En cédant aux avances du pouvoir, Martin Fayulu et Adolphe Muzito, jadis figures totems d’une résistance morale, se sont engouffrés dans les arcanes d’un régime dont la seule boussole demeure la distribution clientéliste de strapontins ministériels.
Cette manœuvre d’absorption, habile mais cynique, orchestrée par Félix Tshisekedi, a mis à nu l’effondrement intellectuel et éthique d’une classe politique qui ne s’agrège plus autour d’un projet de société, mais gravite exclusivement autour des dividendes du pouvoir.
Fayulu, réduisant son combat à une quête de portefeuilles, allant jusqu’à proclamer l’existence d’un « camp de la patrie », grossière fiction pour justifier un ralliement, n’a récolté que l’humiliation feutrée d’une promesse trahie.
Muzito, quant à lui, devra ravaler ses ambitions de primature pour se contenter du ministère de l’Aménagement du territoire, dérisoire lot de consolation pour une figure qui se rêvait en chef d’orchestre de la reconstruction nationale. Ainsi se délite, sous nos yeux, ce qui subsistait encore de crédibilité dans l’opposition congolaise, aspirée dans l’orbite d’un régime qui se perpétue non par l’adhésion à une vision, mais par la multiplication des désillusions et le recyclage des renoncements.
Dans le grand bal masqué de la politique congolaise, la scène actuelle relève moins du drame classique que de la farce tragique. Deux figures naguère emblématiques de l’opposition congolaise, Martin Fayulu et Adolphe Muzito, se retrouvent aujourd’hui reléguées au rang de comparses désabusés, piégées dans les rets d’un pouvoir qui, tout en les instrumentalisant, les a réduits à de simples pions sacrifiables dans une stratégie de neutralisation des voix dissidentes.
Instrumentalisation, c’est bien le mot : Félix Tshisekedi, fidèle à une méthode désormais érigée en système de gouvernement, a su exploiter avec un cynisme consommé la détresse psychologique et la précarité financière de ses opposants. Jouant sur leur isolement politique et leur fatigue structurelle, il les a attirés dans une coalition sans âme ni cap, l’"Union sacrée rénovée", en leur faisant miroiter une intégration "digne" au pouvoir. Ils en sont ressortis, non pas grandis, mais symboliquement mutilés.
Martin Fayulu, l’inlassable pourfendeur des fraudes électorales d’hier, a opéré une volte-face stupéfiante en se réclamant soudain du "camp de la patrie", reléguant dans l’ombre ses anciens combats au nom d’une unité nationale de façade. Mais les promesses faites à l’ECiDé n’ont pas résisté à la froide logique de partage clientéliste du pouvoir : seulement deux ministères, là où cinq avaient été exigés. Une rebuffade doublée d’une humiliation.
Quant à Adolphe Muzito, aspirant au poste de Premier ministre, il n’héritera que d’un modeste portefeuille à l’Aménagement du territoire, loin des sphères de décision véritables. Ce lot de consolation frustre ses partisans et précipite des dissensions internes, symptomatiques d’un leadership qui vacille.
Ce jeu de dupes, loin de constituer une exception, révèle en réalité la structure profondément dévoyée du champ politique congolais, où la course effrénée aux postes a remplacé toute forme d’élaboration doctrinale ou programmatique. La nation, réduite à une simple variable d’ajustement dans la répartition des maroquins ministériels, devient l’otage d’alliances éphémères et de marchandages indécents.
Pendant ce temps, les anciens piliers de la majorité, Vital Kamerhe et Jean-Pierre Bemba livrent leur propre bras de fer au sein d’un pouvoir fragmenté. Kamerhe, dans un autoritarisme d’apparence vertueuse, exige que tout ministre issu de son parti UNC soit désigné sous sa seule autorité, menaçant de radiation ceux qui transgresseraient cette règle. De son côté, Bemba érige l’exigence du départ d’Eve Bazaiba en casus belli, se heurtant au refus intransigeant de Tshisekedi, ce qui accentue les tensions internes et laisse augurer de nouvelles secousses au sein de cette architecture gouvernementale déjà fissurée.
Le Front Démocratique Africain (FDA), l’un des rares pôles de constance idéologique dans ce paysage délabré, tire la sonnette d’alarme. Il dénonce une fois de plus le manque pathologique de fiabilité de Tshisekedi, soulignant avec gravité ce que tous savent et que peu osent dire : le président ne respecte jamais les accords politiques. Cette duplicité, désormais chronique, a pour effet de décrédibiliser la parole de l’État et de nourrir une atmosphère de méfiance généralisée, propice aux débauchages de couloir et aux intrigues nocturnes.
Dans cet univers politique dénué d’idéaux, où les hommes n’entrent plus au gouvernement pour défendre un projet collectif mais pour négocier des dividendes personnels, le mot même de "République" semble vidé de sa substance. Ce qui se joue sous nos yeux, c’est la confiscation méthodique de l’intérêt général au profit d’une gouvernance de l’entre-soi, faite de clientélisme, de duplicité et de reniements successifs.
Face à ce naufrage collectif, le FDA réitère une proposition radicale mais salutaire : la mise en place d’une transition politique sans Félix Tshisekedi ni ses affidés, pour restaurer les conditions d’élections réellement crédibles et refonder des institutions à même de représenter la volonté souveraine du peuple congolais.
Car tant que le pouvoir sera perçu comme un butin à se partager plutôt qu’un mandat à servir, la République démocratique du Congo ne pourra aspirer ni à la stabilité, ni à la dignité, ni à la prospérité. Le temps est venu de rompre avec cette tragédie cyclique du pouvoir pour le pouvoir, et d’ouvrir enfin l’horizon à un projet de société véritablement républicain.

AJOUTER UN COMMENTAIRE
REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Ne vous eloignez pas du sujet de discussion; Les insultes,difamations,publicité et ségregations de tous genres ne sont pas tolerées Si vous souhaitez suivre le cours des discussions en cours fournissez une addresse email valide.
Votre commentaire apparaitra apre`s moderation par l'équipe d' IGIHE.com En cas de non respect d'une ou plusieurs des regles d'utilisation si dessus, le commentaire sera supprimer. Merci!