La Cour Européenne des droits de l’homme saisie sur les Archives Mitterrand de l’Epoque du Génocide

Redigé par Marie-France Cros
Le 14 décembre 2017 à 07:55

Un chercheur français va déposer un recours ce 14 décembre devant la Cour européenne des droits de l’homme pour obtenir l’ouverture des archives Mitterrand datant de l’époque de l’intervention militaire française au Rwanda et du génocide de 1994.

François Graner, qui a écrit plusieurs livres sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994, ainsi que l’association dont il est membre, Survie, qui milite pour une refonte de la politique de la France en Afrique, ont annoncé qu’ils déposeraient ce jeudi 14 décembre un recours devant la Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour « contester la réglementation française qui permet à la mandataire de l’ancien président François Mitterrand, de refuser l’accès à des archives pourtant déclassifiées ».

Le droit de demander des comptes

Le 7 avril 2015, la Présidence française – alors occupée par le socialiste François Hollande – avait annoncé la déclassification de ses archives sur le Rwanda pour la période 1990-1995, à l’occasion du vingt-et-unième anniversaire du déclenchement du génocide des Tutsis au Rwanda (un million de morts), le 7 avril 1994. Mais la mandataire privée de François Mitterrand, Dominique Bertinotti, refuse de communiquer à François Graner les documents qu’il demande à consulter.

Ce dernier a introduit un recours en constitutionnalité du Code du patrimoine, qui permet à la mandataire de décider qui peut ou non consulter des archives d’anciens chefs d’Etat pendant les 25 années qui suivent leur décès (Mitterrand est mort en janvier 1996) et, cela, sans recours possible. M. Graner estime que cela « privilégie le secret des gouvernants au détriment des droits des gouvernés » et avait demandé au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la constitutionnalité de l’impossibilité de faire appel des décisions de l’Institut François Mitterrand administré par Mme Bertinotti et de dire si l’accès aux archives de gouvernement « fait ou non partie du droit de demander aux agents publics des comptes de leur action », droit « garanti par la Déclaration des droits de l’homme et donc par la Constitution ».

« Protéger un crime d’Etat »

Le Conseil constitutionnel français a décidé, le 15 septembre dernier, que les dispositions incriminées du Code du patrimoine étaient « justifiées par un motif d’intérêt général » et « ne portent pas atteinte à l’exercice de la liberté d’expression et de communication ».

Estimant que la décision de la justice française était « une forme de raison d’Etat visant ni plus ni moins à protéger un crime d’Etat » et ayant « épuisé tous les recours en France », M. Graner et Survie ont décidé de saisir la Cour européenne des Droits de l’Homme.

Dans un communiqué publié mercredi, ils font valoir que la décision du Conseil constitutionnel a été prise alors qu’un de ses membres, Michel Charasse, est vice-président de l’Institut Mitterrand mis en cause. Le président de cette fondation privée est Hubert Vedrine, qui était secrétaire général de la Présidence de la République de 1991 à 1995 et a été mis en cause lui-même pour son rôle présumé dans le génocide des Tutsis – rôle qu’il dément. Survie souligne que M. Vedrine « s’obstine à refuser tout débat transparent sur le rôle des autorités politiques et militaires françaises vis-à-vis du camp génocidaire ». « Tous les gardiens de la Mitterrandie maintiennent une chape de plomb sur la complicité française dans le génocide des Tutsis du Rwanda », ajoute Survie.


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