Ancien médecin à Butare, le Dr Munyemana a été jugé coupable de génocide et d’actes de complicité en vue de sa préparation. La décision confirme le verdict rendu en décembre 2023, qui avait établi sa responsabilité directe dans les massacres commis à Butare et dans la région de Tumba.

Suite au verdict, Me Richard Gisagara, avocat représentant les parties civiles, a salué une décision de justice exemplaire :

« Le jugement est rendu. Mes pensées vont aux victimes de ses crimes à Tumba et ailleurs. »

Pour sa part, Me André Martin Karongozi, également avocat des parties civiles, a rappelé que l’accusé détenait les clés du bureau du secteur de Tumba, où de nombreux Tutsis avaient été enfermés avant d’être massacrés :

« Il prétendait vouloir les sauver, mais il a été prouvé qu’ils étaient ensuite transférés à la préfecture de Butare, où ils ont tous péri. »

Le Dr Munyemana a reconnu avoir détenu ces clés entre le 23 avril et le 19 mai 1994, mais affirmait qu’il s’en servait pour “protéger” les Tutsis des miliciens Interahamwe. En appel, il s’est présenté comme un soi-disant homme de bien, niant toute intention de nuire et demandant son acquittement.

Le 21 octobre, le ministère public avait requis la réclusion criminelle à perpétuité, estimant que l’accusé avait joué un rôle central dans la mort de nombreuses personnes.

« En France, a rappelé le procureur, un meurtrier encourt 30 ans de prison, un complice 25 ans. Quelqu’un impliqué dans la mort de centaines de victimes devrait passer le reste de sa vie en prison. »

Selon l’ancienne Commission nationale de lutte contre le génocide (CNLG), le Dr Sosthène Munyemana est né le 9 octobre 1955 à Mbare, dans la commune de Musambira, préfecture de Gitarama. Diplômé de l’Université nationale du Rwanda à Butare, il a poursuivi ses études à l’Université de Bordeaux II, en France, où il s’est spécialisé en gynécologie.

Au moment du génocide contre les Tutsis, il résidait à Gitwa, dans le secteur de Tumba. Des témoins ont rapporté qu’il avait pris activement part aux massacres dans cette zone et dans la ville de Butare.

Lors d’une réunion présidée par le conseiller François Bwanakeye le 17 avril 1994, il aurait tenu un discours virulent :

« L’ennemi est parmi nous. J’héberge chez moi quinze Hutus venus de Kigembe, qui ont fui l’entrée des Inkotanyi par le Burundi. »

Des témoins ont aussi affirmé que durant le génocide contre les Tutsis, il portait régulièrement un uniforme et était constamment armé.

Le Dr Munyemana était par ailleurs un proche de Jean Kambanda, Premier ministre du gouvernement intérimaire dit “des Abatabazi”, qui a reconnu sa participation au génocide contre les Tutsis et a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

La Cour d’assises de Paris a confirmé la peine de 24 ans de prison du Dr Sosthène Munyemana pour son rôle dans le génocide contre les Tutsis en 1994