Comme la Journaliste belge Collette Braeckman s’interroge dans la préface de ce livre phenomenal ; pourquoi ce qui caractérise le destin gaullien et lui donne une place si particulière dans ce que l’on appelle " Le Roman National " ne pourrait-il pas être transposable en Afrique et singulièrement au Rwanda ?
Lors d’un entretien entre notre journaliste Philbert Girinema et l’écrivain Philippe Lardinois ; nous découvrons la journée de celui-ci lors de l’écriture de ce livre que l’on peut trouver dans la librairie Ikirezi ; nous découvrons les actes, attitudes, convictions, visions politiques, pourtant si similaires de De Gaulle et Kagame.
Pouvez-vous nous dire ce qui vous a inspiré à écrire le livre “Paul Kagame, un de Gaulle Africain” ?
L’idée d’écrire ce livre m’est venue il y a cinq ans en lisant des livres sur le général de Gaulle. Ce qui m’a alors frappé chez de Gaulle, c’est, d’une part, le refus du renoncement dans des circonstances extrêmes, il faut se rappeler l’ampleur de la défaite de l’armée française en juin 1940, et d’autre part, son attachement fondamental à la grandeur de la France. Ce sont les deux principes fondamentaux qui ont dirigé la conduite et l’action du Général.
Ces deux principes fondamentaux se retrouvent chez Paul Kagame, la grandeur de la France étant bien entendu remplacée par la dignité du peuple rwandais.
J’ajouterai que les deux hommes partagent le même souci de l’efficacité et de l’efficience. De Gaulle voulait « Que ça marche ! ». Le résultat était essentiel à ses yeux. Je crois que pour Kagame également, il faut que cela marche. Les objectifs doivent être atteints et s’ils ne le sont pas il faut corriger le tir.
Combien de temps cela vous a pris pour écrire ce livre ?
Cela m’a pris trois ans, étant entendu que je ne travaillais pas à plein temps sur ce projet.
Au départ, je n’étais pas du tout certain que cela aboutirait. J’ai commencé à écrire et au fur et à mesure que je progressais j’ai réalisé que mon intuition initiale avait du sens.
Pour la petite histoire, avant de me lancer dans la rédaction de ce livre, j’en avais parlé à un ami rwandais qui a vécu longtemps en Belgique. Il m’a dit qu’il avait eu la même intuition. Il m’a donc encouragé à poursuivre et il a été mon premier lecteur.
Quels sont les points communs entre les deux hommes ? Est-ce la discipline militaire ou une vision pour la destinée de leur nation respective ?
Il est évident qu’ils ont en commun la discipline militaire et une vision pour la destinée de leur nation respective.
Ce sont aussi deux hommes de caractère, au sens gaullien du terme, animés d’une détermination et d’une volonté sans faille. Ils ne renoncent pas. Dans les circonstances très difficiles, ils ne tremblent pas, ils font face aux événements. C’est particulièrement frappant chez de Gaulle dont le destin historique, à deux reprises, s’est bâti de la sorte. Alors que les dirigeants politiques, militaires etc. sont dépassés, il surnage et donne le bon cap. C’est ce qui s’est passé en juin 1940 et lors de son retour au pouvoir en 1958 en pleine crise algérienne.
Peut-on comparer les circonstances qui ont conduit ces deux hommes d’Etat au pouvoir ainsi que leur leadership, malgré les décennies qui les séparent ?
Oui, dans la mesure où tous les deux sont certes des hommes d’Etat, mais ils sont plus que cela, ce sont des grands hommes.
Initialement, leur ambition n’est pas de devenir des hommes d’Etat. Tous les deux sont d’abord des militaires.
Ce sont les événements qui vont modifier leur destinée parce qu’ils vont avoir la bonne attitude dans des circonstances très difficiles. Ils auront le courage de faire les choix et de prendre les décisions qui s’imposent mais qui effraient les autres et ce au péril de leur vie. C’est pour cela qu’ils atteignent le sommet et deviennent des grands hommes. C’est très rare.
De Gaulle est considéré, à juste titre, comme le plus illustre des Français. Qui peut rivaliser avec lui dans l’histoire de France ? Ils ne sont pas très nombreux.
Je pense que l’on peut dire la même chose de Paul Kagame nonobstant les critiques de ses détracteurs acharnés. Vous savez, de Gaulle a été qualifié très sérieusemement de dictateur par François Mitterrand. Cela paraît tellement risible aujourd’hui.
Comment évaluez-vous les chances de Paul Kagame d’aboutir dans son ambition pour l’avènement d’une Afrique autonome, forte et digne ?
C’est une question très difficile car il y a tellement d’aléas. Etre Président de l’Union Africaine, ce n’est pas la même chose que d’être Président du Rwanda. Kagame ne peut pas et ne veut pas se substituer aux dirigeants des autres pays africains. Il explique toujours, à juste titre, qu’il ne lui appartient pas de leur dire comment faire, mais il peut leur dire que le nouveau Rwanda est la preuve que c’est possible pour autant qu’on en ait la volonté et la persévérance. Il n’y a pas de fatalité pour l’Afrique, j’en suis convaincu, mais les dirigeants doivent d’abord songer au développement de leur pays et être exemplaires. Cela vaut également pour les dirigeants occidentaux. Sur cette question, de Gaulle était intraitable tant pour lui-même que pour ses ministres.
A propos de ces deux hommes d’Etat et des principes fondamentaux qui les guident, vous avez écrit « que le respect et la dignité n’étaient pas négociables », pourriez-vous préciser cela ?
Le respect d’une Nation et la dignité d’un peuple sont des principes sur lesquels on ne peut jamais céder. Le 18 juin 1940, de Gaulle lance son célèbre appel à continuer le combat précisément parce qu’il refuse l’asservissement de la Nation française. Revenu au pouvoir en 1958, il sera particulièrement attentif et attaché au respect de la France au niveau international.
Paul Kagame est également intransigeant sur ces principes et il rappelle à chaque rwandais qu’il ne doit jamais se laisser rabaisser. D’où l’importance d’accéder à l’autonomie économique et de ne plus dépendre de l’aide financière extérieure.
Cette exigence du respect et cette affirmation de la dignité sont essentielles pour les peuples qui ont subi la colonisation caractérisée par le fait que les grands principes démocratiques, et tout particulièrement celui de l’égale dignité des êtres humains, étaient foulés aux pieds par ceux-là même qui s’en revendiquaient.
Aujourd’hui, cela consiste pour ces Nations devenues indépendantes à refuser que les anciennes puissances coloniales s’arrogent le droit de leur délivrer, directement ou indirectement, des satisfecit de bonne gouvernance, de bonne évolution démocratique etc. Le temps du néo-colonialisme est révolu.
En tant qu’auteur de ce livre, comment percevez-vous l’opposition politique actuelle à l’encontre de Paul Kagame et particulièrement au sein de la Diaspora ?
Tout d’abord, je tiens à préciser que le bon fonctionnement démocratique requiert le pluralisme politique et par la force des choses l’existence d’une opposition. A cet égard, les choses peuvent s’améliorer au Rwanda.
Cela dit, l’opposition doit être crédible et constructive. L’opposition par principe ou par rancœur c’est stupide et sans intérêt. L’opposition doit avoir comme objectifs le développement du pays, le bien-être économique et social de ses habitants, la stabilité et la sécurité. Elle doit dès lors expliquer comment elle pourrait faire mieux que le pouvoir en place.
Je n’ai pas le sentiment que ce soit véritablement la préoccupation essentielle du courant d’opposition au sein de la Diaspora. Son seul discours consiste à vilipender Paul Kagame sans aucune prise en considération des réussites de sa politique de reconstruction. Pour le reste, elle est démagogique et pour partie revancharde. Je crains que si cette opposition devait parvenir au pouvoir, le pays régresserait considérablement à tout point de vue.
Les relations entre la France et le Rwanda sont tendues depuis 1994. Selon vous, en tant qu’intellectuel, quelles sont les concessions que chacun des deux Etats devraient faire pour sortir de l’impasse.
Il faut avant tout que la France, en tant qu’Etat, fasse son mea culpa et reconnaisse ses erreurs et ses errements. De toute manière, tôt ou tard, les documents classés secret défense parleront. On peut espérer que le Président Macron sera à la hauteur à cet égard.
Du côté rwandais, je vois pas quelles concessions il y aurait à faire.


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