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Délation et dénonciation calomnieuse en RDC : une justice instrumentalisée

Redigé par Tite Gatabazi
Le 25 novembre 2024 à 09:48

Le ministre de la justice, Constant Mutamba prône la délation et la dénonciation calomnieuse en RDC, une véritable instrumentalisation de la justice au service d’une politique discriminatoire.

La justice est supposée être un garant d’équité et un rempart contre les abus. Cependant, lorsque cette institution est dévoyée, elle devient un outil dangereux au service d’une propagande politique et d’une gouvernance discriminatoire.

En République Démocratique du Congo (RDC), le discours tenu par le ministre de la justice à la prison de Munzenze de Goma illustre de manière troublante ce détournement. Dans un appel public à la délation et à la dénonciation calomnieuse, le ministre a non seulement mis en péril les principes fondamentaux de l’État de droit, mais il a également exacerbé des divisions ethniques et alimenté une hostilité généralisée envers des individus basés sur leur faciès ou leurs supposées affiliations.

Une telle dérive appelle une analyse approfondie des mécanismes de délation et de dénonciation calomnieuse, leurs implications pour la cohésion sociale et leurs effets destructeurs sur l’État de droit et la stabilité régionale.

La délation consiste à dénoncer un individu ou un groupe, souvent sur des bases douteuses, dans le but de servir les intérêts des autorités en place. Elle se distingue de la dénonciation légitime par son caractère opportuniste, abusif et parfois mensonger.

En RDC, l’appel du ministre à la délation s’inscrit dans une stratégie visant à renforcer un pouvoir autoritaire par le contrôle et la peur. Les citoyens sont encouragés à trahir leurs proches ou voisins, souvent sur des critères arbitraires ou subjectifs, comme leur faciès ou leur origine supposée.

Le discours du ministre transforme la justice en un instrument de répression. En appelant les détenus à identifier "l’ennemi", il les incite à désigner des cibles sur des bases discriminatoires, ouvrant la voie à des arrestations arbitraires et à des représailles injustifiées.

Ce type de discours contribue à un climat de paranoïa et de méfiance généralisée, où personne ne se sent en sécurité. Cela affaiblit la solidarité sociale et détruit la confiance entre les citoyens et leurs institutions.

Le ministre cible spécifiquement des individus supposément "manipulés" par le Rwanda ou ayant des liens avec le président Kagame. Cette rhétorique nationaliste repose sur des stéréotypes ethniques et sur l’identification de "l’autre" comme une menace, en particulier ceux ayant un faciès ou des origines associées aux Rwandais.

Cette approche alimente la xénophobie et les discriminations, exacerbant les tensions ethniques déjà profondes dans certaines régions de la RDC.

La dénonciation calomnieuse, qui consiste à accuser à tort un individu sans preuve ou sur des bases fallacieuses, est un délit qui sape les fondements mêmes de la justice. En encourageant ce comportement, le ministre compromet l’intégrité de l’appareil judiciaire.

Dans le contexte de la RDC, où les arrestations arbitraires et les procès inéquitables sont fréquents, ces accusations peuvent entraîner des conséquences graves, notamment l’emprisonnement injustifié ou la persécution.

Utiliser le faciès ou l’apparence physique pour désigner des "ennemis" constitue une forme de discrimination flagrante et une violation des droits fondamentaux. Ce type de politique rappelle les heures sombres des régimes oppressifs où des groupes entiers étaient persécutés sur la base de leur origine ethnique ou de leur apparence.

Cette pratique contribue à marginaliser des communautés entières, les exposant à des violences physiques, sociales et économiques.

La dénonciation calomnieuse sur la base du faciès ne fait qu’aggraver les divisions sociales et ethniques. En RDC, où les tensions communautaires sont déjà exacerbées par des décennies de conflits, cette stratégie risque de plonger le pays dans une spirale de violence intercommunautaire.

Elle détruit également le tissu social en alimentant la méfiance et en empêchant toute réconciliation durable entre les différentes communautés.

En promouvant la délation et la discrimination, le gouvernement congolais sape les principes fondamentaux de l’État de droit. La justice, censée être impartiale, devient un outil de propagande et de répression.

Cette dérive érode la confiance des citoyens envers les institutions judiciaires, compromettant ainsi leur légitimité et leur efficacité.

Le discours anti-rwandais du ministre aggrave les tensions entre la RDC et ses voisins, en particulier le Rwanda. En ciblant directement le président Kagame et les Rwandais, il compromet les efforts de médiation régionale et alimente un climat de méfiance.

Cette rhétorique risque de raviver les conflits armés dans l’Est de la RDC.

En excluant et en stigmatisant certaines communautés, les autorités congolaises entravent toute possibilité de gouvernance inclusive. Une telle approche renforce les inégalités et empêche la mise en place de politiques publiques équitables et durables.

La RDC, déjà affaiblie par une corruption systémique et une mauvaise gestion, ne peut espérer se reconstruire sans une justice impartiale et respectueuse des droits de tous les citoyens.

Le discours du ministre de la justice à Goma, en appelant à la délation et à la dénonciation calomnieuse sur la base du faciès, illustre une instrumentalisation inquiétante de la justice en RDC. Cette dérive, loin de renforcer l’État de droit, compromet la paix sociale, exacerbe les tensions ethniques et régionales, et affaiblit les institutions judiciaires.

La justice, au lieu de servir les citoyens et de garantir l’équité, devient un outil de discrimination et de propagande politique.


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