Editorial du Monde.
Si l’adolescence est cet âge au cours duquel on se construit en s’opposant, alors le monde doit compter avec un "ado" attardé en la personne de Kim Jong-un, âgé d’une trentaine d’années, plus jeune chef d’Etat de la planète et "Leader suprême" de la Corée du Nord.

Le leader nord-coréen Kim Jong-Un fin mars 2013. | AFP/KCNA VIA KNS
Le problème est que cet adolescent prolongé, qui arbore volontiers une riche panoplie de déguisements, se livre à ses provocations identitaires le doigt sur le bouton du nucléaire. D’où la phase de tension que la région Asie- Pacifique a connue ces dernières semaines, et qui risque de se reproduire si personne n’arrive à engager une négociation sérieuse avec le jeune homme.
Le dernier des psychodrames nord-coréens est connu. Vraisemblablement pour des raisons à la fois intérieures – s’imposer à ses généraux – et extérieures – s’imposer à la Chine comme aux Etats-Unis –, Kim procède en février à un essai nucléaire. C’est le troisième dans la longue quête du régime pour se doter de l’arme atomique.
La Corée du Nord a déjà montré qu’elle maîtrisait parfaitement la technologie des missiles balistiques. Il ne lui reste plus qu’une étape avant de disposer d’un engin nucléaire opérationnel : la miniaturisation de l’ogive. Une affaire de mois, d’années ?
Pour rassurer leurs alliés de la région, les Etats-Unis répliquent : début de déploiement d’un bouclier antimissiles, gesticulations aériennes et manoeuvres communes avec la Corée du Sud. Réponse du berger à la bergère : Kim éructe en menaces béllicistes diverses et se dit prêt à une attaque nucléaire contre les bases américaines dans la région.
L’épisode est suivi la semaine dernière de propos apaisants de Washington, qui propose à nouveau une négociation sur le programme nucléaire nord-coréen.
Comme le décrypte aujourd’hui le dossier de notre supplément "Géo & politique", la stratégie de Pyongyang est plus "rationnelle" qu’on ne l’imagine. Le régime – épouvantable dictature dirigée par la dynastie des Kim depuis plus d’un demi-siècle – entend assurer sa pérennité en négociant en position de force grâce à son seul atout : la possession de l’arme nucléaire.
Il exaspère la Chine, qui soutient à bout de bras l’économie nord-coréenne. Mais Pékin redoute qu’un effondrement de ce pays exsangue ne conduise à une réunification de facto de la péninsule coréenne. Le mouvement se ferait sous l’égide de la puissante Corée du Sud, où sont stationnées des forces américaines – lesquelles se retrouveraient alors aux portes de la Chine.
Les Etats-Unis, seuls ou dans le cadre d’un forum plus large, s’efforcent depuis des années de négocier le désarmement nucléaire de la Corée du Nord, offrant nombre de contreparties énergétiques à Pyongyang. C’est aussi le souhait de Séoul, qui, depuis la fin des années 1990, a peu ou prou maintenu une politique de la main tendue à l’adresse de son irascible voisin.
En vain. Régime paranoïaque, la Corée du Nord craint pour sa sécurité. Ultranationaliste, elle ose à peine s’entrouvrir sur l’extérieur, pour le malheur d’une population maintenue dans la misère. Elle poursuit sa course au nucléaire militaire. La situation présente lui convient. Sa stratégie est gagnante : elle tient en respect et la Chine et les Etats-Unis. Pour combien de temps encore ?
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