Consolidation de la paix 17 ans après le génocide

Redigé par Jean-François Isibo
Le 30 août 2011 à 11:15

La paix n’est pas que l’absence de la guerre, c’est un idéal qui doit toujours être recherchée et, autant que faire se peut, être consolidée. C’est dans ce cadre que l’IRDP (Institut de Recherche et de Dialogue pour la Paix), en collaboration avec Interpeace, a présenté vendredi dernier les travaux de recherche effectués 17 ans après le génocide perpétré contre les Tutsi. Le thème retenu cette année est : « piliers et obstacles à la reconstruction de la paix tel que vus par les Rwandais, 17 ans après le (...)

La paix n’est pas que l’absence de la guerre, c’est un idéal qui doit toujours être recherchée et, autant que faire se peut, être consolidée. C’est dans ce cadre que l’IRDP (Institut de Recherche et de Dialogue pour la Paix), en collaboration avec Interpeace, a présenté vendredi dernier les travaux de recherche effectués 17 ans après le génocide perpétré contre les Tutsi.

Le thème retenu cette année est : « piliers et obstacles à la reconstruction de la paix tel que vus par les Rwandais, 17 ans après le génocide perpétré contre les Tutsi. » Ces travaux ont commencé par un mot de bienvenue du directeur de l’IRDP, le Professeur Pierre Rwanyindo Ruzirabwoba.

Puis, les présentations des résultats de la recherche ont successivement été faites par Docteur Munyandamutsa N. et Jean Paul Mugiraneza. Ensuite, un film documentaire intitulé « Road to Peace » a également été projeté où il était question de personnes variées qui échangeaient sur différents sujets.

A l’issue des présentations des résultats de la recherche de la projection du film, des réactions ont suivi. James Musoni, Ministre de l’Administration Locale, se demande pourquoi les gens quittent leurs postes et directement fuient le pays. Est-ce parce que le pays a souvent été caractérisé par des flots de réfugiés à différentes époques ?

Selon le Ministre James Musoni, il est toujours bon de connaître les acteurs soit de renforcement de la paix, soit des fauteurs de troubles. Parlant de l’ethnicité, le Ministre Musoni a fait savoir qu’il n’y a aucun avantage à se réclamer de l’ethnie telle ou telle autre quelles que soient les situations. Il a poursuivi en disant que supprimer les ethnies sur les cartes d’identité ne signifie pas les supprimer des cœurs et qu’il faudrait utiliser un langage sans ambiguïté aucune. Il faudrait éviter les quotas et de conclure qu’une étude a révélé que 99% de la population Rwandaise préfère être Rwandais tout court.

Présent à cette réunion du Groupe National, le Ministre de l’Education, Damien Habumuremyi, a salué les résultats de la recherche et n’a pas manqué de réagir sur la qualité de l’enseignement qui, pour certains, laisse à désirer. Beaucoup s’accordent à dire que l’enseignement est de bonne qualité dans les centres urbains uniquement.

Le Ministre Habumuremyi a indiqué que les étudiants, en provenance du Kenya vers l’Université Makerere de l’Ouganda, doivent reprendre l’année alors que les Rwandais continuent très aisément et sont même excellents. Il a, en outre, déclaré que la politique du MINEDUC est d’assurer une formation répondant au marché de l’emploi pour lutter contre le chômage. Le Ministre de l’Education a indiqué que bientôt il y aura l’introduction du Swahili en plus de l’Anglais, du Kinyarwanda et du Français comme langue et encourage les débats à tous les niveaux d’étude.

A la question de savoir si les députés sont réellement les représentants du peuple qui les a élus ? Les réponses restent divergentes d’une personne à une autre. S’il faut écrire une lettre à la présidente du Parlement et s’il faut attendre qu’on crée une commission de descente sur terrain, cela n’est pas très encourageant.

Un des parlementaires, l’honorable Désiré Nyandwi, a essayé d’élucider la situation en parlant de la mission des parlementaires et a souligné que, sous peu, une radio sera installée et qu’elle servira pour faire comprendre la mission des députés. La méthode intégrée sera d’usage. Selon Nyandwi, les Rwandais ignorent que le palais abritant les deux chambres, le Parlement et le Sénat sont à eux. 106 députés, a-t-il ajouté, ne peuvent pas atteindre les 11 millions de la population rwandaise.

Un autre point, non moins épineux, est la prise de décision. Parfois, la population s’inquiète par rapport à telle ou telle autre décision et on lui rétorque que cela vient d’en haut, qu’il s’agit de la faire appliquer ni plus, ni moins.

U n constat dégagé est que ce sont les intellectuels ignorants qui constituent le plus grand danger. L’éducation qualitative prime sur celle quantitative. Il est impératif d’instaurer un environnement, un climat de confiance, une liberté d’expression. Après la projection de « Road to Peace », il était clair que les gens s’expriment librement.

Les Rwandais, ont souligné les honorables Augustin Iyamuremye et le Professeur José Kagabo, n’ont jamais fini d’étonner le monde où, au niveau des Parlementaires africains, sur les 5 représentants de chaque pays, 3 d’entre eux ne peuvent pas partager le même hôtel alors qu’ils n’ont pas connu de génocide. L’histoire du Rwanda est à revoir pour en savoir davantage sur ce qui a toujours caractérisé ce beau pays avec ses réalités.

Le Rwanda a toujours été une nation bien organisée depuis des siècles et c’est pourquoi il a fallu recourir à la fameuse méthode « divide ut imperat » ou bien « diviser pour régner » afin de pouvoir le fragiliser. C’est alors que sont apparues les « ethnies »qui ont été à la base des flots de réfugiés jusqu’à l’holocauste de 1994 qui a emporté plus d’un millions des fils et filles du Rwanda.

A l’issue de cette conférence, des recommandations ont été émises en trois volets à savoir la problématique de la bonne gouvernance, les défis du développement économique et le challenge de la coexistence post-génocide.

Pour ce qui est de la problématique de la gouvernance, des stratégies et actions visant l’espace social peuvent être mises en place pour faire face à la culture de l’autocensure au niveau des familles, des écoles, des obédiences religieuses et des partis politiques en vue d’encourager les citoyens à participer aux débats afin de promouvoir la pensée critique.

Dans le même ordre d’idée, à travers un débat public, mettre à contribution les citoyens et les acteurs politiques, la société civile et les intellectuels pour interroger la pertinence des politiques, lois et programmes (intégrer ce processus aux imihigo).

Au niveau politique et pour faire face au réflexe de contrôle, les partis doivent contribuer au renforcement de la culture de débat en se prononçant publiquement sur les options politiques prises par les gouvernants pour offrir des alternatives et créer des cercles d’intellectuels au niveau des université, des centres pour la paix ainsi que d’autres espaces politiques en vue de débattre sur que questions spécifiques au point de vue économique, social et politique.

Il peut s’agir également de restaurer le lien entre l’é et l’électeur en renforçant les capacités des organisations paysannes à proximité des citoyens à participer activement au processus de prise de décision pendant les phases de planification, de budgétisation, d’exécution et d’évaluation.

Intégrer dans le dispositif légal l’obligation pour les conseillers de participer dans les réunions du secteur, surtout pendant les phases clés de prise de décision, afin de répercuter les priorités de leurs circonscriptions électorales au niveau du district et créer un lien formel et légal entre les parlementaires et les conseillers de districts.

Lors de l’adoption des lois et les politiques d’intérêt général, les commissions parlementaires devraient prendre l’habitude d’organiser des débats radiodiffusés et des séances avec les citoyens et les services spécialisés dans le domaine faisant l’objet d’étude à travers les « Think Tank » ou « le laboratoire d’idée ».

Quant aux défis du développement économique durable, l’éducation et l’emploi restent préoccupants. Il faudrait concilier la quantité et la qualité dans l’éducation en concevant et en mettant en place des indicateurs efficients de contrôle de qualité au sein de toutes les universités et instituts supérieurs.

Instaurer des écoles d’excellence afin de disposer d’une main d’œuvre qualifiée capable de répondre adéquatement aux besoins du marché et initier des écoles de métier performant capable de former des techniciens dans divers domaines de l’artisanat et qui sont compétitifs au niveau régional.

Et enfin, initier une étude de façon périodique sur le phénomène de chômage et disposer de statistiques fiables non disponibles pour le moment.

Pour ce qui est de l’expropriation, il serait bon de désigner un juge et une chambre spécialisé en la matière et de mettre en place un système permettant à ce que la valeur effective de l’immobilier à exproprier puisse sortir de la négociation entre celui qui est exproprié et celui qui exproprie.

La problématique de la pauvreté demande qu’il y ait un système de suivi de l’effectivité des programmes de lutte contre la pauvreté sur les conditions de vie des populations vulnérables.

S’agissant de la coexistence post-génocide, il serait question d’ouvrir un débat continu visant à concevoir des mécanismes de construction du travers ethnique qui a réussi à s’enraciner dans le quotidien du Rwandais.

Faire du cadre créé par Gacaca, un cadre de dialogue social pour le renforcement des liens sociaux dans l’optique de la paix durable et de proposer des politiques et programmes ayant pour objectif clair la déconstruction du travers ethnique.

Photo : Ces enfants rwandais sont nés après le génocide, ils incarnent l’espoir d’un Rwanda nouveau


Publicité

AJOUTER UN COMMENTAIRE

REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Publicité