Quatre mille hommes constituant une force d’interposition africaine, déployée à la frontière du Congo et des pays voisins (Rwanda et Ouganda) accusés de soutenir la rébellion du M23 : voilà la dernière invention en date pour régler la situation de crise aiguë dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).
La SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), le grand ensemble de quinze pays dont le Congo fait partie, ont décidé dimanche l’envoi dans l’est congolais de cette force, qui pourrait même être associée aux casques bleus des Nations unies (4700 hommes au Nord Kivu, la région concernée) pour constituer une « force neutre » qui ferait de l’interposition, de la patrouille, toutes sortes de choses : on ne sait pas très bien en réalité.
Des chiffres ont été avancés. La Tanzanie pourrait contribuer à cette « force neutre » à hauteur de mille hommes, par exemple. Mais entre la rédaction d’un communiqué lors d’un sommet (celui-ci s’est tenu à Dar es Salaam, en Tanzanie en présence du président congolais, Joseph Kabila), et les déploiements de troupes sur le terrain, il y a une distance. Cela ne coûte rien de promettre, surtout quand les questions qui fâchent ne sont pas abordées : qui paiera, qui assurera la logistique, etc…
Ce n’est pas parce qu’on a éludé son coût que cette décision est pour autant un geste gratuit. Au sein de la SADC, le président Kabila peut compter la plupart des pays qui le soutiennent : l’Afrique du Sud (quoique avec beaucoup de précautions, et aucune intention d’engager des hommes sur le terrain) ; l’Angola (qui a des litiges avec le pouvoir congolais, mais préfère un Joseph Kabila docile à un remplaçant susceptible ne cesser de faire le jeu de Luanda, notamment sur des questions pétrolières cruciales) ; ou encore la Tanzanie et le Zimbabwe, jamais en retard pour contrer l’influence du Rwanda et de l’Ouganda, les « parrains » désormais discrets du M23. Mais au bout du compte, cela commence à faire masse.
Car la SADC, ce n’est pas une organisation poids plume en Afrique. Quinze pays et des économies qui comptent, entraînées par l’Afrique du Sud. Politiquement, aussi, la SADC a du répondant, et quelques divisions pour faire valoir ses points de vue. Lors du déclenchement de la seconde guerre du Congo, c’est auprès de ses membres que Laurent-Désiré Kabila, le père de l’actuel chef de l’état, était allé chercher des soutiens pour faire barrage avec hommes et armes à une rébellion (oui, déjà), soutenue par le Rwanda et l’Ouganda.
On avait alors vu se déployer au Congo, pour soutenir Kinshasa, des troupes zimbabwéennes, angolaises, namibiennes. Tout cela avait eu, du reste, un coût élevé pour le pays soutenu, chacun se payant sur la bête dans sa zone d’influence, à commencer par le Zimbabwe. Cette alliance avait failli tourner à la catastrophe lorsqu’en juin 1999 le front de Pweto (porte de la riche région du Katanga, et sous la protection du Zimbabwe), s’était effondré devant les troupes rwandaises.
Le commandant des forces congolaises, à Pweto, n’était autre que Joseph Kabila, qui doit donc connaître le goût de la défaite dans le cadre des guerres régionales et a donc de bonnes raisons d’essayer d’éviter de répliquer cette situation.
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