Quel avenir pour le dialogue burundais ?

Redigé par IGIHE
Le 18 janvier 2016 à 10:26

Au Burundi, pas de reprise des discussions inter-burundaises à Arusha le 6 janvier, une date fixée le 28 décembre dernier par la médiation ougandaise à Entebbe, où le pouvoir avait rencontré l’opposition en exil et la société civile. Depuis, plus rien, a expliqué notre journaliste Carol Valade à Juan Gomez dans l’émission Appels sur l’actualité. De son côté, l’Union africaine pourra-t-elle imposer un dialogue – ou des sanctions – d’ici à son prochain sommet fin janvier ? En attendant, l’ONU s’inquiète de (...)

Au Burundi, pas de reprise des discussions inter-burundaises à Arusha le 6 janvier, une date fixée le 28 décembre dernier par la médiation ougandaise à Entebbe, où le pouvoir avait rencontré l’opposition en exil et la société civile. Depuis, plus rien, a expliqué notre journaliste Carol Valade à Juan Gomez dans l’émission Appels sur l’actualité. De son côté, l’Union africaine pourra-t-elle imposer un dialogue – ou des sanctions – d’ici à son prochain sommet fin janvier ? En attendant, l’ONU s’inquiète de l’escalade de la violence et envoie une mission du Conseil de sécurité du 20 au 22 janvier à Bujumbura.

Pourquoi la discussion du 6 janvier à Arusha n’a-t-elle pas eu lieu ?
Il faut dire que la date fixée par la médiation ougandaise, après cette rencontre à Entebbe le 28 décembre dernier, était avant tout symbolique. Il n’y a pas vraiment eu de dialogue. D’ailleurs, immédiatement après, le gouvernement burundais a fait savoir qu’il n’y avait pas, je cite, de consensus sur cette date du 6 : comprenez qu’il n’y participerait pas.

Quel avenir pour le dialogue ?
Officiellement, c’est donc un problème de calendrier, mais officieusement, on sait que Bujumbura « rechigne » à participer à ce dialogue, et ceci pour deux raisons. D’abord, parce que le gouvernement refuse de dialoguer en présence du CNARED, la principale plate-forme de l’opposition en exil. Il accuse ses membres d’avoir participé au coup d’Etat manqué en mai dernier. Ensuite, c’est que pour le gouvernement burundais, le seul dialogue valable, c’est celui qu’il organise lui-même, au Burundi. Il y a une commission qui a été nommée et dont les travaux devraient commencer dans les prochains jours. Mais l’opposition n’y participera pas : d’abord, parce que ses membres craignent pour leur sécurité si ils remettent les pieds au Burundi ; ensuite, parce qu’elle juge cette commission totalement acquise au pouvoir. En fait, selon plusieurs observateurs, il pourrait s’agir d’une stratégie de Bujumbura qui chercherait faire traîner le processus… Pour gagner du temps.

Si c’est vrai, cette stratégie semble fonctionner : il n’y a toujours pas de reprise du dialogue en vue ?

Toujours pas. Et pourtant, tout le monde assure que des tractations sont en cours. Mais sur le terrain, rien de concret : aucune nouvelle date n’a été fixée. La médiation de l’Ouganda est très critiquée pour son manque d’investissement. Mais un pays se fait entendre de plus en plus, la Tanzanie, qui préside actuellement le Conseil de la Communauté de Etats d’Afrique de l’Est. Cela pourrait avoir un impact sur les pourparlers, car ce pays est un traditionnel allié de Bujumbura. Et justement, selon le ministre des Affaires étrangères tanzanien, une nouvelle rencontre ne pourrait avoir lieu qu’après le 15 janvier.

Pourquoi cette date ?

Parce qu’il s’agit de la fin des vacances du gouvernement burundais. Mais même après le 15, il faudra encore discuter des modalités du dialogue, comme le lieu et la composition des délégations…

Et comme vous le disiez, c’est un point de désaccord total pour Bujumbura. Cela nous mène à fin janvier et au prochain sommet de l’Union africaine. Que peut faire l’instance panafricaine ?

Le Conseil paix et sécurité avait pris une position très ferme le 18 décembre dernier. Le CSP avait décidé le déploiement d’une Mission africaine de prévention et de protection au Burundi, le Maprobu. Imposer le dialogue, c’était un des objectifs du Conseil, qui avait donné 96 heures à Bujumbura pour l’accepter. Mais les autorités n’ont pas attendu l’expiration de ce délai pour s’y opposer. Le président avait même annoncé que le pays combattrait ces soldats s’ils venaient à franchir ses frontières ! Depuis ce refus, l’UA est restée sans voix en quelque sorte : aucune nouvelle décision n’a été prise par le Conseil paix et sécurité. Son commissaire, Smaïl Chergui, a simplement déclaré que le dernier mot reviendrait à l’UA.

Une intervention est-elle toujours possible ?

L’Union africaine peut théoriquement intervenir dans un Etat membre sans son accord, en cas de circonstances graves, comme des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité. C’est ce que prévoit l’article 4H de son acte constitutif. Mais une telle intervention doit être validée par la majorité des deux-tiers à la Conférence. Pas certain que la majorité des chefs d’Etat ait envie de créer un tel précédent, surtout quand on sait que nombre d’entre eux sont également accusés de vouloir s’accrocher au pouvoir.

Le principal obstacle est donc politique…

Oui, mais il y a d’autres obstacles, plus techniques. Pour intervenir, il faut des troupes, et pour l’instant aucun Etat ne s’est porté volontaire pour contribuer à cette mission. Ensuite, il faut des fonds, ce dont l’UA manque cruellement. L’ONU pourrait décider d’aider au financement de la mission, voire de déployer elle-même des troupes en puisant dans les contingents de la Monusco, la force onusienne en RDC. C’est en tout cas ce que préconise une note confidentielle révélée le 10 janvier par le magazine international Vice news. La décision sera sans doute discutée avant la fin du mois, car une mission du Conseil de sécurité de l’ONU dirigée par la France, les Etats-Unis et l’Angola va se rendre au Burundi du 20 au 22 janvier.

Avec RFI


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