Nombreux sont encore ceux, climato-sceptiques ou indifférents, qui opposent leur inertie à l’urgence climatique, comme si la finitude des ressources et la montée inexorable des désordres atmosphériques relevaient d’un fantasme plutôt que d’un constat scientifique établi.
Dans un récent rapport d’une gravité inédite, l’Organisation météorologique mondiale (OMM), institution spécialisée des Nations unies, alerte sur la probabilité désormais très élevée que le réchauffement global dépasse, entre 2025 et 2029, la fameuse limite de +1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels. Ce seuil critique, fixé dans l’Accord de Paris en 2015 comme l’horizon maximal à ne pas franchir pour éviter un emballement irréversible du système climatique, est donc désormais voué à être franchi, avec des conséquences potentiellement cataclysmiques.
Ce dépassement résulte d’une dynamique obstinée : loin de diminuer, les émissions mondiales de dioxyde de carbone poursuivent leur ascension, alimentées par la combustion massive et continue du charbon, du pétrole et du gaz résidus fossiles d’un passé lointain devenus moteurs d’un présent autodestructeur.
En dépit des déclarations d’intention, des sommets climatiques et des promesses d’atténuation, le monde reste prisonnier d’un modèle énergétique vorace, que ni les alertes scientifiques ni les catastrophes répétées ne parviennent à remettre radicalement en cause.
Le Service météorologique britannique (Met Office), s’appuyant sur les analyses convergentes de dix centres internationaux, confirme que l’humanité a connu, en 2023 et 2024, les deux années les plus chaudes jamais enregistrées, dans le sillage d’une décennie elle-même la plus torride de l’histoire moderne. “Nous venons de traverser les dix années les plus chaudes jamais observées, et malheureusement, le présent rapport ne laisse entrevoir aucun répit”, a résumé avec sobriété Ko Barrett, secrétaire générale adjointe de l’OMM. C’est ainsi que s’écrit désormais le récit climatique : sans sursaut, sans rupture, avec une implacabilité qui confine à la résignation.
La communauté internationale, quant à elle, semble condamnée à échouer dans la réalisation de ses objectifs les plus modestes. Le cap de 1,5°C, désigné naguère comme la ligne rouge à ne pas franchir, paraît aujourd’hui hors d’atteinte. Les climatologues eux-mêmes, autrefois porteurs d’un espoir mesuré, reconnaissent l’improbabilité croissante d’une inversion des tendances, dans un contexte où les engagements demeurent insuffisants, souvent non contraignants, et leur mise en œuvre marquée par de multiples inerties politiques et économiques.
L’Union européenne se veut toutefois l’exception dans ce concert de renoncements. Selon la Commission, les États membres seraient “en bonne voie” pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 54 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, frôlant ainsi l’objectif de 55 % prévu dans le Pacte vert européen. Mais cette performance relative, bien qu’encourageante, demeure isolée dans un monde où les grands émetteurs, Chine, États-Unis, Inde poursuivent leur croissance carbonée.
Pour évaluer le réchauffement à long terme, les climatologues adoptent désormais une approche intégrative, combinant les observations de la décennie passée avec les projections futures. Cette méthode conduit à une estimation centrale de +1,44°C pour la période 2015-2034, une valeur qui recoupe celles d’autres institutions, telles que l’observatoire européen Copernicus (1,39°C).
Toutefois, comme le rappelle Christopher Hewitt, directeur des services climatologiques de l’OMM, “il n’existe pas de consensus définitif” ce qui n’atténue en rien l’urgence, mais témoigne de la complexité des modélisations et de la diversité des scénarios.
Les conséquences de ce dérèglement global s’avèrent déjà multiples et dramatiques : multiplication des événements météorologiques extrêmes, fonte accélérée des calottes polaires, acidification des océans, perturbations des cycles hydrologiques, effondrement de la biodiversité, insécurité alimentaire, déplacements massifs de populations et exacerbation des tensions géopolitiques. Ce qui se dessine, au-delà des courbes et des données, c’est la perspective d’un monde altéré, instable, et potentiellement invivable pour une part croissante de l’humanité.
Ainsi, face à ce désastre annoncé, la question qui s’impose n’est plus tant celle de la prévision que celle de l’action. Le réchauffement climatique n’est plus un phénomène lointain ou hypothétique : il est notre présent et notre avenir immédiat.
Or, à défaut d’un sursaut collectif d’ampleur planétaire, nourri de courage politique, de justice environnementale et de transformation systémique, le XXIe siècle pourrait bien devenir le théâtre d’un effondrement progressif, dans l’indifférence résignée de ceux qui auraient pu agir mais ont préféré attendre.

AJOUTER UN COMMENTAIRE
REGLES D'UTILISATIONS DU FORUM
Ne vous eloignez pas du sujet de discussion; Les insultes,difamations,publicité et ségregations de tous genres ne sont pas tolerées Si vous souhaitez suivre le cours des discussions en cours fournissez une addresse email valide.
Votre commentaire apparaitra apre`s moderation par l'équipe d' IGIHE.com En cas de non respect d'une ou plusieurs des regles d'utilisation si dessus, le commentaire sera supprimer. Merci!