Urgent

L’armée désarmée du Roi Soleil

Redigé par Tite Gatabazi
Le 5 novembre 2025 à 01:55

Lors de son passage en Égypte, Félix Tshisekedi a une fois de plus cédé à son goût pour la grandiloquence en déclarant, devant la diaspora congolaise, qu’il était « prêt à se sacrifier pour aller combattre au front ».

Une phrase théâtrale, qui se voulait héroïque, mais qui n’a suscité, dans les milieux militaires et diplomatiques, qu’un mélange de consternation et d’ironie. Car celui qui prétend se battre pour le Congo est précisément celui qui, depuis le Palais de la Nation, a méthodiquement désarmé son armée, affaibli ses institutions et fracturé sa hiérarchie.

Le chef de l’État parle de sacrifice, mais c’est l’institution militaire tout entière qu’il a livrée à la désarticulation et à l’humiliation.

Une armée vidée de son âme

La République démocratique du Congo n’a plus d’armée au sens républicain du terme. Ce qui subsiste sous l’appellation de FARDC n’est plus qu’un édifice sans charpente, un corps privé de colonne vertébrale. L’état-major général, réduit à un rôle décoratif, n’exerce plus aucune autorité opérationnelle.

Les ordres, désormais, émanent directement du Palais de la Nation, devenu un quartier général parallèle, où se mêlent la confusion des compétences et l’amateurisme des improvisations.

La Garde républicaine, autrefois limitée à une mission de protection rapprochée, s’est muée en une armée dans l’armée, dotée d’une autonomie opérationnelle totale, exclusivement dévouée au chef de l’État. Les officiers compétents ont été écartés ou marginalisés, remplacés par des fidèles plus zélés que qualifiés.

La neutralisation méthodique des cadres militaires, sous couvert de « moralisation », a plongé l’ensemble du dispositif de défense dans la paralysie.

Le Palais, nouveau quartier général

Ce qui relevait hier du ministère de la Défense et de l’état-major est désormais absorbé par le cercle restreint de la présidence. La logistique militaire, l’approvisionnement en armements, la planification des dépenses stratégiques, tout passe par le bureau présidentiel. Les circuits administratifs et hiérarchiques ont été court-circuités : les décisions se prennent entre conseillers civils sans expérience militaire, dans les couloirs du Palais, loin des réalités du terrain.

Cette confiscation du commandement traduit une dérive monarchique. Le Palais s’érige en ministère de la Défense bis, où s’improvisent des stratégies sans concertation ni expertise. Le renseignement militaire lui-même, autrefois fondement de la sécurité nationale, a été absorbé par la maison militaire présidentielle, supplantant la DEMIAP et déplaçant interrogatoires et briefings au sein même du Palais.

Jamais la présidence congolaise n’avait concentré autant de pouvoir militaire et jamais elle ne l’avait exercé avec une telle légèreté.

Une armée sans autonomie, une guerre perdue d’avance

Le résultat est tragiquement clair : une armée paralysée, désorientée, incapable non seulement de défendre le territoire, mais même de se défendre elle-même. Privées de logistique, privées de commandement cohérent, les FARDC ne sont plus qu’une force symbolique, condamnée à subir.

Les officiers, épuisés par les improvisations de la hiérarchie politique, témoignent d’un profond découragement. « On n’a pas besoin qu’il vienne mourir avec nous, confie un colonel amer, mais qu’il nous laisse au moins les moyens de nous battre. »

En dissolvant la chaîne de commandement dans la sphère politique, le pouvoir a transformé l’armée nationale en un simple prolongement du pouvoir présidentiel. Les décisions tactiques, désormais dictées par des conseillers civils, obéissent davantage à des considérations d’image qu’à des impératifs stratégiques.

Le front, quant à lui, se réduit à une scène lointaine dont on parle depuis les tapis du Palais.

Le Roi règne, l’armée s’effondre

Félix Tshisekedi se rêve en chef de guerre, mais il n’en a ni la rigueur ni la vision. Il parle de sacrifice, mais gouverne dans le confort des dorures présidentielles. Pendant que les soldats meurent dans la boue du Kivu, le Président s’érige en metteur en scène de son propre courage, confondant la posture du héros et la réalité du commandement.

Car on ne conduit pas une armée par la communication, pas plus qu’on ne gagne une guerre à coups de slogans. Une armée se dirige par la cohérence, la discipline et la compétence. Or, ces vertus ont été sacrifiées sur l’autel du clientélisme et de la personnalisation du pouvoir.

Aujourd’hui, le constat est implacable : les FARDC ne sont plus une armée républicaine, mais une milice d’apparat au service d’un monarque démocratique. Le pays brûle, le Roi règne, et les soldats, eux, se battent les mains nues.

Le Roi Soleil congolais parade, mais son royaume s’effondre. Car on ne défend pas une nation à genoux surtout quand c’est son propre chef qui l’a privée de colonne vertébrale.

Lors de son passage en Égypte, Félix Tshisekedi a une fois de plus cédé à son goût pour la grandiloquence

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