
En effet, ce vent de libération a soufflé sur le Rwanda à partir du 1er octobre 1990. Les guerriers du FPR Inkotanyi ont eu droit à l’arrièr- base ugandaise malgré les réticences de la part de Museveni qui jugeait que le départ précipité de ces Rwandais pour un front armé vers Kigali pouvait avoir des conséquences néfastes sur un Uganda alors assiégé par les terribles Alice Lakwena et autres des LRA/Lord Resistance Army qui opéraient alors dans le nord ugandais.
Museveni alors révolutionnaire impose Kagame comme commandant-en-chef de l’APR
La victoire du FPR, quatre ans après, comment a-t-elle été ressentie par l’establishment de Kampala ? Museveni qui a imposé le jeune major Paul Kagame à ses camarades comme leur chef après que les leaders du front dont le Gén. Fred Rwigyema et les Maj. Chris Bunyenyezi et Peter Bayingana soient tués au Front, a cru qu’après la victoire du FPR et la Libération du Rwanda, Paul Kagame, chef des armées Inkotanyi, allait toujours faire allégeance à Kampala. Museveni a cru, qu’à défaut de faire du Rwanda la nième province de l’Uganda, Kagame devait concevoir la gestion sociopolique et économique du Rwanda à partir de Kampala. Et il fut déçu tout au long de ces longues 25 années.
Combien de fois aura-t-il comploté avec les opportunistes rwandais pour écarter par tous les moyens y compris les plus violents du pouvoir le Commandant-en-chef Paul Kagame le rebelle qui a toujours compris que le Rwanda doit bénéficier d’une gestion politique originale et profonde ?
Des risques sérieux de confrontation entre les deux régimes ont failli surgir à plus d’une occasion. Cela a fait ICG/International Crisis Group diligenter une recherche sur le sujet "Uganda and Rwanda : Friends or Enemies" qu’elle a publié le 4 mai 2000.

Rwandais indésirés en Uganda et indésirables au Rwanda : jouer le va-tout
Le rapport de cette recherche commence par les causes lointaines qui ont motivé les jeunes réfugiés rwandais à s’unir en 1981 à l’alors ministre ugandais de la défense, Yoweri Museveni en mal de cohabitation avec son président Milton Oboté qui harcelait publiquement les Rwandais pour ouvrir une lutte de guérilla sous la houlette duNRM/National Resistance Movement.
ICG rapporte combien les combattants rwandais de la première heure dans la guerre de libération de l’Uganda sous le NRM de Museveni, Fred Rwigema, Paul Kagame et les autres ont été, à la fin de la guerre, récompensés par une promotion fulgurante. Fred, général et Kagame, Major de la nouvelle armée ugandaise en 1986, avec en prime, le premier devenant vice ministre de la défense, le second, Chef du Service de Renseignement militaire ugandais.
"Cette promotion de Rwandais doublée de nomination aux hauts postes politiques a fait grincer des dents de la part de leurs anciens camarades de guerilla de souche ugandaise", rapporte ICG montrant que la détermination d’initier un front de guerilla rwandais a été alimenté entre autre par cette grogne des rangs et officiers ugandais mais aussi par le fait que l’alors Président du Rwanda, le Gén. Juvénal Habyarimana (1973-1994) avait décrété qu’il n’y avait aucun espace de libre au pays. N’avait-il pas proposé aux pays voisins du Rwanda abritant des centaines de milliers de réfugiés de les naturaliser ? Cette solution l’arrangeait encore qu’il ne faisait aucune entremise avec les administrations de ces pays-là pour tenter honorablement ce type de solution.

Camarades d’armes et amis
Le rapport ICG montre comment de par ces années passées dans la guérilla ugandaise, les Rwandais avaient tissé une forte camaraderie avec leurs frères ugandais. Fred Rwigyema qui prit la tête de la rébellion rwandaise était ami à Salim Saleh, demi-frère du Président Museveni, lit-on dans le dit rapport qui plus loin cite Kagame ayant tissé une forte amitié avec le Gén. Mugisha Muntu et le Col. Kiizza Besygye.
Le rapport mentionne le fait que le Gén. Salim Saleh hait à mort l’alors Maj. Kagame qui était Chef du Conseil de Discipline militaire du NRA/National Resistance Army et qui a prononcé une série de punitions à l’encotre du général affichant un comportement moins militaire.
Récemment, ce 18 juin 2019, s’adressant aux jeunes cambistes qui venaient de terminer un camp de solidarité ITORERO dans la ville de Kigali, le général Kabarebe, conseiller spécial du Président Paul Kagame en matière de défense et sécurité, lui aussi montre clairement que les jeunes rwandais qui venaient de libérer l’Uganda étaient comme des têtes de turc enUganda après la libération de ce pays-là.
"Nous avons fait la guerre de libération de l’Uganda par la force des choses. Il n’y avait aucune estime ou respect à notre égard. Il arrivait même qu’on nous qualifiait de parias, de Rwandais qui n’avaient de place qu’au Rwanda", a dit Kabarebe disant qu’une révolte intériure a vite peuplé les esprits des combattants rwandais qui, le 1er Octobre 1990, n’ont pas demandé de compte et ont décidé d’envahir le Rwanda trouvant qu’il vaut mieux mourir les armes à la main plutôt que d’être traités de goujats.
Troupes rwandaises et ugandaises désunies avancent vers Kinshasa
Après la guerre de libération du Rwanda en 1994, les troupes de l’APR/Armée Patriotique Rwandaise ont envahi la RDC dans une opération de traque des Interahamwe qui s’étaient alliés au Président Laurent Désiré Kabila pour réattaquer le Rwanda en 1998. Dans cette opération conjointe rwando ugandaise, des échanges mortels de feu sont survenus au niveau de Kisangani entre les troupes rwandaises et ugandaises. Chacune d’elles voulait se rendre maître de la ville stratégique de Kisangani.

Le Gén. Kazini, commandant des troupes ugandaises par qui les tristes echauffourées sont arrivées
Le rapport ICG épingle les troupes ugandaises comme les premières à avoir déclanché ces hostilités. Il relate aussi des attitudes et des mots provocateurs. Le général Kabarebe, alors commandant les troupes rwandaises, était appelé ridiculement "le petit caporal" par les officiers ugandais en poste à Kisangani.
La victoire des troupes rwandaises sur les ugandaises à Kisangani et l’occupation momentanée de cette ville stratégique par les troupes rwandaises a été un échec cuisant dont les Ugandais ne se sont pas remis, lit-on dans le rapport qui dit plus loin que les sentiments de rancune et le désir de vengeance n’ont plus quitté le leadership de Kampala depuis lors.
"L’alors Col. Patrick Nyamvumba, maintenant général, qui dirigeait les troupes rwandaises en route pour Kinshasa avait suggéré un commandement unifié avec les troupes ugandaises (UPDF-RPA). La partie ugandaise n’a pas voulu l’entendre", dit le rapport montrant que les malheureux échanges de feu étaient ainsi prévisibles.
Selon ledit rapport, les obsèques de milliers de soldats ugandais fauchés par les balles rwandaises à Kisangani, ont marqué les esprits et les sentiments rancuniers ont été exprimés au point qu’il a été initié un forum d’anciens officiers démobilisés et ceux qui été ncore en service pour concevoir de possibles scénarios d’actions de vengeance sur le Rwanda.
"Des hauts gradés militaires de l’UPDF déclarent que plus jamais des relations rwando ugandaises ne seront au beau fixe comme elles étaient avant la guerre de Kisangani", lit-on dans le rapport.

Pogrom de Kisangani crée un triste antécédant dans les relations rwando ugandaises
Le rapport semble montrer qu’essentiellement les actuelles relations rwando ugandaises froides résultent de ce passé qui a diminué sensiblement le niveau de confiance mutuelle entre les deux leaders Museveni et Kagame au point que le premier a toujours tenté de créer et de soutenir des dissidents au sein de APR (Armée Patriotique Rwandaise) devenue RDF (Forces Rwandaises de Défense).
Ne sont-ce ces dissidents, dont le général Kayumba Nyamwasa, qui ont créé plus tard le RNC/Rwanda National Congress que Museveni actuellement soutient du tout au tout avec un appui logistique certain et toute possibilité de formation d’un camp d’entraînement de jeunes rwandais pour, pense-t-il, chasser du pouvoir au Rwanda de Kagame qui fut son chef du service de renseignement ?
Se départir des sentiments haineux, régner raison et rationalité
Mais au fait, comment et par qui Museveni peut revenir à la raison et comprendre que la nuisance envers son neveu du Sud-Ouest ne peut qu’avoir des répercussions qui sont tout sauf bonnes sur l’échiquier politique de la Communauté de l’Afrique de l’Est ?
Qui perd, qui gagne ?
Le rapport ICG conseille aux bélligérants de déposer la hache de la guerre. Mais comme tous les rapports internationaux, celui-ci est poli. Il ne montre pas que le Rwanda n’a aucun intérêt à s’immiscer dans les affaires ugandaises autant que l’Uganda le fait en complottant avec les Interahamwe des FDLR/Forces Démocratiques de Libération du Rwanda ou avec les RNC.
Pour ce faire, le Rwanda trouve-t-il qu’en permettant aux citoyens rwandais de continuer à faire leurs affaires en Uganda ils sont arrêtés et enrôlés de force dans les trainings wings de RNC, que partant il interdit tout mouvement de RRwandais en Uganda ? Pourquoi Museveni pense-t-il qu’un tel agissement ne peut pas se faire de la part de la partie rwandaise ?
Je crains qu’à l’heure actuelle, les calculs stratégiques sont étudiés dans les Etats-majors politiques des deux pays pour savoir en cas de guerre entre les deux, à qui profiterait-elle ?. Une retenue est nécessaire. L’heure n’est plus aux va-t-en-guerre.
Mais que fait la société civile des deux pays ?
N’est-il temps qu’elle s’y mette et dénonce cette tendance guerroyeuse de Kampala ?
A l’heure actuelle, est-il possible à Kampala qui a investi à fond dans l’encadrement de RNC pour qu’il soit à même de déstabiliser le Rwanda ?
L’Union Africaine est-elle toujours impuissante comme dans le temps ? Peut-elle jouer la médiation et ordonner à Kampala de cesser tout soutien au RNC et de relocaliser ses ténors dans de pays lointains ? Seul le pragmatisme pourra avoir le dessus des sentiments à fleur de peau nourris par le vieux guérilleros Museveni.
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