Quand le Président Museveni se contredit et donne l’espace libre aux génocidaires

Redigé par IGIHE
Le 18 octobre 2018 à 04:16

Le génocide perpétré contre les Tutsis au Rwanda a commencé le 7 avril 1994, trois jours après le début d’une réunion tenue à Kampala sur la lutte pour la valorisation des Africains, clôturée le 8 avril 1994.

Le Président Museveni avait alors été au premier plan parmi ceux qui avaient rehaussé le ton pour condamner les massacres. Les chiffres montrent que ce génocide qui a duré 100 jours et qui a été arrêté après la mort de plus d’un million de victimes, soit une moyenne de 10.000 Tutsis tués chaque jour, a été le plus atroce jamais connu au monde.

L’écrivain Edwin Nsereko se souvient :

« Lors de son allocution à l’occasion de la commémoration du 20ème anniversaire du génocide perpétré contre les Tutsis, le Président avait accusé les Occidentaux, en particulier les Belges et les Français, pour leur part d’avoir semé la division et la haine parmi les Rwandais. Les paroles adressées à la Belgique pour avoir colonisé le Rwanda, à la France pour son intimité avec le pouvoir de Habyarimana, ont été tellement dures que leurs Représentants étaient honteux ».

Sa réprobation était compréhensible à tout le monde car c’était un voisin frère. Il a témoigné le respect aux victimes du génocide et le soutien aux rescapés. Il a recommandé que les coupables répondent de leurs actes en dépit de leur force illusoire. Dans les premières années de l’après-génocide, le Président Museveni, dans ses paroles en Kinyankole mélangés au Kinyarwanda, était apprécié des rescapés pour sa franchise.

L’écrivain Edwin Nsereko se demande si cet homme est le même Museveni qui est devenu aujourd’hui la source de chagrin des mêmes rescapés qu’ils consolaient hier.

Au moment de la prise du pouvoir par le FPR en 1994, se rappelle Edwin, la plupart de ceux qui s’étaient impliqués dans le génocide se sont réfugiés au Zaïre de Mobutu (actuelle République Démocratique du Congo) jusqu’à sa mort en 1997. Certains d’entre eux se sont alors dirigés vers le Malawi et la Zambie où ils se présentaient comme des refugiés ordinaires. Ces pays ne savaient pas qu’ils allaient donner l’asile aux criminels poursuivis par la justice.

“A cette époque, l’Ouganda n’était pas dans leur trajectoire. D’abord ils savaient que Museveni savait qui ils sont. Ensuite son discours au Stade Amahoro leur avait fait comprendre qu’ils peuvent être saisis et jugés ou extradés vers le Rwanda”, observe l’écrivain.

Quand ont-ils su qui est le véritable Museveni ? Quand ont-ils réalisé que ses déclarations sont à l’opposé de ses actes ?

Ces présumés génocidaires se sont aujourd’hui répartis dans différents coins de l’Ouganda où ils ne sont pointés du doigt par personne, où ils se meuvent sans inquiétude aucune. Cela a accru l’effectif des génocidaires sur le sol ougandais où les uns exercent le commerce et d’autres la politique dans les instances de base.
Les informations disponibles montrent que 25% des 1000 criminels poursuivis par des mandats d’arrêt internationaux sont hébergés par l’Ouganda dans les zones de Nyakivale,Mubende, Fort Portal, Kasese, Mityana, Lyantonde et Kampala.

En 2010 le Rwanda a écrit à l’Ouganda pour lui rappeler la responsabilité internationale qu’il a de saisir et juger ou d’extrader au Rwanda les présumés coupables de génocide perpétré contre les Tutsis. Normalement il est interdit aux pays de donner l’asile aux présumés coupables de crimes contre l’humanité, dont le génocide.

Le 18 août 2016 le Rwanda a envoyé à l’Ouganda un message montrant une liste de 137 personnes présumées coupables et leurs chefs d’accusation. L’Ouganda en a emprisonné seulement 3, lesquels ont été peu après relâchés. Sur cette liste figurent entre autres Bizimungu Jean Baptiste, Rwiririza Augustin, tous les 2 dirigeants dans les instances de base qui ont incité la population à s’impliquer dans le génocide.

Bizimungu, ex Conseiller du Secteur Rwankuba dans la Commune de Murambi, a été un proche collaborateur de Gatete J.Baptiste, jugé coupable du crime de génocide par le Tribunal International ICTR.Rwiririza, ex Conseiller du Secteur Ndatemwa, est accusé pour avoir incité et appuyé les militaires dans les massacres.

Bizimungu a trouvé refuge à Gashojwa, Rwiririza à Kiretwa dans le District de Isingiro en Ouganda. L’ex Policier Munyengango Marc usait de son pouvoir pour pousser la population à tuer les Tutsis de Mayaga. Il se ballade tranquillement aussi à Isingiro où il a trouvé refuge. Kamali Gaspard originaire de la Commune qui a connu un génocide sans nom a trouvé refuge dans le District de Ntungamo, en Ouganda.

“Ce qui semble être extraordinaire c’est quand Twahirwa Epimaque, alias John Musana et ex dirigeant dans les instances de base de la Commune Murambi au moment du génocide est encore, maintenant, dirigeant politique à Kabazana A dans le Nyakivala en Ouganda, ou prospère son commerce de débit de boisson”, s’étonne Edwin.

” C’est un euphémisme que de dire que les présumés coupables de génocide ont trouvé refuge en Ouganda. Ils vivent dans une sérénité totale au moment où les Occidentaux que Museveni hier pointait du doigt les envoient au Rwanda. C’est le cas de la Norvège, la Suède, la Finlande, l’Allemagne et la Suisse. Les Etats-Unis d’Amérique ont extradé Munyakazi Léopold, le Canadaa extradé Mugesera Léon. La France et la Belgique qu’il a accusées avec virulence dans son discours en ont déjà jugé 8.

En général, parmi les présumés coupables de génocide vivant aux Etats- Unis, au Canada et en Europe, 23 ont été jugés ou extradés, alors que ces pays comptent un nombre de réfugiés criminels beaucoup plus bas que celui de l’Ouganda où ces criminels fourmillent dans les rues de Kampala et d’autres se trimbalent de partout le pays.

Pour l’écrivain Edwin, certains pays ont montré que leur retard dans la saisie pour jugement ou extradition avait été dû le plus souvent par l’ignorance de ce qu’a été réellement le génocide, contrairement à Museveni. Les Ougandais ont vu aux bords du lac Victoria des milliers de cadavres charriés par les eaux des rivières du Rwanda. L’Ouganda a un Mémorial du Génocide dans le District Rakai au bord du lac Victoria. Les criminels qui ont jeté ces innocents dans les rivières sont hébergés en Ouganda où ils ont suivi les corps de leurs victimes.

Le Museveni qui leur a offert un asile chaleureux est-ce le même Museveni qui demandait à tous les pays du monde de les juger ou les extrader au Rwanda ?
Et si c’est le même, quelle mouche l’a-t-il donc piqué ?


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