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Le Kurdistan irakien et l’Est de la RDC, des similitudes troublantes

Redigé par Tite Gatabazi
Le 3 septembre 2024 à 04:32

Le Kurdistan irakien et l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) offrent des cas fascinantes sur l’impact des identités ethniques et culturelles dans des régions conflictuelles. Ils présentent des similitudes qui méritent une attention particulière.

Les Kurdes ont réorienté leurs efforts pour faire valoir la question kurde comme un enjeu politique nécessitant des solutions politiques et juridiques, plutôt que de se limiter à une assistance humanitaire occasionnelle, bien qu’essentielle au départ. C’est ce qu’a fait le M23 depuis le début poursuivi par l’AFC/M23.

Ces territoires, chacun marqué par des décennies de persécutions et de luttes pour la reconnaissance de la citoyenneté, démontrent comment les différences dans l’approche politique, juridique et sociale peuvent influencer le développement et la stabilisation de régions autrement turbulentes.

Le statut actuel du Kurdistan-Irak semble constituer un élément d’une nouvelle vague, provoquant une réévaluation des approches en droit international et remettant en question l’ordre international établi concernant le droit à l’autodétermination en dehors du contexte de décolonisation.

Le Kurdistan n’est pas un cas isolé dans sa tentative de gouvernance territoriale et de revendication du droit à l’autodétermination.

Cependant, il est ardu d’aborder le statut de la région du Kurdistan-Irak sans considérer, même succinctement, les fondements juridiques, historiques et contextuels qui ont contribué à, ou même soustrait à, la structure de cette région.

Au Kurdistan irakien, l’histoire des Kurdes est marquée par une lutte pour la reconnaissance et la survie face à des persécutions extrêmes sous le régime de Saddam Hussein, notamment lors des tristement célèbres campagnes d’Anfal dans les années 1980. Ces événements tragiques ont culminé dans des actes de génocide, avec l’utilisation d’armes chimiques et des massacres de masse, exacerbant une conscience identitaire kurde et cristallisant une demande collective pour une gouvernance autonome.

L’intervention internationale après la Guerre du Golfe a abouti à la création d’une zone de sécurité, protégée par les puissances occidentales, qui a permis aux Kurdes de développer une administration autonome de facto.

Cette période a vu l’émergence de structures politiques et juridiques propres, qui ont été consolidées avec la ratification de la constitution irakienne en 2005, accordant au Kurdistan un statut officiel de région fédérée.

Ce statut juridique a non seulement légitimé les institutions kurdes mais a aussi encouragé un développement économique et social remarquable, avec des investissements dans l’éducation, la santé et l’infrastructure, transformant ainsi la région en un havre de relative stabilité et de prospérité dans un Irak autrement tumultueux.

Le statut de facto du Kurdistan irakien fédéré entre 1992 et 2003, définissable comme une entité sui generis, et le statut de jure du Kurdistan irakien depuis 2003, qui est officiellement une région fédérée d’Irak, et qui aspire actuellement à l’établissement d’un État indépendant au sein d’un fédéralisme irakien non visible.

Face à une situation chaotique, les partis politiques, qu’ils soient membres ou non de l’alliance du Front du Kurdistan, ont cherché à gouverner le pays. Ce front est ainsi devenu l’autorité de facto de cette région.

Un État est généralement caractérisé comme une entité comprenant un territoire délimité, une population définie et un ordre politique structuré, tous assujettis à une autorité souveraine. La région du Kurdistan irakien semble remplir ces trois critères essentiels à la constitution d’un État.

Contrastant avec l’expérience kurde, l’Est de la RDC illustre les défis d’une région riche en ressources mais déchirée par des conflits incessants. Cette zone, peuplée par une diversité d’ethnies, dont les tutsi congolais est le théâtre de génocide contre les hema, tutsi et banyamulenge, de guerres civiles.

L’intervention de l’Etat n’est pas pour apaiser les drames mais bien pour les exacerber. La légalisation des wazalendo, l’alliance avec les FDLR, le recrutement des mercenaires, le discours de haine et pire, le refus du dialogue pour analyser les causes profondes des crises et y apporter des solutions consensuelles.

Inconsciemment, Tshisekedi a revêtu le costume de Saddam Hussein dans la persécution, le déni et le refus du dialogue. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, dit un adage.

Les multiples tentatives du M23, puis de l’AFC/M23 d’obtenir une discussion sérieuse avec le gouvernement congolais sont restées vaines. Tshisekedi a invité le M23 a Kinshasa pendant 14 mois sous la houlette de son ministre de l’intérieur Gilbert Kankonde. Il le reconnait à demi-mot. Voilà que les déplacés et quelques réfugiés regagnent leurs foyers dans les zones sous contrôles de l’AFC/M23. C’est un signe.

L’AFC/M23 pourrait etre poussée à établir une entité sui generis pour administrer ces zones et par la nécessité de se protéger contre des violences et des persécutions sans scrupules.

Les accords avec le gouvernement congolais ont été systématiquement violés et l’absence d’une administration stable a laissé la population civile vulnérable aux atrocités, aux déplacements forcés et à une précarité économique et sociale endémique. Les efforts de réconciliation et de reconstruction sont entravés par l’instabilité continue, laissant l’Est de la RDC dans un état de vulnérabilité perpétuelle. L’AFC/M23 devra assumer ses responsabilités dans la protection de la population.

La comparaison entre ces deux régions met en lumière l’importance cruciale d’une gouvernance efficace et d’un cadre socio-économique approprié pour la stabilisation de régions conflictuelles.

Tandis que le Kurdistan irakien a réussi à utiliser son statut autonome pour bâtir une société relativement stable et prospère, l’Est de la RDC reste un exemple poignant de ce que l’absence de de l’Etat et d’administration efficace peut infliger à une population.

Ces cas démontrent que la protection et la promotion des identités culturelles et ethniques, lorsqu’elles sont accompagnées de soutiens politiques et juridiques adéquats, peuvent mener à la paix et au développement.

En revanche, l’ignorance de ces identités et de leurs revendications peut entraîner une escalade des conflits et une souffrance humaine.

Les leçons tirées du Kurdistan et de l’Est de la RDC sont donc essentielles pour informer les politiques internationales et régionales visant à résoudre les conflits et à construire des sociétés durables et inclusives.

Le Kurdistan irakien et l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) offrent des cas fascinantes sur l’impact des identités ethniques et culturelles dans des régions conflictuelles

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