Conditions de travail de Samsung : une plainte pour « pratique commerciale trompeuse »

Redigé par Par Cécile Dehesdin reuters
Le 8 mars 2013 à 03:16

Trois associations françaises déposent plainte ce mardi 26 février contre le fabricant coréen auprès du parquet de Bobigny.
Peuples solidaires, Sherpa et Indecosa-CGT espèrent ainsi faire reconnaître que les engagements éthiques du géant de l’électronique constituent une « pratique commerciale trompeuse », et doivent donc être punis. Des gens marchent à côté du stand de Samsung au Congrès mondial du mobile à Barcelone, le 25 février 2013. REUTERS/Albert Gea.
C’est une évolution juridique intéressante de (...)

Trois associations françaises déposent plainte ce mardi 26 février contre le fabricant coréen auprès du parquet de Bobigny.

Peuples solidaires, Sherpa et Indecosa-CGT espèrent ainsi faire reconnaître que les engagements éthiques du géant de l’électronique constituent une « pratique commerciale trompeuse », et doivent donc être punis.

Des gens marchent à côté du stand de Samsung au Congrès mondial du mobile à Barcelone, le 25 février 2013. REUTERS/Albert Gea.

C’est une évolution juridique intéressante de la lutte entre associations de protections des droits de l’Homme et industriels pointés du doigt pour leurs pratiques, notamment en Asie.

Dans le communiqué qui annonce ce dépôt de plainte, les trois associations françaises s’appuient en effet sur le travail de China Labor Watch, une ONG basée à New York qui s’intéresse de près aux pratiques industrielles en Chine, notamment à celles de Foxconn (Apple) et de Samsung.

L’ONG avait notamment enquêté après la vague de suicides d’employés chinois des usines Foxconn. En août dernier, China Labor Watch a publié un rapport accablant pour Samsung, accusant entre autres certains de ses fournisseurs chinois d’employer des mineurs.

L’entreprise sud-coréenne avait alors mené des audits dans l’usine HEG Electronics de Huizhou, dans le sud de la Chine, mise en cause dans le rapport.

Samsung avait conclu début septembre n’avoir pas pu « identifier des travailleurs de moins de 16 ans », tout en reconnaissant d’autres infractions comme un système d’amendes contre les employés en cas de retard ou d’absence ou des dépassements trop fréquents des horaires de travail.

Insuffisant pour China Labor Watch, qui a affirmé à France 24 avoir transmis à Samsung une copie des cartes d’identité des enfants qui auraient travaillé sur place, et a ajouté que les responsables du site de Huizou avaient « simplement renvoyé les travailleurs en situation irrégulière ».

Six mois plus tard, trois associations françaises portent donc plainte contre Samsung en se basant sur ce rapport et d’autres enquêtes de China Labor Watch, pour « pratique commerciale trompeuse ». Est entre autres considéré comme trompeuse une pratique commerciale qui véhicule « des éléments faux susceptibles d’induire en erreur le consommateur moyen », soit parce qu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, soit parce qu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, portant par exemple sur « les caractéristiques essentielles du bien ou du service » –comme son origine, son mode et sa date de fabrication– ou sur « la portée des engagements de l’annonceur ».

On pourrait résumer le raisonnement des trois associations ainsi :
•Samsung affirme que « l’éthique constitue la pierre angulaire de [sa] philosophie et de [son] mode de fonctionnement », et que toutes ses activités « sont entreprises en observant un code moral qui garantit équité, respect de toutes les parties prenantes et transparence absolue ».
•Dans les faits, les pratiques de Samsung ou de certains de ses fournisseurs ne sont pas éthiques, et l’entreprise le sait.
•Les engagements éthiques de Samsung sont donc une pratique commerciale trompeuse

L’issue d’une telle plainte n’est pas claire. Les pratiques visées sont celles mises en œuvre ou qui produisent leurs effets en France, ce qui permet de viser celles qui proviennent de l’étranger. Mais le communiqué des associations note qu’il n’existe pas de jurisprudence sur la question de savoir si un engagement éthique peut être constitutif d’une pratique commerciale trompeuse. Le site du Dalloz étudiant évoquait d’ailleurs cette question au moment de la polémique sur Nutella et l’huile de palme, quand la société Ferrero avait pris plusieurs engagements éthiques. Pour le site, un engagement éthique peut tomber sous le coup des pratiques commerciales trompeuses, par exemple si on affirme que le bois d’un meuble provient d’une forêt exploitée « durablement » alors que ce n’est pas le cas.

La loi prévoit en cas de pratique commerciale trompeuse une peine maximale de deux ans de prison et/ou de 37.500 euros d’amende, amende qui peut être portée à 50% des dépenses de la publicité ou des pratiques constituant le délit.


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