres a par ailleurs renoncé au « droit de veto » réclamé sur les lois que l’UE adopterait durant cette période de transition : le pays pourra, jusqu’au 31 décembre 2020, continuer d’accéder sans entraves au marché intérieur européen, mais devra continuer de contribuer au budget communautaire, et il n’aura plus du tout voix au chapitre : ni ministres invités aux réunions bruxelloises, ni députés européens.
Pas de « clause guillotine »
Les Britanniques pourront juste à titre purement consultatif, participer à des réunions d’experts – car sur des sujets comme la sécurité alimentaire ou la lutte contre le terrorisme, leurs avis seront utiles aux Européens. Londres pourra aussi entrer en négociation avec des pays tiers, en vue de conclure des accords commerciaux, mais pas question que ces accords entrent en vigueur durant la période de transition.
Bruxelles a cependant échoué, pour l’instant, à imposer une « clause guillotine », amputant le Royaume-Uni de certains de ses droits d’accès au marché intérieur durant la transition si le pays ne se conformait pas aux lois de l’UE ou aux décisions de la Cour de justice de Luxembourg, la plus haute juridiction européenne.
Michel Barnier, le négociateur en chef de l’UE, s’est félicité, lundi, d’avoir pu franchir avec son homologue britannique David Davis une étape « décisive » des discussions avec Londres. « Nous avons fait ces derniers jours une partie essentielle du chemin vers un départ ordonné » du Royaume-Uni, a ajouté le Français.
« Accord de retrait »
De fait, la perspective d’un « non-accord » entre Londres et Bruxelles s’éloigne, même si M. Barnier a précisé, lundi, que la transition ne sera définitivement acquise que quand les parties se seront mises d’accord sur tous les autres points du divorce, au plus tard en octobre de cette année.
Sur l’épineuse question irlandaise, Londres a aussi significativement reculé, acceptant qu’en l’absence d’une solution britannique pour éviter le retour d’une « frontière dure » entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord, ce serait la proposition mise sur la table par les Européens qui s’imposerait. Or, cette dernière a tout d’une provocation pour le gouvernement May, qui dépend, pour sa fragile majorité parlementaire, d’une alliance de circonstance avec le petit parti unioniste nord-irlandais DUP.
Londres ayant souhaité vouloir aussi quitter l’union douanière au jour du Brexit, Bruxelles a proposé que le contrôle des marchandises, devenu nécessaire, entre l’UE à vingt-sept et le Royaume-Uni, ne s’effectue pas à la frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande, qui doit rester virtuelle afin de préserver les « accords de paix de 1998 (ayant mis fin à trente ans de « troubles » en Irlande du Nord). Ce contrôle aurait lieu dans les ports britanniques : une manière de réunifier l’île d’Irlande par le commerce.
Accélération des discussions
La récente annonce par le géant anglo-néerlandais Unilever qu’il préférait ne garder qu’un seul siège social, à Rotterdam (Pays-Bas), et qu’il allait supprimer le britannique, a-t-il poussé le gouvernement de Theresa May à accélérer les discussions bruxelloises ? La première ministre britannique avait promis d’obtenir un accord sur la transition avant fin mars… Elle y est donc parvenue.
A Bruxelles, les négociateurs vont maintenant pouvoir se concentrer sur la « relation future » que les Européens envisagent déjà comme un accord de libre-échange. Les Britanniques ont accepté ce canevas, mais ils militent pour qu’il intègre un accord sur les services financiers : ils veulent préserver le précieux « passeport » dont dispose la City de Londres pour vendre sans entraves ses services sur le marché intérieur européen.
Or, selon nos informations, sur ce point, les Vingt-Sept devraient approuver lors du Conseil européen du 23 mars des « lignes de négociation » très dures : ils ne sont prêts à accorder que des « régimes d’équivalences » à la place financière britannique, c’est à dire à lui ménager certes des accès assez complets à leurs places continentales, mais révocables à tout moment par la Commission. Ces régimes ne seront pas négociables : Bruxelles décidera toute seule de leur contenu mais tiendra évidemment compte des intérêts de la City, auxquels ceux des Vingt-Sept resteront liés.
« Nous sommes plus proches que jamais d’un bon accord entre le Royaume-Uni et l’UE », a affirmé David Davis, toujours positif, malgré l’évident désavantage de Londres dans une négociation depuis le début très déséquilibrée en faveur du continent...
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