Selon International Justice Tribune, le magazine indépendant de Radio Nederland sur la justice internationale, les Néerlandais mettent la pression sur la Cour Européenne des Droits de l’homme pour obtenir une autorisation d’extradition vers le Rwanda des suspects du génocide vivant en Europe.
Beaucoup de pays européens refusent d’extrader vers le Rwanda les suspects génocidaires se trouvant sur leurs territoires. La position de ces pays est motivée par les rapports des organisations telles que Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International qui accusent le Rwanda de non respect des droits de l’homme. Ce que les autorités rwandaises rejettent catégoriquement.
Officiellement, le gouvernement néerlandais ne considère pas le système judiciaire rwandais apte à traiter les cas de ces suspects. Les organisations des Droits de l’homme et les experts juridiques néerlandais, interrogés sur la question, critiquent la démarche néerlandaise auprès de la Cour européenne des Droits de l’homme (CEDH) à Strasbourg. Le Rwanda ne dispose pas encore d’un système judiciaire pleinement indépendant, disent-ils.
Les débats à ce sujet ont débuté au moment où les Pays-Bas étaient impliqués dans une affaire en cours d’examen par la CEDH. Les juges de cette juridiction auront à se prononcer sur l’extradition de Sylvère Ahorugeze vers le Rwanda. Ce dernier y est poursuivi pour génocide et crimes contre l’humanité.
Ahorugeze, ancien chef de l’aviation civile rwandaise, est suspecté du meurtre de 28 Tutsi en avril 1994 à Kigali, mais rejette les charges ; il a été arrêté en juillet 2008 à Stockholm. Les autorités suédoises ont par la suite décidé qu’il pouvait être extradé. L’avocat d’Ahorugeze conteste cette décision à la CEDH, qui n’a pas encore rendu sa décision.
Le soutien des Pays-Bas.
Les Pays-Bas soutiennent la position suédoise de l’extradition malgré les critiques qu’ils portent au système judiciaire rwandais et leur position officielle selon laquelle le Rwanda n’est pas prêt pour juger les personnes extradées. L’International Justice Tribune a pu se procurer les écrits de la représentante néerlandaise à la CEDH du 27 juillet 2010. Selon elle, le Rwanda a enregistré « au cours des années un progrès substantiel et fondamental dans l’autorité de la loi ». Depuis le génocide des Tutsi en 1994, le Rwanda a, grâce entre autre au soutien financier néerlandais, construit de nouveaux palais de justice et la prison moderne de Mpanga, tout en formant les juges. L’abolition de la peine de mort et de la détention à vie en isolement rentrent parmi les « réalisations les plus importantes ».
Larissa van den Herik est professeur de Droit public international à l’Université néerlandaise de Leyde. Selon elle, La Haye pense qu’il serait préférable que la CEDH ait écarté au préalable tout obstacle juridique afin d’être prêt à la signature d’un traité d’extradition bilatéral entre les Pays-Bas et le Rwanda.
En outre, madame Van den Herik estime que des intérêts politiques sont en jeu, en ce sens que "les Pays-Bas constituent une force motrice à l’initiative des réformes dans le système judiciaire rwandais. L’approbation de l’extradition par la CEDH signifierait la confirmation de la politique néerlandaise. Il est donc évident que les Pays-Bas disposent d’un programme".
Roelof Haveman, consultant juridique néerlandais, estime que le Rwanda est prêt à traiter des cas d’extradition. Haveman a assisté le gouvernement rwandais dans la mise sur pied d’un institut de formation pour le système judiciaire. Il souligne qu’au mois de juin de cette année, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a transmis l’affaire Jean Uwinkindi à Kigali, une première en la matière.
Les critiques soutiennent que les Pays-Bas ont également encouragé la CEDH l’année passée à autoriser l’extradition, bien avant que le TPIR n’ait transmis le dossier Uwinkindi. "Cependant, à ce moment, il était alors évident que le système judiciaire rwandais allait dans la bonne direction", a affirmé Haveman.
Haveman précise à quel point le Rwanda est conscient d’être sous l’oeil vigilant du monde extérieur dans ce domaine. « Kigali réalise que toute affaire de génocide sera suivie de près et par conséquent doit se dérouler sans bavures. Autrement, les pays européens s’opposeront à d’autres extraditions ». Human Rights Watch, Amnesty International et la CEDH ne partagent pas l’avis de Haveman.
« En théorie, le Rwanda réforme son système judiciaire, mais en pratique ces mesures demeurent encore insuffisantes », affirme Carina Tertsakian de Human Rights Watch.
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