La CNLG apprécie les avancées de la justice espagnole et encourage la France

Redigé par Dr BIZIMANA Jean Damascène
Le 26 novembre 2015 à 10:29

La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide salue les avancées de la justice espagnole et demande à la France de suivre cet exemple.
Les dernières décisions judiciaires relatives à l’instruction judiciaire ouverte contre quarante hauts gradés rwandais par la justice espagnole constituent des avancées considérables.
D’abord, en janvier 2015, la cour d’appel de l’Audiencia nacional, à Madrid, avait prononcé un “non-lieu” contre 11 des 40 hauts officiers rwandais et une suspension provisoire des (...)

La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide salue les avancées de la justice espagnole et demande à la France de suivre cet exemple.

Les dernières décisions judiciaires relatives à l’instruction judiciaire ouverte contre quarante hauts gradés rwandais par la justice espagnole constituent des avancées considérables.

D’abord, en janvier 2015, la cour d’appel de l’Audiencia nacional, à Madrid, avait prononcé un “non-lieu” contre 11 des 40 hauts officiers rwandais et une suspension provisoire des poursuites contre les 29 autres. Les magistrats avaient ordonné “que soient levés les mandats d’arrêt qui pourraient affecter tous les prévenus une fois que la présente décision sera revêtue de l’autorité de la chose jugée”.

Ensuite, un recours avait été interjeté auprès de la Cour Suprême espagnole. Le 24 septembre 2015, la chambre criminelle de la Cour suprême espagnole a ordonné la suspension des poursuites contre les 40 militaires rwandais précédemment inculpés.

Enfin, la Commission Nationale de Lutte contre le Génocide salue la juste décision de la section espagnole d’Interpol d’informer les autres polices nationales des Etats Membres de l’annulation des notices rouges diffusées à l’encontre de 40 militaires rwandais.

France
Déni de justice et persistance du négationnisme

Il reste beaucoup à faire pour que la justice française fasse le même pas que la justice espagnole. En effet, c’est depuis 2006, que suite à l’Ordonnance de soit-communiqué du juge français Jean-Louis Bruguière des mandats d’arrêt à l’encontre de 9 militaires rwandais ont été émis. C’est d’ailleurs le juge Bruguière qui a inspiré son homologue espagnol quant à la méthode à utiliser et aux résultats à atteindre, à savoir la déstabilisation de l’Etat rwandais.

Refus de prise de décision judiciaire sur le rapport balistique d’experts français
L’enquête Bruguière a été reprise en 2007 par les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux et un déplacement sur les lieux s’est déroulé au Rwanda en 2010 aboutissant à la rédaction d’un rapport d’expertise publié en janvier 2012.

Cette enquête menée par des experts français étayait l’hypothèse selon laquelle les tirs de missiles qui ont abattu l’avion du président Habyarimana, le 6 avril 1994, provenaient du camp militaire de Kanombe tenu par des Ex-FAR. Ce camp abritait des unités les plus spécialisées, notamment le bataillon para-commando et la compagnie Lutte anti-aérienne (LAA) qu’avait dirigée à une époque le colonel Theoneste BAGOSORA, le cerveau du génocide commis contre les Tutsi.

Il revenait toujours au parquet de Paris de prendre ses réquisitions, avant que les magistrats instructeurs ne décident de renvoyer ou non en procès les 9 personnes mises en examen. Il faut rappeler qu’en droit, le parquet avait trois mois pour prendre ses réquisitions. Depuis, un silence opaque s’est installé autour de l’enquête des juges Marc Trévidic et Nathalie Poux.

Il est temps qu’un non-lieu soit prononcé au plus vite, en faveur des personnes visées par des mandats d’arrêt injustifiés du juge Bruguière, qui reposent sur des motivations autres que judiciaires.

Une telle décision ferait taire certaines voix qui théorisent pour un double génocide et dont les maîtres penseurs sont notamment les membres de l’association “France Turquoise”. On peut citer à titre illustratif les généraux Jacques Hogard, Jean-Claude La Fourcade, Jacques Rosier et Michel Robardey clairement impliqués, en qualité de supérieur hiérarchique, dans des crimes commis au Rwanda notamment lors de l’opération Turquoise.

Des officiers militaires français impliqués dans le génocide qui poursuivent des actions négationnistes

Tous sont membres fondateurs de l’association France-Turquoise, dont la raison d’être est la justification du rôle de ses membres dans le génocide perpétré contre les Tutsi, le déni de sa planification et la diabolisation gratuite des autorités rwandaises.

Déjà en plein génocide, alors qu’ils étaient au cœur de l’opération Turquoise, le colonel Hogard et le général La Fourcade refusaient de reconnaitre l’existence du génocide en cours et ne cachaient pas leur sympathie pour les extrémistes responsables du génocide.

Le général Jacques Rosier avait été chef du Détachement d’Assistance Militaire et d’Instruction (DAMI) entre juin 1992 et novembre 1992 pendant la période où l’armée rwandaise commettait plusieurs massacres sur les Tutsi. Le DAMI commandée était hébergé dans les camps militaires de Gabiro, Mukamira et Bigogwe, ainsi qu’au campus universitaire de Nyakinama et au camp militaire de Gako dans le Bugesera.

A cette époque, l’armée rwandaise a accentué de manière intensive la formation militaire et idéologique des Interahamwe dans ces mêmes camps militaires Jacques Rosier était le coordonnateur de ces formations en tant que responsable du DAMI. Lors de Turquoise, en 1994, Jacques Rosier est aussi le plus haut responsable militaire français sur le terrain du génocide commis sur les survivants tutsi de Bisesero le 30 juin 1994.

Michel Robardey a été conseiller au Centre de recherche criminelle et de documentation de la gendarmerie rwandaise, communément appelé « Criminologie ». Michel Robardey coordonnait les activités d’informatisation des données fichant les personnes à rechercher et à tuer, en particulier les Tutsi.

II convient aussi de rappeler ici que, politiquement, en plein génocide, le 27 avril 1994, Alain Juppé, alors Ministre des Affaires étrangères et l’Élysée recevaient Jérôme Bicamumpaka, le ministre des affaires étrangères du gouvernement qui était en train de commettre le génocide, ainsi que Jean-Bosco Barayagwiza, l’un des hauts responsables du génocide.

Financièrement, jusqu’en août 1994, la Banque de France a procuré des moyens financiers aux auteurs du génocide. La Banque Nationale de Paris (BNP) a honoré le règlement de plusieurs contrats de livraisons d’armes en plein génocide. Par l’entremise du ministère de la Coopération, la France a assuré la fourniture d’armes, de munitions et de matériels aux Forces armées rwandaises alors que celles-ci organisaient l’exécution systématique des Tutsi.

Il est alors temps pour que la justice française, à l’instar de la justice espagnole, s’affranchisse de l’emprise de certaines influences militaro-politiciennes de certaines personnes impliquées de près ou de loin dans le génocide perpétré contre les Tutsi.
La justice où qu’elle soit demandée et rendue, doit être indépendante et respectueuse des peuples. La justice française devrait comprendre cela et suivre le pas de la raison.
La CNLG réclame ce droit, pour l’honneur des victimes et des survivants.

L’auteur de ce communiqué est Secrétaire Exécutif de la CNLG


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