De possibles dérapages ethniques au Burundi et régionalisation du conflit

Redigé par IGIHE
Le 16 août 2015 à 08:44

Collette Braeckman, la désormais spécialiste de la région des Grands Lacs trouve que la dynamique négative politique burundaise risque de déferler en une guerre où le Rwanda pourrait intervenir pour cesser la surenchère ethnocentriste hutu qui s’observe dans la volonté politique du clan Pierre Nkurunziza. C’est sans compter que beaucoup de figures politiques hutu de l’opposition n’entendent pas du tout la question et la philosophie gouvernementale de cette oreille.
Notre spécialiste risque de se (...)

Collette Braeckman, la désormais spécialiste de la région des Grands Lacs trouve que la dynamique négative politique burundaise risque de déferler en une guerre où le Rwanda pourrait intervenir pour cesser la surenchère ethnocentriste hutu qui s’observe dans la volonté politique du clan Pierre Nkurunziza. C’est sans compter que beaucoup de figures politiques hutu de l’opposition n’entendent pas du tout la question et la philosophie gouvernementale de cette oreille.

Notre spécialiste risque de se tromper car la société politique burundaise perçoit un retard énorme en matière de développement. Dussé-t-il terminer son actuel mandat, Pierre Nkurunziza sera perçu comme un espoir déçu des Barundi qui attendent de lui qu’il dépasse les barrières psychologiques et clichés ethnicistes pour entreprendre une campagne de développement dans un pluralisme idéologique épanouissant.

Elle se prête au micro de l’Agence Bujumbura News..


Pourquoi est-il aussi dangereux de remettre en cause les accords d’Arusha ?

Conclus en 2000 sous le patronage de Nelson Mandela, les accords d’Arusha consacrent le principe de l’équilibre ethnique au sein des institutions et des forces de sécurité, l’armée et la police. Cet équilibre dépasse la simple arithmétique (85% de Hutus, 15% de Tutsis) et accorde aux Tutsis une représentation supérieure à leur poids réel. Au cours des quinze dernières années ces accords ont eu pour effet de rassurer les Burundais : les Hutus ont été intégrés au sein de l’armée, les Tutsis, représentés au sein de tous les partis politiques, ont participé au pouvoir.

Le Burundi de 2015 pourrait-il suivre la voie du Rwanda en 1994 et devenir le théâtre d’un nouveau génocide ?

Difficilement : la presse extrémiste style Kangura ou Radio des Mille Collines n’existe pas, la chaîne de commandement, y compris au sein du parti au pouvoir est divisée, est divisée. Les affrontements actuels reposent sur des causes politiques- l’opposition à un troisième mandat présidentiel- et non ethniques :nombreux sont les Tutsis et les Hutus qui partagent des valeurs démocratiques communes et ne veulent pas revenir quinze ans en arrière.

Pourquoi les durs du régime veulent ils revenir sur les accords d’Arusha ?

Leur logique est celle de vainqueurs militaires : ils estiment que les concessions des années 2000 étaient transitoires, que la règle de la majorité ethnique doit leur garantir l’accès au pouvoir et aux ressources qui y sont liées, que les Hutus, victimes en 1972 de massacres à grande échelle, ne sont pas arrivés au bout de leur revanche. S’il se confirme, le recours aux arguments ethniques (miser sur la solidarité des Hutus) apparaîtra comme une fuite en avant. Mais cette utilisation de la « dernière carte » peut s’avérer dangereuse : les craintes des Tutsis s’en trouveront renforcées et la perspective d’affrontements ethniques ne laissera pas le Rwanda indifférent.

L’insurrection armée et la guerre civile sont-elles inévitables ?

Les protestations contre le troisième mandat et plus largement contre la remise en cause des accords d’ Arusha se transforment peu à peu en insurrection armée, les désertions au sein de l’armée se multiplient, les armes circulent. L’assassinat, le 2 août, du général Adolphe Nshirimirimana, l’homme fort de la sécurité, a démontré que tout était possible, y compris une opération « chirurgicale » qui décapiterait le sommet de l’Etat. C’est ce que redoute le parti au pouvoir CNDD , qui dénonce l’élimination ciblée de ses responsables tandis que le président s’efforce de tenir des propos apaisants afin de dissuader ses troupes de recourir à la vengeance.


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