Migration : hypocrisie et contradictions

Redigé par Le Soir.be
Le 3 août 2015 à 11:47

Les à-coups des politiques migratoires mettent au jour les contradictions internes des Etats membres. La crise des migrations dans l’Union européenne fait penser à la mécanique des fluides – sauf qu’il s’agit de vies et parfois de morts humaines – où chaque fois qu’on cherche à traiter un afflux local en « pinçant le tuyau », une nouvelle boursouflure apparaît ailleurs.
Un chavirage plus spectaculaire que d’autres à Lampedusa a déclenché l’élaboration d’une première vraie tentative européenne de politique (...)

Les à-coups des politiques migratoires mettent au jour les contradictions internes des Etats membres. La crise des migrations dans l’Union européenne fait penser à la mécanique des fluides – sauf qu’il s’agit de vies et parfois de morts humaines – où chaque fois qu’on cherche à traiter un afflux local en « pinçant le tuyau », une nouvelle boursouflure apparaît ailleurs.

Un chavirage plus spectaculaire que d’autres à Lampedusa a déclenché l’élaboration d’une première vraie tentative européenne de politique migratoire, mais qui s’est partiellement enlisée dans le débat sur la répartition de réfugiés par quotas.

La décision hongroise d’ériger un mur pour bloquer l’afflux de migrants remontant de Grèce vers l’UE via la Serbie, a suscité l’opprobre contre un gouvernement qui a mauvaise presse, mais aucun pays ne s’est empressé de proposer son aide à Budapest, et surtout pas les Etats membres d’Europe centrale ou orientale réticents à accueillir des non-Européens. Et maintenant à nouveau Calais...

Les à-coups des politiques migratoires mettent au jour les contradictions internes des Etats membres.

Si tant de migrants sont prêts à défier les barrières naturelles ou artificielles pour rejoindre le Royaume-Uni, c’est parce que ce pays qui s’enorgueillit de ne pas avoir de carte d’identité, fait travailler plus ou moins légalement des migrants qui ne le sont pas, mais qui constituent le nouveau prolétariat indispensable à l’économie britannique.

La contradiction : Londres refuse toute harmonisation sociale européenne qui contribuerait à éradiquer cette exploitation, mais prétend combattre une immigration honnie des anciennes classes populaires, désormais supplantées par les nouveaux exploités.

Si le Royaume-Uni et la France doivent se coltiner une énième crise de réfugiés à Calais, c’est notamment parce que ces deux pays ont mené (sous Sarkozy et Cameron) une entreprise de renversement du dictateur Kadhafi, après laquelle la Libye a été totalement abandonnée à son sort.

Résultat : un pays déchiré entre milices et qui sert de plaque tournante aux trafiquants et passeurs méditerranéens vers l’Italie. Et où, sans gouvernement avec lequel traiter, il sera presque impossible de mener l’opération militaire européenne de « destruction du business model des trafiquants ».

La crise migratoire actuelle n’est pas que l’effet exogène de crises africaines ou moyen-orientales. Elle est aussi le résultat d’actions ou inaction purement européennes, camouflées sous une épaisse couche d’hypocrisie.


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