Les États-Unis seraient prêts à recommencer en Syrie l’erreur qui les a conduits à soutenir, en Afghanistan, les plus extrêmes des djihadistes quand ils combattaient les Soviétiques.
L’histoire va-t-elle une fois de plus balbutier et l’Amérique d’Obama reproduire la tragique méprise de Jimmy Carter puis de Ronald Reagan ? Dès l’invasion soviétique de l’Afghanistan, le président démocrate Carter, furieux de ce qu’il considérait comme une tromperie de Brejnev qui relançait la guerre froide, avait décidé, faute de pouvoir intervenir directement, au risque d’une confrontation nucléaire, de faire parvenir une aide massive en argent, en armes et en matériel à la résistance afghane aux envahisseurs.
Mais plutôt que de favoriser les légitimistes du Roi Zahir Shah, un peu moins fossilisés que les islamistes, la CIA, par l’intermédiaire de l’ISI, les services secrets pakistanais, avait misé sur les groupes djihadistes d’Hekmatyar et plus tard d’Oussama Ben Laden.
Ils étaient certes les plus efficaces sur le terrain, mais combattaient pour une idéologie totalement étrangère aux valeurs occidentales. L’appui américain a été décisif puisque l’Armée rouge, harcelée par la guérilla, comme l’ont été ces dernières années les troupes de l’Otan, et moins soutenue depuis l’arrivée de la "glasnost" et de Gorbatchev, a fini par abandonner piteusement le terrain.
"L’éventualité d’un dialogue"
Mais c’est un gouvernement taliban fanatique, cruel, obscurantiste, issu des mouvements de résistance que par faiblesse l’Amérique avait aidés qui a fini par prendre le pouvoir. Une mouvance tellement hostile au "Grand Satan" qu’elle a abrité et entraîné ceux qui ont préparé le 11 Septembre, le Pearl Harbor de la lutte contre le terrorisme.
Et voilà que trente ans après Carter, Obama n’exclut pas d’apporter une aide massive, qu’il espère décisive, aux djihadistes fanatisés qui combattent Bachar el-Assad en Syrie.
" Nous n’excluons plus l’éventualité d’un dialogue avec le Front islamique", a précisé lundi Marie Harf, porte-parole du département d’État. Comme d’habitude, le raisonnement américain est froid et réaliste : Après la création, à la mi-novembre, du Front islamique, qui fédère tous les groupes confessionnels des modérés aux plus extrémistes et doit réunir sous son commandement de 45 000 à 60 000 hommes, ce sont eux qui détiennent le dernier espoir de déloger par les armes Bachar el-Assad.
Fabius "pas très optimiste"
Et si ce n’est pas le cas, car la dynamique est plutôt du côté du pouvoir syrien qui accumule les succès militaires, soutenir ceux qui donnent encore du fil à retordre à l’armée régulière permettrait aux Américains de se présenter en position plus favorable à la négociation de Genève sur la Syrie prévue le 22 janvier. "Après tout, dit la même porte-parole américaine, le Front islamique ne figure pas dans la liste des organisations terroristes."
Ce qui est faire preuve d’une belle hypocrisie quand on se souvient que certains des groupes qui se sont unifiés se réfèrent ouvertement à al-Qaida. Mais nécessité fait loi : le 8 décembre, le quartier général de l’Armée de libération syrienne sur laquelle s’appuyaient les Occidentaux a été pris par les islamistes, qui du même coup ont mis la main sur ce que les Américains et les Britanniques notamment avaient livré comme matériel à la résistance.
Manifestement, le temps n’est plus où le général Salim Idriss, le commandant de l’ALS modérée, méritait d’être ménagé car considéré comme "notre homme dans la rébellion". Après l’Afghanistan et l’Irak, c’est avec les barbus qu’il va maintenant falloir traiter en Syrie.
"Je ne suis pas très optimiste sur le sort de l’opposition modérée que nous soutenons", a déclaré hier Laurent Fabius. Qu’en termes diplomatiques ces choses-là sont dites.
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