Goma en fête sous le sceau de la sécurité retrouvée

Redigé par Tite Gatabazi
Le 31 décembre 2025 à 10:30

Il n’est pas anodin, pour une cité longtemps meurtrie par l’incertitude et les convulsions de l’histoire récente, de se découvrir soudainement traversée par une allégresse simple : celle de la paix ressentie, visible, presque tangible.

A Goma, en ce soir de la Saint-Sylvestre, l’atmosphère porte en elle les signes d’un basculement silencieux. Dès les premières heures de l’après-midi, l’effervescence gagne les artères principales : la ville bruisse, vibre, respire.

Le flot des véhicules, des motos se densifie, les transports se congestionnent, non par chaos mais par vitalité retrouvée ; les marchés, plus animés qu’à l’ordinaire, deviennent lieux d’échanges à haute voix, d’embrassades, de propos enthousiastes où l’on exalte la sécurité retrouvée comme l’on évoque un bien précieux longtemps espéré.

Les vendeurs ambulants, tout sourire, incarnent cette joie diffuse qui se lit sur les visages. La présence policière, perceptible mais mesurée, n’inspire ni crainte ni réserve : elle rassure, elle apaise. On la salue parfois d’un trait d’humour ou d’une bénédiction en swahili, qui court de bouche en bouche dans les rues de Goma.

A côté d’elle, la présence discrète mais certaine des forces armées, accueillie sans crispation, parachève ce sentiment collectif d’être enfin protégés. Les Églises élèvent leurs sonorités, les bars libèrent la musique ; la ville, longtemps contenue, se permet à nouveau la joie sans arrière-pensée.

Les téléphones portables s’allument, capturent l’instant, témoignent et partagent, comme pour conjurer l’oubli et dire au monde : « Goma célèbre, Goma vit. »

Une cité réconciliée avec elle-même

Cette liesse n’est pas un simple épisode festif ; elle est le reflet d’une évolution plus profonde dans l’imaginaire collectif des habitants. La population, longtemps tenue en suspens entre peur et espérance, goûte aujourd’hui à une normalité qui, paradoxalement, a valeur d’événement.

La paix ressentie n’est pas seulement absence de menaces : elle est réappropriation de l’espace public, réouverture des conversations, réémergence de la confiance. Elle opère une véritable réconciliation de la cité avec elle-même, avec ses rues, ses marchés, ses lieux de culte, ses nuits.

Dans les territoires libérés, un nouvel équilibre social se dessine, produit d’une dynamique politique et militaire qui a profondément reconfiguré les rapports entre gouvernants de facto et gouvernés. La référence à la révolution portée par l’AFC/M23 est inscrite, dans le discours de nombreux habitants, comme une clé d’intelligibilité de cette métamorphose : elle exprime moins une exaltation guerrière qu’un ressenti collectif celui d’une osmose naissante entre sécurisation du quotidien et aspiration populaire à la stabilité.

Les habitants ne théorisent pas ; ils constatent, à hauteur d’existence : moins de peur sur les routes, davantage de liberté de circuler, la possibilité de célébrer la nuit sans appréhension.

Ainsi, le réveillon de la Saint-Sylvestre à Goma ne se réduit pas à une parenthèse festive. Il prend valeur de symbole : celui d’une ville qui, après de longues années d’épreuves, se redécouvre capable de joie publique, de confiance partagée et d’espérance lucide.

La paix retrouvée n’est pas proclamée ; elle se vit, se murmure, se chante, et se sait fragile. Mais en cette nuit d’allégresse, elle a le visage radieux d’un peuple qui se relève et qui, pour la première fois depuis longtemps, ose regarder l’avenir sans trembler.

A Goma, en ce soir de la Saint-Sylvestre, l’atmosphère porte en elle les signes d’un basculement silencieux

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