Urgent

Un tournant diplomatique au cœur des Grands Lacs

Redigé par Tite Gatabazi
Le 16 août 2025 à 12:25

Depuis hier, une annonce fait bruisser les réseaux sociaux et secoue les cercles diplomatiques de la région des Grands Lacs : le président kényan William Ruto a nommé Mme Judy Kiarie Nkumiri au poste de consul général à Goma, avec rang d’ambassadrice.

Celle-ci s’apprête à présenter ses lettres de créance au coordonnateur de l’AFC/M23, M. Corneille Nangaa. Un geste qui, au-delà de sa singularité protocolaire, cristallise une mutation géopolitique de grande portée.

La reconnaissance implicite d’un pouvoir de fait

L’installation officielle d’une représentation consulaire kényane dans la capitale de facto qu’est devenue Goma, relève d’un signal diplomatique dont la charge est lourde de sens. Ce n’est plus seulement une question de logistique ou de gestion des intérêts de la diaspora, mais bel et bien une validation de l’existence d’un nouvel acteur politique et militaire au sein de l’Est congolais.

Goma, vitrine d’une nouvelle centralité régionale

La ville de Goma, naguère perçue comme périphérie instable, tend à s’ériger en foyer de centralité politique. Après avoir accueilli les chefs d’états-majors de la SADC et la très controversée représentante onusienne Bintou Keita, c’est désormais une puissance régionale de poids, le Kenya, qui y consacre une implantation officielle. Ce déplacement symbolique de l’axe diplomatique traduit une réalité brute : Goma s’impose comme capitale opérationnelle d’un pouvoir parallèle, que nul ne peut plus feindre d’ignorer.

Une diplomatie de rupture aux répercussions multiples

L’acte du président Ruto ouvre une séquence nouvelle : il fracture l’approche traditionnelle de soutien formel à Kinshasa et esquisse une diplomatie pragmatique, qui épouse le cours réel des rapports de force sur le terrain. Il est à prévoir que cette décision inspirera ou heurtera d’autres capitales régionales, provoquant un effet domino ou, au contraire, un raidissement de l’orthodoxie diplomatique. La République Démocratique du Congo, elle, se retrouve sommée de réagir : soit par la dénonciation vigoureuse de ce qu’elle percevra comme un affront à sa souveraineté, soit par un silence contraint qui, de facto, consacrera sa marginalisation.

Une communication politique à anticiper

Au-delà du jeu des chancelleries, la symbolique de cet acte nourrit déjà les imaginaires collectifs. Les réseaux sociaux, caisse de résonance d’opinions fragmentées, en amplifient la portée. L’événement impose donc une réflexion approfondie sur la communication politique et comment l’AFC/M23 exploitera-t-il cette légitimation implicite pour renforcer son assise tant interne qu’internationale ?

En somme, la nomination de Mme Nkumiri à Goma ne saurait être réduite à une formalité administrative. Elle constitue un jalon décisif dans la recomposition diplomatique des Grands Lacs, révélant la vitesse à laquelle les équilibres politiques peuvent se renverser.

Là où certains verront une audace diplomatique, d’autres n’y liront qu’une dangereuse légitimation d’un pouvoir insurrectionnel. Mais nul ne peut ignorer le fait : l’Histoire, ici, s’écrit à grande vitesse, et Goma en est désormais l’un des théâtres majeurs.

Le président kényan William Ruto a nommé Mme Judy Kiarie Nkumiri consul général à Goma, avec rang d’ambassadrice

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