Pourtant, malgré les espoirs soulevés par l’approbation récente du « Concept des opérations » (Conops) à Luanda, cette sixième tentative diplomatique semble destinée à échouer, prisonnière des ténèbres d’une réalité intransigeante.
Ce plan, ambitieux sur le papier, porte la promesse de rétablir la confiance entre Kinshasa et Kigali, de bâtir un sanctuaire de sécurité dans l’Est de la RDC, et de faire taire les discours de haine qui rongent le tissu social congolais. Mais ces promesses, aussi nobles soient-elles, s’écrasent contre des montagnes d’obstacles, à la fois politiques, économiques et structurels, qui rendent la paix aussi insaisissable qu’un mirage au cœur du désert.
Un rêve de paix, pris au piège du réel
Le Conops, condensé en sept pages, se fixe des objectifs d’une portée presque utopique : effacer des années de méfiance, de violences, et de manipulations, le tout en seulement trois mois. Mais le calendrier, tout comme les moyens proposés, relève d’une déconnexion flagrante des réalités du terrain. Car, dans l’ombre de ces belles résolutions, se cachent des vérités douloureuses.
Les FDLR, ce groupe armé fondé par des criminels du génocide contre les tutsi au Rwanda, sont plus qu’une simple épine dans le flanc de la région. Ils sont devenus, tragiquement, un pilier de la stratégie militaire de Kinshasa, une alliance cruciale pour les FARDC dans leur lutte contre le M23.
Comment, dans de telles conditions, espérer leur neutralisation ? L’armée congolaise elle-même, rongée par la corruption, les rivalités internes et une logistique défaillante, semble incapable de mener une opération de cette envergure. Ces failles transforment la promesse d’une action militaire en un vœu pieux.
Un conflit alimenté par les flammes de la haine
Le poison du discours de haine coule dans les veines de la politique congolaise. La communauté tutsi, désignées comme « ennemie interne », est prise pour cible dans une rhétorique incendiaire qui trouve des relais jusque dans les plus hautes sphères du pouvoir.
Récemment encore, le très zélé ministre de la Justice, Constant Mutamba, a franchi les limites de l’indécence en appelant publiquement et directement au meurtre des tutsi congolais, à Goma, ajoutant une offense personnelle à l’égard du président rwandais Paul Kagame.
Ces mots, loin d’apaiser, nourrissent les divisions, attisent les flammes, et éloignent encore davantage la perspective d’une réconciliation sincère.
Mais ces discours ne sont pas seulement le fruit de la haine ; ils servent aussi un calcul cynique. Les accusations contre des « infiltrés étrangers » et les « complots extérieurs » détournent l’attention des échecs de gouvernance et des injustices structurelles. Ce populisme, habile et destructeur, masque l’incapacité du gouvernement à apporter des réponses tangibles aux souffrances de ses citoyens.
L’economie de guerre : Une entrave à la paix
Dans cette tragédie congolaise, l’économie de guerre joue le rôle d’un acteur invisible mais omniprésent. Les richesses minières et les circuits illicites alimentent les coffres de hauts gradés militaires et de politiciens influents, qui ont tout intérêt à maintenir le chaos.
Pour ces acteurs, chaque tentative de pacification menace leurs privilèges et leur fortune. Le conflit est devenu une rente, une mécanique perverse qui enrichit quelques-uns au prix des larmes et du sang des populations locales.
Un leadership ambigu et paralysant
Le président Félix Tshisekedi, figure de proue d’un Etat affaibli, oscille entre des déclarations belliqueuses et des appels à la médiation, sans jamais offrir de vision claire.
Sa rhétorique, marquée par la désignation systématique de boucs émissaires, trahit une incapacité à affronter les vrais enjeux du conflit. En six ans de pouvoir, l’absence de résultats probants est criante, et le système qu’il dirige semble davantage tourné vers l’enrichissement personnel et le favoritisme que vers la résolution des crises.
Le processus de Luanda : une illusion diplomatique
Les accords de Luanda, bien qu’enrobés de bonnes intentions, paraissent n’être qu’une mise en scène pour apaiser les pressions internationales. La méfiance mutuelle entre Kigali et Kinshasa reste profonde, et les risques pour les civils, notamment les représailles des FDLR, demeurent élevés.
La fragilité du soutien international, combinée à l’absence de volonté politique réelle de Kinshasa, condamne ce processus à l’immobilisme.
Dans ce contexte, le processus de Luanda n’est pas une feuille de route vers la paix, mais une œuvre théâtrale jouée pour le regard des spectateurs étrangers. La réalité, elle, reste sombre et désespérément figée.
Un destin enchaîné à ses propres contradictions
Le déni de réalité, le discours victimaire, les attaques systématiques contre les voix dissidentes, et la quête obsessionnelle de boucs émissaires sont autant de chaînes qui entravent la RDC.
Les conflits ne sont pas seulement une conséquence de ces failles : ils en deviennent le camouflage, un paravent derrière lequel se cache l’incapacité à gouverner, à réformer, à construire.
Sans une révolution profonde des paradigmes actuels, un bouleversement qui paraît presque chimérique, la neutralisation des FDLR restera un rêve brisé.
Les vents de l’instabilité continueront de souffler sur l’Est de la RDC, perpétuant le cycle tragique de la violence et de la souffrance. Et ainsi, la paix, cet idéal fragile, continuera de s’éloigner, comme une étoile inaccessible dans la nuit des désillusions congolaise.
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