Nana Mouskouri entre lumière d’éternité et combat secret

Redigé par Tite Gatabazi
Le 5 août 2025 à 11:46

À l’aube de ses quatre-vingt-dix printemps, Nana Mouskouri, légende vivante et figure tutélaire de la chanson francophone et internationale, s’apprête à quitter définitivement la scène, telle une grande prêtresse de la mélodie tirant sa révérence dans la dignité et la discrétion.

A l’occasion d’un entretien exceptionnel accordé à Paris Match, la cantatrice grecque, au timbre cristallin devenu icône, s’est livrée avec une rare sincérité sur les étapes majeures de son existence, évoquant avec pudeur les fastes de sa carrière comme les épreuves les plus intimes, dont un cancer, resté jusqu’alors tenu dans le secret.

Née à La Canée en Crète, élevée entre les partitions classiques et les clameurs d’un monde en reconstruction, Nana Mouskouri s’est imposée, dès les années 1960, comme l’une des plus grandes voix de son temps. Sa diction impeccable, son élégance naturelle et sa capacité à embrasser des répertoires aussi divers que la chanson populaire, le jazz, l’opéra ou la musique folklorique, l’ont rapidement propulsée sur les plus prestigieuses scènes de la planète.

En près de six décennies de carrière, elle aura interprété des titres devenus immortels, la liste serait très longues.

Forte d’un répertoire chanté en plus de dix langues et d’un engagement constant pour la paix, l’éducation et la justice notamment en tant qu’ambassadrice de l’UNICEF, Nana Mouskouri est bien plus qu’une simple interprète : elle incarne une esthétique, une rigueur, un humanisme. Avec plus de 400 millions de disques écoulés à travers le monde, elle figure parmi les artistes les plus prolifiques de l’histoire de la musique enregistrée.

Pourtant, malgré cette gloire planétaire, jamais elle n’a sombré dans les excès de l’ostentation. Toujours vêtue de sobriété, ses lunettes noires devenues signature, elle a su préserver, contre vents et marées, une authenticité rare.

Mais derrière le lustre de la réussite se dissimulait une blessure silencieuse. Dans les colonnes du magazine, l’artiste a confié avoir traversé, en 2015, l’épreuve redoutable d’un cancer du pancréas, pathologie souvent fatale. "J’ai eu beaucoup de chance de m’en sortir", reconnaît-elle avec gratitude, en évoquant cette période de sa vie avec une gravité mesurée.

La nouvelle l’avait bouleversée, d’autant plus qu’à la même époque, David Bowie succombait à la maladie, malgré des annonces rassurantes sur son état de santé. Cette confrontation brutale à la fragilité humaine n’a fait que renforcer, chez Nana Mouskouri, ce sentiment d’urgence à vivre, à transmettre, à remercier.

À l’heure de tourner la dernière page de son épopée scénique, celle qui se décrit avec émotion comme “une femme que le public a aimée, comblée, portée” laisse derrière elle un legs d’une richesse incommensurable. “Ma vie est une longue chanson”, glisse-t-elle, le regard embué d’une reconnaissance infinie envers ce public fidèle, qui l’a accompagnée de salle en salle, de continent en continent.

Le monde de la musique, orphelin de ses plus grandes voix, s’incline aujourd’hui devant cette grande dame dont le chant fut, durant plus d’un demi-siècle, une source d’apaisement, d’espérance et de beauté.

Nana Mouskouri n’est pas qu’une artiste : elle est une institution, une mémoire chantante du XXe siècle, un trait d’union entre les peuples. Et si elle se retire dans le silence de la retraite, sa voix, elle, continuera de résonner dans l’éternité.

À presque 90 ans, Nana Mouskouri, icône de la chanson francophone, s’apprête à quitter la scène avec dignité

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