
IGIHE : Pourquoi ce titre ?
Daniel le Scornet : Moi,le dernier Tutsi. C’est Charles désigné comme le dernier à assassiner sur les collines de Mayunzwe. Comme la certitude que le "travail" sera mené à terme, jusqu’au dernier, jusqu’à Charles. C’est le principe même du génocide.
Mais c’est aussi Charles retournant ce "statut" contre ses tueurs afin de mettre en échec durant près de trois long mois non pas seulement son propre assassinat mais le génocide lui-même, l’extermination jusqu’au dernier. Ceci alors que toutes les puissances étrangères, que l’ONU, ont laissé les Tutsi, ont laissé Charles aux seules mains des tueurs. Que cette fois-ci la solution finale pouvait vraiment être menée à terme.

C’est Charles le dernier Tutsi au sens que les colonisateurs ont voulu donner à ce terme, en l’essentialisant, alors que dans l’histoire millénaire du Rwanda les caractéristiques hutu, tutsi et twa n’étaient que des caractéristiques socio-économiques parmi d’autres, n’ayant jamais conduites à des oppositions termes à termes, à des guerres et des massacres sur ces bases. En ce sens et dans le traitement politique et sensible du Rwanda nouveau que Charles et tous les rwandais construisent ensemble Charles est bien le dernier Tutsi.
IGIHE : Pourquoi ce livre et votre implication dans son écriture avec Charles ?
Daniel le Scornet :Car après Auschwitz, après le bien hypocrite "plus jamais ça" , après le journal d’Anne Frank, le récit de Charles, du dernier Tutsi, montre à hauteur d’enfant, c’est-à-dire à hauteur de sensibilité et de vérité les plus fortes, que la déshumanisation d’un autre humain jusqu’à son extermination par ce que on l’a délibérément construit comme autre, comme non humain, hante toujours notre société. Que cette fois, au Rwanda, l’autre pouvait être exactement le même, avec la même couleur de peau, la même religion, la même culture, la même nationalité.
Qu’un racisme sans race pouvant exterminer une partie de l’humanité pouvait être notre devenir y compris lorsque des pays dits développés, des democraties, étaient présentent, informées de la logique génocidaire, parties prenantes même de son déploiement au nom de ses intérêts de puissance comme l’ a été la France tout au long de ce génocide comme les faits que je mentionne en fin d’ouvrage le confirme hélas totalement.
En ce sens, celui d’une France se refusant toujours 25 ans après à reconnaitre ses écrasantes responsabilités dans le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda je veux moi aussi, â l’instar de Charles, être le dernier français. Le dernier de cette conception là de mon pays.
C’est pourquoi avec Charles nous sommes ensemble afin que le devenir de l’humanité puisse ne pas être celui de la répétition à l’infini du heurt mortifère des nationalismes, des raisons d ’Etat et de puissances, des identités réifiées.D’ être les derniers, vraiment les derniers, de ces monstruausités et de faire de nos diversités historiques et culturelles les joyaux de notre commune humanité.
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