Le contexte et l’attaque
Le groupe religieux et politique des « Wazalendo » (ou « Messiatha ») avait informé les autorités locales de la tenue d’une manifestation pour exiger le départ de la MONUSCO et d’autres forces étrangères accusées d’occuper la République Démocratique du Congo.
Bien que la manifestation ait été interdite par les autorités provinciales, des membres du groupe se sont rassemblés dans un lieu de culte. En réponse, l’armée congolaise a déployé une attaque violente et généralisée contre les manifestants. L’attaque a commencé par l’arrestation arbitraire de 12 personnes, dont le dirigeant du groupe des Wazalendo. Les détenus ont été attachés et escortés jusque dans la rue, où les militaires ont ouvert le feu, tuant six personnes et blessant une dizaine d’autres.
La répression a rapidement dégénéré, prenant des proportions meurtrières, notamment à l’encontre des femmes, des enfants et des hommes dans le quartier. Les témoins ont décrit des scènes d’horreur, avec des corps jonchant les rues et des mares de sang. Cette violence aveugle a exposé une fois de plus la brutalité systématique à l’œuvre au sein de l’armée congolaise et la culture de l’impunité qui perdure malgré les appels à la justice.
L’inaction et la militarisation des réponses
Les autorités ont réagi à l’attaque en félicitant l’armée et en minimisant le nombre de victimes, tout en diabolisant les manifestants. De plus, les rescapés ont été détenus arbitrairement et poursuivis injustement.
L’incapacité des autorités à organiser des enquêtes sérieuses et à permettre aux familles des victimes d’organiser les funérailles de leurs proches a aggravé le sentiment de frustration et d’abandon parmi la population.
Bien que le procès de certains militaires ait eu lieu à Goma, les enquêtes ont été insuffisantes et n’ont pas permis de traduire tous les responsables devant la justice. En conséquence, une grande partie des auteurs présumés restent impunis. Le général Constant Ndima et le major Peter Kabwe Ngandu, responsables d’un certain nombre de ces atrocités, n'ont pas été suspendus, et aucune enquête approfondie n’a été lancée pour faire la lumière sur l’ensemble de la chaîne de commandement.
Analyse du désordre au sein des FARDC et des crimes des Wazalendo
Les rapports crédibles sur la situation en RDC soulignent une profonde désorganisation au sein des Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), marquée par des actes de violence et des violations des droits humains répétées. Les FARDC, censées protéger la population civile, ont été responsables de nombreuses exactions, y compris des massacres, des tortures et des exécutions extrajudiciaires. L’attaque du 30 août à Goma fait partie d’un schéma récurrent de violence militaire à l’encontre de civils désarmés, exacerbant la méfiance envers l’armée et les autorités locales.
Le groupe des Wazalendo, bien qu’ayant été décrit comme un groupe politique avec une certaine popularité locale, a également été l’objet de nombreuses critiques pour ses liens présumés avec des réseaux criminels. Les rapports font état de leurs actions violentes et de leur rôle dans la déstabilisation de certaines régions de la RDC. Cependant, cette situation ne justifie en aucun cas une répression militaire indiscriminée contre des civils, ni le recours à la violence systématique pour tenter de résoudre un conflit politique.
Le silence persistant du gouvernement congolais face aux crimes perpétrés par ses propres forces armées, ainsi que l’incapacité à mener des enquêtes transparentes et impartiales, révèlent une complicité passive qui aggrave le sentiment de révolte au sein de la population et accroît l’instabilité du pays.
Appel à l’action
Face à cette situation alarmante, Amnesty International demande instamment au Président Félix Tshisekedi de suspendre immédiatement le général Constant Ndima et le major Peter Kabwe Ngandu de l’armée congolaise, le temps qu’une enquête impartiale soit menée sur leur implication dans les crimes commis le 30 août 2023.
De publier un décret présidentiel interdisant l’utilisation de la Garde républicaine, y compris des forces spéciales, pour des opérations de maintien de l’ordre, sauf dans des circonstances exceptionnelles bien définies par la loi. Ce décret doit inclure des protocoles clairs pour le recours aux forces armées dans le maintien de l’ordre, conformément aux normes internationales et aux droits humains.
Il est impératif que des mesures concrètes soient prises pour éradiquer la culture de l’impunité et garantir que des actes aussi graves ne se reproduisent plus à l’avenir. Les familles des victimes méritent justice, dignité et réparation.
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