Le Tribunal de base de Nyarugenge a rendu ce 26 février 2015 le verdict dans l’affaire de diffamation opposant Burasa J. Gualbert, Directeur de Rushyashya au journaliste Muramira François Régis.

Ledit tribunal a décidé que Burasa écope une peine de six mois avec sursis et une amende de 3.200.000 Frw.

Burasa J. Gualbert a écrit un article sur "un film documentaire qui fait l’apologie du régime Habyarimana et de son MRND (Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement)" réalisé par le journaliste de Radio One Régis Muramira.

Burasa, dans son écrit, se demande pourquoi Régis a montré l’évolution du football au Rwanda d’avant 1994. Il part de là pour accuser l’auteur du documentaire de faire l’apologie du régime révolu.

Régis montre que le football rwandais sous l’ancien régime avait un visage plus avenant que l’actuel. Il montre le général Président Juvénal Habyarimana dans les stades avec une chanson fétiche louant son parti : "Umugambi ni umwe Banyarwanda...MRND yacu Nziza..." ( Un même objectif pour les Rwandais : Unité, Paix et Développement, Un seul parti MRND parfait...).

Burasa, un rescapé de ce triste génocide des Tutsi qu’il met sur le compte de ce parti MRND, parti moteur du régime Habyarimana, réagit sévèrement à la publication de ce documentaire qui ouvre ses blessures mal cicatrisées. Il est un survivant de ce génocide. Ce documentaire sort à la veille de la date anniversaire de sa commémoration.

Il fulmine et perd ses esprits. Pour lui, ils sont les mêmes, Régis et Kantano du RTLM qui a fait à longueur de journée l’appel à la chasse et au massacre des Tutsi, l’ennemi public.

Au fond, le problème reste entier. Même si Muramira Régis porte plainte à la Police brandissant l’autorisation de RDB de réaliser son film, des opinions sont partagées sur le verdict rendu par le Tribunal.

De un, Régis Muramira obtient une autorisation de RDB de produire son documentaire. Publié, il blesse certains rescapés car il évoque, dans certains de ses passages, des images, des horreurs que le jeune Muramira n’est pas à même de comprendre.

De deux, d’aucuns se demandent si l’autorité de l’audiovisuel rwandais, si elle existe,- existe-t-elle ?- aura visité ce documentaire avant sa publication. Vraisemblablement c’est non.

Alors, à qui la faute ?
A un citoyen, journaliste de son état, qui réagit au documentaire sous forme de rejet, car le produit cause une commotion cérébrale ? Sinon, pourquoi Jane Corbin de la BBC avec son "Rwanda 94 : Untold story" fait-elle couler beaucoup d’encre et qu’une commission ad hoc est mise sur pied pour déterminer les motivations et commanditaires de son brûlot ?

De trois, pour le cas du documentaire de Muramira, il ne faut pas aller si loin mais tout de même ! L’indépendance du juge devrait aller de pair avec une certaine analyse compréhensive pour le cas du Directeur de Rushyashya dont les blessures psychologiques suite aux sévices qu’il a subis en 1994 sont loin de se refermer.

Ce procès fera date et questionnera les pouvoirs publics sur la nécessité de comprendre que le monde actuel du business rwandais dans le secteur audiovisuel demande nécessairement qu’une Autorité souveraine de l’Audiovisuel soit instituée avec des personnalités triées sur le volet, sociologues, anthropologues et autres Sociolinguistes rwandais pour leur capacité de lier business à l’état culturel de la société rwandaise.