Un mutisme étrange de la société civile face à ses responsabilités

Redigé par Jovin Ndayishimiye
Le 16 septembre 2015 à 12:17

Quelque chose a changé dans la gouvernance locale avec l’introduction de la politique officielle de la décentralisation. Ici, l’une des missions de la Société civile étant celle de dénoncer les abus de l’autorité sur les masses populaires, on remarque que cette mission est prise bien en main par les institutions publiques dont l’Office de l’Ombudsman ou la Commission Nationale des Droits de l’Homme tout autant que l’Office de l’Auditeur Général des Finances Publiques ou le Conseil de la Magistrature. (...)

Quelque chose a changé dans la gouvernance locale avec l’introduction de la politique officielle de la décentralisation. Ici, l’une des missions de la Société civile étant celle de dénoncer les abus de l’autorité sur les masses populaires, on remarque que cette mission est prise bien en main par les institutions publiques dont l’Office de l’Ombudsman ou la Commission Nationale des Droits de l’Homme tout autant que l’Office de l’Auditeur Général des Finances Publiques ou le Conseil de la Magistrature.

Ces organes publics, dans leurs domaines respectifs, jouent le rôle très sérieux et à fond, de garde fou contre les possibles dérapages des personnalités publiques gérant la société rwandaise.

Munyamariza Edouard, Président de la Plateforme de la Société civile : Pas de claires stratégies d'action de sa part. Atone. Insipide.


Quelle rôle reste-t-il à la société civile ?

« Nous de la Société civile autant que le Gouvernement avons le citoyen au centre de nos préoccupations. Logiquement, il ne devait pas y avoir des rapports de confrontation entre nous deux mais plutôt nous devrions privilégier le dialogue chaque fois qu’il se constate une incompréhension dans l’ ‘implémentation process’. Nous jouons le watchdog et le monitoring mais aussi l’advocacy (plaidoyer) tout en dénonçant les injustices commises sur les citoyens. Mais nous intervenons également dans le développement et amélioration des conditions de vie des citoyens. Ainsi, les sections de la Société civile rwandaise interviennent-e lles dans la distribution des génisses aux familles paysannes rwandaises. En ceci, nous jouons le rôle de complémentarité aux programmes publics existants », confie à la presse Thaddée Karekezi de l’équipe de coordination des associations de la Société civile rwandaise.

La Société civile rwandaise-Mission non explorée

Dans le contexte d’un capitalisme ravageur rwandais, une option idéologique délibérément adoptée et très appuyée par le gouvernement, il va sans dire que la création des richesses sociales s’accompagne inévitablement d’abus divers.
Dans ce contexte, quelle est la responsabilité de la société civile nationale si ce n’est l’élaboration de stratégies pour une culture de manifestations pacifiques de la masse pour leurs droits bafoués ?

Une autre action de la société civile rwandaise consisterait à renforcer les programmes gouvernementaux d’assistance aux différentes catégories sociales consistant à rediriger les flux financiers dans le rural pour le transformer en zones de compétition économique autant que les centres urbains du pays. Les programmes GIRINKA, HANGA UMURIMO, SACCOs ou des sommes d’argents distribuées aux personnes classées dans la catégorie d’indigents fonctionnent comme des soupapes permettant une réduction d’écart entre les classes favorisées et pauvres.


Réformer les tendances ultracapitalistes du régime

Le parti FPR (Front Patriotique Rwandais) dit moteur du gouvernement n’a rien perdu de sa vigueur et de son idéal à vouloir révolutionner les mentalités, attitudes et comportements sociaux pour la création d’un nouveau citoyen rwandais entièrement épanoui par le travail créateur des richesses sociales. Il se fixe des objectifs sociaux à atteindre.

La suite s’entend. Il accompagne leur ‘implementation process’ à travers ses adhérents qui tiennent des postes de responsabilité dans tous les centres et institutions gouvernementaux de prise de décision. Mais il s’y prend à sa manière vive et parfois brutale. Il initie une course contre la montre pour faire échec aux forces idéologiques conservatrices ; celles-là qui ne veulent pas que le citoyen rwandais change du tout au tout de mentalités rétrogrades qui l’emprisonnent dans l’immobilisme et le train train paresseux de leur autosubsistence.

Ici la Société civile rwandaise doit déployer sa science tactique de négociation. Elle doit être vibrante et s’animer d’un département d’éducation-formation à la culture de la libre expression positive. Pour cela, elle doit occuper tous les couloirs socio économiques et socio culturels. Outre qu’elle doit être active dans la coopérativisation des Rwandais, elle doit veiller à la qualité idéologique des associations coopératives avec l’idée que ces coopératives sociabilisent et éduquent l’honnête homme ; une dimension souvent oubliée par le mode coopératif capitaliste rwandais actuel. Des maisons de culture avec leur multifonctionnalité devraient également être une activité fébrile de cette société civile.

Le FPR dame le pion à la société civile

Face à la non action de cette société civile, le régime rwandais dont le FPR est le parti moteur y va à corps perdu. Les objectifs idéologiquement orientés vers le lucre et l’individualisme économique que le Rwanda doit atteindre sont clairement énoncés tout en prônant le mouvement associatif pour mieux se liguer et créer le plus de richesses sociales possible.

Ces objectifs vont de l’économique au socio culturel en passant par le politique. Sur le plan économique, on remarque que les pouvoirs publics prennent le train endiablé des changements sociaux. Dans son plan de développement 2010-2017, le Gouvernement du FPR décide que la transformation économique du Rwanda sera matérialisée par le fait que 80 pour cent de la population consommera les produits des institutions financières, que le volume du crédit atteindra 27% du PIB. Ce programme est-il ambitieux ?

Il nécessite le changement de la qualité de vie du citoyen rwandais. L’électrification rurale entreprise avec 50% des ménages raccordés au courant électrique contrairement aux 10% actuels est l’une des voies de solution de ce défi d’amélioration des conditions de vie des citoyens rwandais.

Dans cette course folle des programmes gouvernementaux, quelle action la société civile doit-elle poser ?

La Société civile rwandaise pense qu’elle ne peut qu’accompagner les programmes de développement du gouvernement.

La configuration des institutions socio-sociales et sociopolitiques rwandaises est alambiquée. Il n’existe pas de passerelles de collaboration entre la multitude d’associations et mouvement coopératifs participant dans la production des richesses sociales et les formations politiques semblant lutter pour accession au pouvoir. Tout ambitieux politique rwandais n’a qu’une seule obsession : obtenir une parcelle de pouvoir et rejoindre les autres au top des privilégiés. Aux pouvoirs publics de continuer à concevoir des voies de développement et d’y appliquer leur vision idéologique d’organisation de la société et de création des infrastructures capitalistes de développement.

La Société civile rwandaise est désarçonnée quand elle constate la détermination du parti au pouvoir, le FPR (Front Patriotique Rwandais) à devoir évaluer tous les domaines de développement très cruciaux tout en mettant au centre de ses préoccupations le citoyen rwandais.

FPR : créer un environnement favorable des affaires
Ainsi, dans ses stratégies de la campagne pour ces parlementaires, le FPR contrairement aux autres partis entrant dans la mêlée, montre qu’il élabore une feuille de route inattaquable. Les objectifs qu’il se fixe pour le prochain exercice parlementaire sont très parlants :

« Une mécanisation agricole rapide allant de 1.8% actuels à 51.1%, une reforestation atteignant 30% des terres rwandaises, une distribution de génisses aux familles paysannes allant des 150.000 actuelles à 350.000 et un programme de vulgarisation du petit bétail. Construction des centres industriels (special economic zones) sur 6 sites Huye, Rusizi, Nyabihu, Bugesera, Kirehe et Nyagatare en plus de la Special Economic Zone de Kigali pour arriver à une prévision de la croissance économique équivalant à 11%. Les ménages raccordés à l’électricité iront de 17à 70% au moment où les utilisateurs du bois de chauffage réduiront de 85à 55%. L’eau potable sera accessible à 100% à la population alors que théoriquement seuls 75% des ménages y ont accès actuellement. Des infrastructures touristiques seront amplement suffisantes pour faire des recettes allant de 282 millions de dollars à 555 millions à la fin de l’exercice parlementaire qui vient », lit-on entre autres dans a fiche de campagne parlementaire du FPR telle que présentée à la campagne électorale.

L’esprit mercantiliste dans la société civile :la gangrène

Les collectifs des associations de production y compris ceux de défense des droits humains n’ont pas compris qu’ils doivent se comporter comme des organes devant lutter pour les intérêts des citoyens rwandais dans leurs associations. Ils sont censés faire leur plaidoyer auprès des pouvoirs publics ou des bailleurs de fonds. Ils doivent soit protéger et faciliter l’écoulement de leur production ou les accompagner dans le renforcement d’accroissement de cette production. Pourtant la plupart d’entre eux entrent dans la mêlée comme des partenaires actifs du développement et donc dans la compétition économique au lieu de poser comme des organes de facilitation très écoutés et appréciés en hauts lieux jouant sur le monitoring des associations de masses pour qui ils protègent des intérêts.


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