Rwanda : très fort engouement pour la circoncision

Redigé par Alphonse Safari Byuma
Le 1er juin 2013 à 09:29

La circoncision est devenue à la mode au Rwanda surtout chez les jeunes qui veulent limiter les risques d’infection au VIH et faire comme leurs voisins. La demande dépasse largement les capacités d’intervention gratuite du ministère de la Santé. Mais tous les hommes ne sont pas conscients que se faire opérer ne suffit pas à éviter la contamination.
"Nous sommes toujours aux aguets, à l’écoute de la radio et des communiqués du secteur administratif de Rilima sur la prochaine séance promotionnelle de (...)

La circoncision est devenue à la mode au Rwanda surtout chez les jeunes qui veulent limiter les risques d’infection au VIH et faire comme leurs voisins. La demande dépasse largement les capacités d’intervention gratuite du ministère de la Santé. Mais tous les hommes ne sont pas conscients que se faire opérer ne suffit pas à éviter la contamination.

"Nous sommes toujours aux aguets, à l’écoute de la radio et des communiqués du secteur administratif de Rilima sur la prochaine séance promotionnelle de circoncision. Les élèves sont déterminés plus que jamais à se faire circoncire", atteste Kamanzi, jeune élève du Groupe Scolaire de Rilima à Bugesera à l’est du Rwanda. "L’opération est gratuite. Le ministère de la Santé (MINISANTE) envoie du personnel qualifié dans les provinces. Chaque entité administrative à son tour. Mais les demandes restent trop fortes et par conséquent, non servies. Certains jeunes et adultes vont dans les provinces voisines", atteste François Mutijima, un élève qui avait sollicité, au mois de janvier dernier, le centre de santé de Kabutare, province du Sud pour se faire opérer.

Réduire mais non supprimer l’infection au VIH

Cette forte demande est due à la grande campagne de prévention contre les maladies sexuellement transmissibles dont le VIH/Sida lancée par le gouvernement rwandais en 2010. Selon le Secrétaire exécutif du secteur Rilima, Gaspard Gasirabo, les agents du MINISANTE viennent, le plus souvent, jeudi, jour du marché de Rilima mobiliser les jeunes et adultes mâles à faire cette opération sans danger qui aurait de nombreux avantages. Il s’agit simplement de couper le prépuce, un repli de la peau qui recouvre une partie de l’organe génital des hommes.

En effet, selon des études effectuées par OMS et ONUSIDA, la circoncision diviserait par deux les risques d’infection par le virus du sida (VIH). Cette pratique pourrait ainsi éviter deux millions de contaminations et 300 000 morts dans les dix prochaines années en Afrique sub-saharienne. "Cette forte campagne a rendu plus sensibles les jeunes élèves. Ils sollicitent sans cesse la prochaine date d’arrivée du personnel médical du MINISANTE pour bénéficier du service gratuit de circoncision", note Gaspard. Jusqu’à présent cette opération était payante et beaucoup se faisaient opérer par des tradi-praticiens sans respect des mesures d’hygiène.

Mais cet engouement est aussi très risqué car il est souvent lié à une fausse interprétation du message. Beaucoup de jeunes garçons ou d’hommes pensent qu’une fois opérés ils n’ont plus besoin d’utiliser des préservatifs pour se protéger du VIH. Ce qui est totalement erroné. La prévention reste tout autant nécessaire pour éviter d’attraper les MST que ce soit du côté des hommes comme de celui des femmes qui peuvent se faire infecter par des hommes circoncis.

Les non-circoncis discriminés

Mais chez les jeunes, la circoncision est devenue "à la mode". Ils ont découvert en regardant films ou photos sur internet que dans les pays voisins comme la RDC et l’Ouganda, c’était souvent une coutume et pas l’apanage des seuls musulmans. Pour eux, outre le fait de les protéger, c’est aussi une marque de propreté.

Gare donc à celui qui ne suit pas la mode. "J’ai décidé de payer 50 000 frw (80$) pour être circoncis. J’en avais marre des injures de mes collègues élèves. On me considérait tantôt comme un vaurien, tantôt comme un rustique (kafiri) et tantôt comme une personne munie d’une bouteille (allusion au sexe masculin incirconcis)", témoignent aussi bien François Mutijima que ses trois camarades au marché de Rilima. "La culture rwandaise tolère encore les incirconcis, mais dans les quartiers, ils sont des fois mal vus. Plus grave encore dans les établissements scolaires, surtout secondaires, ils sont sujets de discrimination", révèle Gaspard Gasirabo, secrétaire exécutif du secteur administratif de Rilima.

Les filles et les femmes ont aussi acquis une certaine considération à l’égard des circoncis jusqu’à présent peu nombreux dans le pays. Pour Mme Kanyange, mère de trois enfants, bien que le coût de la circoncision soit élevé, elle revêt des avantages incontournables. "La circoncision assure la propreté, elle est une opération chirurgicale esthétique pour les hommes", estime-t-elle.

C’est pourquoi, ils souhaiteraient que cette opération soit couverte par la mutuelle de santé. Mais pour Andrew Makaka, ancien directeur de la Mutuelle de santé au niveau national, "la circoncision est perçue dans le contexte de prévention, raison pour laquelle, elle n’est pas incluse dans les services couverts par la Mutuelle de santé. En plus de cela, les statistiques du dernier recensement général de la population, ont montré que plus d’un million cinq cents incirconcis réclament l’opération…"

Syfia Grands Lacs /Rwanda


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