Media rwandais minés par une pauvreté structurelle : liberté d’expression limitée ?

Redigé par Jovin Ndayishimiye
Le 2 février 2016 à 12:30

Les relations Médias et pouvoir rwandais prêtent à des analyses souvent sentimentalesment erronées d’experts occidentaux et locaux. Les observateurs de la sociopolitique rwandaise tentent de montrer que ces média sont muselés par une série de structures publiques et semi-privées existantes au Rwanda.
Or, force est de constater qu’outre une formation professionnelle diluée offerte au futur praticien des médias, la faiblesse congénitale de ces derniers vient de l’impréparation des changements sans (...)


Les relations Médias et pouvoir rwandais prêtent à des analyses souvent sentimentalesment erronées d’experts occidentaux et locaux. Les observateurs de la sociopolitique rwandaise tentent de montrer que ces média sont muselés par une série de structures publiques et semi-privées existantes au Rwanda.

Or, force est de constater qu’outre une formation professionnelle diluée offerte au futur praticien des médias, la faiblesse congénitale de ces derniers vient de l’impréparation des changements sans cesse annoncés et entrepris par les pouvoirs publics comme les TICs, de la totale incapacité à faire de la presse indépendante rwandaise non subsidiée un véritable business autant que le veut l’autorité publique.

Il n’est pas évident que ce créneau soit porteur surtout que des infrastructures culturelles ne sont pas mises en place et que les pouvoirs publics, par le biais du MHC (Média High Council), ne décident pas de la création d’un « Basket Fund » pour donne au journaliste ou à la direction de rédaction toute la latitude d’avoir accès à des dons de toutes les sortes.

Ce dimanche 31 janvier à Radio Isango Star, des journalistes rwandais s’organisent autour d’un débat sur l’état de la liberté d’expression au Rwanda. Un débat qui aurait été enrichi par des experts et chercheurs dans le secteur des média. Leur absence s’est ressentie sur la qualité des débatteurs.

La liberté d’expression ?

Les journalistes rwandais s’autocensurent et mesurent d’abord ce qu’ils vont dire ou écrire, ont décidé l’ensemble des participants au débat dont Mugisha, le nouveau Secrétaire exécutif de RMC (Rwanda Média Council), un organe dit d’autorégulation des média rwandais, Stanley Gatera, directeur d’un journal dit UMUSINGI.

Tout au long de ce débat qui a duré 60 minutes, il était question de savoir si oui ou non une certaine pression des pouvoirs publics s’exerce sur les journalistes rwandais dans leur exercice.

Une question extrêmement mal posée qu’un journaliste, directeur du journal Umusingi a tenté d’expliquer sans convaincre ses interlocuteurs. Selon lui, les journalistes rwandais vivent des limitations liées au manque de moyens de fonctionnement.

« Ils ne visitent pas tous les angles et contours du sujet faute de moyens suffisants de réalisations… Des fois, un agent public haut placé vous ordonne de ne pas publier telle information. Mais il faut être fort pour lui opposer un non catégorique et lui montrer que ses injonctions ne sont pas fondées », a dit le Directeur d’Umusingi Stanley Gatera.

Si ce journaliste trouve que le déficit en liberté de presse réside dans une sorte de paupérisation de journaux qui n’ont pas accès facile aux marchés et publicités publics, il oublie néanmoins que les organes de régulation dont le RMC ou MHC censés devoir renforcer et la capacité et la plaidoirie des organes de la presse semblent avoir des préoccupations ailleurs surtout qu’ils sont libres et subsidiés au moment où ces organes de presse indépendants vivotent dans une précarité totale.

Une presse mercantiliste rwandaise orientée vers les affaires lucratives

Le débat de ce dimanche a dégagé beaucoup de lacunes cachées de la presse rwandaise. Les unes étant structurelles et d’autres provoquées par un environnement socio politique qui n’est pas favorable : un pays qui sort d’un génocide et dont le grand mal a été commis par une presse officielle (radio rwanda) et affiliée (Radio RTLM) et le journal Kangura mais aussi un état socio- économique rwandais actuel d’un capitalisme de monopole très vivace.

Ce dernier point est particulièrement important à ce sujet au moment où pour survivre plus de deux tiers des radio privées et autres journaux en ligne opérant dans le pays ont affiché nettement une tendance mercantile, allouant de grands espaces et programmes achetés ou sponsorisés, et sont sous le joug de puissantes sociétés de téléphonie mobile MTN, TIGO, AIRTEL qui imposent aux consommateurs les prix indiscutables de leurs produits. Des tarifs proposés par ces grandes compagnies commerciales offrent une sorte de sécurité aux rédactions pour pouvoir marcher.

Des débats ou autres programmes attirant les investisseurs, des défis des industriels rwandais ne seront pas dévoilés au public… C’est dire que les grandes sociétés commerciales, les annonces et publicités mais aussi une dimension moins profonde du journaliste par rapport aux événements et décisions qui affectent ces grands sponsors seront reportés par les praticiens des médias avec une sorte de condescendance.

Erreur d’Anjan Sundaran avec son "The Last Journalist in Dictatorship"

Bref, les média rwandais risquent de ne pas être du tout embrigadés par le Gouvernement rwandais actuel ainsi que semble le dire Anjeev dans son « Bad News : Last Journalists in a Dictatorship”. Ils ne font que suivre une tendance actuelle du lucre. Ils empruntent des créneaux qui rapportent. Ils accompagnent les acteurs économiques cruciaux de leur régime (les grandes compagnies privées de brasserie, de téléphonie, de transport, savonnerie, eau, électricité, TICs, ansurances et banques et les marchés publics). Et ils en gagnent.

On remarque rarement des média rwandais qui s’appesantissent sur le fait politique et se perdent dans les supputations de l’arène politique. Il est vrai que ce secteur semble n’être plus porteur. Anjeev a oublié que le mode de production d’une société donnée modèle un mode de gouvernance sociale.

Le souci des Rwandais de se positionner dans la production économique mondiale a créé une dictature de grands groupes financiers et industriels rwandais alliés aux multinationales. Une dictature car ces groupes fixent les prix sur le marché et savent comment utiliser des professionnels des média en proposant des services que leurs médias les plus en vue doivent prester et pouvoir faire de confortables recettes.

Mais au-delà de tout ceci, sans néanmoins donner raison aux colportages sentimentaux d’Anjev Sundaran dans son livre inutilement politisé sur le Rwanda,

Un fonds des média : "Basket Fund"

Les pouvoirs publics rwandais ne savent sur quel pied danser pour autoriser la création d’un « Basket Fund » qui viendrait renforcer la capacité de certains média rwandais qui ne se relèvent pas qui, pourtant, élèvent leurs voix sur des dysfonctionnements imposés par l’état d’un capitalisme de monopole coriace imposé à la société de consommation des Rwandais. « Nous avons conduit une étude commandée par MHC pour apprécier l’opportunité d’un tel fonds.

Certaines hautes autorités ont décidé que les journalistes rwandais ne sont pas mûrs pour un tel fonds », a indiqué à ce journaliste Paul Mbaraga, enseignant à l’EJC (Ecole de Journalisme et de Communication).

Infrastructures médiatiques pour la circulation des médias

Il va sans dire que ces personnalités politiques ayant fait de telles déclarations sont allées à l’encontre du vœu du Chef de l’Etat Paul Kagame qui s’était exprimé en faveur de la création de ce Fonds. « On est loin d’apprécier ces déclarations quand on sait que cela ne les honore pas, elles non plus », ont déclaré la plupart des journalistes de la presse indépendante qui tiennent à faire leur métier de journaliste en toute dignité.

Diversification et média par secteur d’activités y compris des revues scientifiques
Les mêmes autorités publiques qui s’exprimaient de cette manière à propos de la capacité limitée des praticiens des média sont questionnables sur la politique sectorielle en matière des média qu’elles auront conçue depuis la formation efficace et multiforme du futur journaliste à l’environnement intellectuel qui doit entourer sa production et, au-delà de tout ceci, à la capacité financière et disposition intellectuelle du public à consommer ces produits intellectuels, ce qui implique les fameuses messageries de la presse pensées dans les années fin 90 qu’il faut réadapter à la période actuelle.


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