Le Burundi débute la libération de 2.500 détenus : désengorger ses prisons et libérer les taupes

Redigé par IGIHE
Le 24 janvier 2017 à 01:43

Le Burundi a entamé lundi la libération du quart de sa population carcérale dans le cadre d’une grâce présidentielle, mais la société civile en exil de ce pays en crise craint que le pouvoir ne cherche ainsi à faire de la place pour de nouveaux prisonniers politiques.
Lundi, un premier groupe de 300 prisonniers a été libéré de la prison centrale de Mpimba, à Bujumbura, par la ministre de la Justice Aimée Laurentine Kanyana. A terme, 2.500 prisonniers doivent être libérés par les autorités, qui ont (...)

Le Burundi a entamé lundi la libération du quart de sa population carcérale dans le cadre d’une grâce présidentielle, mais la société civile en exil de ce pays en crise craint que le pouvoir ne cherche ainsi à faire de la place pour de nouveaux prisonniers politiques.

Lundi, un premier groupe de 300 prisonniers a été libéré de la prison centrale de Mpimba, à Bujumbura, par la ministre de la Justice Aimée Laurentine Kanyana. A terme, 2.500 prisonniers doivent être libérés par les autorités, qui ont toujours nié détenir des prisonniers politiques.

« C’est un coup d’apparat. Le régime tient à montrer à la Communauté internationale qu’il amorce une certaine détente. Il tente par là de noyer l’insistance de l’Union Européenne pour une enquête internationale indépendante sur les grosses violations des droits humains commis depuis la répression féroce des manifestations contre le 3ème mandat de Pierre Nkurunziza », a confié à IGIHE, M. Jean Jacques Makungu, un observateur politique burundais.

Ce premier groupe libéré lundi inclut toutefois 58 militants arrêtés lors d’une manifestation interdite et violemment réprimée par la police burundaise le 9 avril 2014. Ils avaient été condamnés à des peines allant jusqu’à la perpétuité lors d’un procès qualifié d’ »expéditif » par la communauté internationale.

Ces libérations visent à « désengorger les prisons pour permettre à ceux qui y restent de vivre dans des conditions acceptables », et à la « consolidation de la réconciliation nationale », a déclaré la ministre Kanyana, au cours d’une cérémonie officielle en présence du corps diplomatique accrédité au Burundi.

« Exceptionnellement, son excellence le président Pierre Nkurunziza a également bien voulu toucher même ceux qui ont été condamnés pour des actes criminels commis lors des mouvements insurrectionnels qui ont été organisés depuis 2014 », a-t-elle ajouté, restant toutefois vague sur l’éventuelle libération de prisonniers arrêtés depuis le début de la crise actuelle, en avril 2015.

Pourtant d’autres observateurs de la scène politique burundaise vont plus loin et, connaissant à fond la barbarie des tenants du pouvoir, ils classent les prisonniers libérés en trois catégories :

« Ce sont, soit, des personnes de vieil âge et donc sans menace qui ne doivent pas inutilement peupler les prisons. Ce sont ensuite des Tutsi qui sont relâchés de peur de les assassiner dans leurs prisons et de les poursuivre et les éliminer dans leurs quartiers. Ce sont ensuite des milliers d’agents secrets qui ont été déployés dans ces prisons pour donner assez d’informations qui n’ont pas été livrés par les criminels lors de leurs procès expéditifs », confie cet analyste politique burundais qui a requis l’anonymat.

Le Burundi est plongé dans une grave crise depuis l’annonce en avril 2015 de la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat controversé et son élection en juillet de la même année. Les violences ont fait plus de 500 morts et poussé plus de 300.000 personnes à quitter le pays.

Selon des sources pénitentiaires, les prisons burundaises abritaient 10.051 prisonniers fin décembre 2016, contre environ 6.000 détenus avant avril 2015.
« A chaque fois que des prisonniers politiques sont relâchés, c’est une bonne chose », a réagi auprès de l’AFP Pierre-Claver Mbonimpa, président de l’Association pour la protection des détenus et des prisonniers politiques (Aprodh), et figure emblématique de la société civile burundaise.

« Mais nous appelons surtout à une relaxe des plus de 4.000 détenus politiques qui croupissent en prison depuis le début de la crise au Burundi », a ajouté M. Mbonimpa, qui vit en exil en Belgique. Cette mesure est aussi destinée à « faire de la place aux victimes des nombreuses arrestations arbitraires à la faveur de la répression qui s’est abattue sur le Burundi », a-t-il accusé.

De son côté, la principale ligue burundaise des droits de l’Homme, Iteka, désormais interdite au Burundi, estime qu’au moins une centaine de personnes accusées de crimes en lien avec la crise politique actuelle sont arrêtées chaque semaine au Burundi, alors que d’autres sont assassinées ou portées disparues.

Avec AFP


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