Bujumbura : du sang sur les oranges

Redigé par Collette Braeckman
Le 24 mai 2015 à 04:43

Peu avant la tombée de la nuit de ce vendredi 22 mai 2015, l’atmosphère autour du marché central de Bujumbura, toujours très animé, était étrangement tendue.
Les policiers patrouillaient, encore plus nombreux que d’ordinaire et un vendeur de cartes téléphoniques semblait bien informé : « tout peut arriver ce soir, on nous dit que les banques pourraient être attaquées et pillées… »
Une heure plus tard, peu après 18 heures, trois lourdes explosions secouaient le quartier, provoquant la fuite de centaines de (...)

Peu avant la tombée de la nuit de ce vendredi 22 mai 2015, l’atmosphère autour du marché central de Bujumbura, toujours très animé, était étrangement tendue.

Les policiers patrouillaient, encore plus nombreux que d’ordinaire et un vendeur de cartes téléphoniques semblait bien informé : « tout peut arriver ce soir, on nous dit que les banques pourraient être attaquées et pillées… »

Une heure plus tard, peu après 18 heures, trois lourdes explosions secouaient le quartier, provoquant la fuite de centaines de piétons, chargés de ballots et pressés de filer au plus vite vers les quartiers populaires hérissés de barricades et de rouleaux de barbelés.

Un peu plus tard, devant la place déserte, les policiers interdisaient tout passage, assurant que les grenades avaient fait trois morts et un nombre indéterminé de blessés.

Là où voici une heure encore une foule animée faisait ses derniers achats avant le long week-end, ne gisaient plus que des éclats de verre, des oranges tâchées de sang. De ambulances emportaient des blessés déchiquetés vers les divers hôpitaux de la ville.

Cet incident dramatique montre à quel point l’atmosphère à Bujumbura se tend dangereusement : les manifestants ne désarment pas, récusant toujours le troisième mandat présidentiel et les heurts avec la police sont de plus en plus durs.

Des rumeurs font état des divisions au sein de l’armée tandis que le chef de l’Etat sourd à toutes les objurgations, tous les conseils, recule la date des élections législatives mais maintient au 26 juin un scrutin présidentiel qu’il entend bien remporter.

Dans cette ville envahie d’hommes en armes, où les citoyens vivent sur pied de guerre, où les morts commencent à s’accumuler, règne une atmosphère délétère qui fait songer à celle qui régnait à Kigali en 1993 ou 1994 : chacun savait que tout pouvait arriver et, sans savoir d’où partirait le coup fatal, faisait semblant de vivre normalement, la peur au ventre…

Une trêve de deux jours a été décrété par les manifestants. Si elle échoue, via la médiation onusienne et africaine, à ramener le calme, ce sera quitte ou double.


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