Présenté comme un document de travail devant servir de base aux discussions entre le Gouvernement de la République Démocratique du Congo et l’Alliance Fleuve Congo/M23, ce texte articule une architecture ambitieuse de transition sécuritaire, politique et économique.
Toutefois, derrière l’apparente solennité de ce dispositif, se profilent les écueils déjà constatés dans les processus de Luanda et de Nairobi : à savoir, un déficit manifeste de volonté politique de la part de Kinshasa, plus enclin à prolonger la rhétorique de la guerre qu’à s’engager résolument dans une dynamique de compromis.
Des phases de transition ambitieuses, mais hypothéquées par la défiance
La proposition se déploie selon un schéma triphasé rigoureux. La première étape vise à répondre à l’urgence humanitaire par le retour des déplacés et la création d’une Force spéciale intérimaire incluant d’anciens combattants du M23.
La seconde ambitionne de mettre en place une gouvernance transitoire menant à des élections locales en 2027 et à une neutralisation effective des groupes armés étrangers (FDLR, ADF). Enfin, une troisième étape envisage un Dialogue national inclusif en 2026 et un vaste programme de reconstruction économique et sociale.
Or, si ces dispositions témoignent d’une architecture méthodique, leur faisabilité demeure tributaire de la bonne foi des parties. Or, tout porte à croire que Kinshasa poursuit la même stratégie dilatoire observée dans les cadres de Luanda et de Nairobi : feindre l’adhésion aux mécanismes négociés tout en retardant leur application effective.
Les expériences antérieures ont montré qu’à chaque échéance cessez-le-feu, retrait des troupes, ouverture du dialogue inclusif, le gouvernement congolais a multiplié les arguties pour en différer la mise en œuvre, préférant l’enlisement militaire et diplomatique à une réelle co-gestion de la transition.
Un mécanisme de vérité fragilisé par le refus de responsabilité
L’une des innovations majeures du texte réside dans la création d’un mécanisme de vérité et de réconciliation chargé de documenter les crimes graves et d’assurer une justice réparatrice. Si une telle disposition est susceptible d’apporter les fondements d’une paix durable, elle se heurte au refus structurel de Kinshasa d’assumer une part de responsabilité dans les violences commises par ses propres forces et alliés.
Cette posture, déjà manifeste lors des discussions de Nairobi et de Luanda, réduit considérablement la crédibilité d’un tel mécanisme. En effet, toute entreprise de vérité suppose la reconnaissance réciproque des fautes ; or, le gouvernement congolais persiste à externaliser la totalité de la violence sur les groupes armés étrangers, en particulier les FDLR, évacuant ainsi son rôle dans la dynamique conflictuelle.
Une diplomatie en quête de légitimité, mais privée de sincérité
En définitive, la proposition qatarie apparaît comme une tentative sophistiquée de relancer un processus déjà plusieurs fois avorté. Elle témoigne de la créativité diplomatique de ses parrains mais se heurte à la constante inertie politique de Kinshasa.
Le gouvernement congolais, qui n’a cessé depuis Luanda et Nairobi de dénoncer des « pseudo-accords » tout en les signant du bout des lèvres, semble plus soucieux de capitaliser sur le discours de résistance nationale que d’engager une véritable réconciliation.
Cette nouvelle mouture, si elle devait connaître le même sort que ses devancières, risque de se transformer en un catalogue d’intentions sans portée réelle. Elle révèle ainsi l’un des paradoxes fondamentaux de la crise congolaise : l’abondance de médiations internationales face à la rareté d’une volonté politique interne capable de les traduire en actes.

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