Le Royaume-Uni vivement critiqué après l’abandon du plan de relocalisation vers le Rwanda

Redigé par Alain Bertrand Tunezerwe
Le 7 août 2025 à 11:08

Le Royaume-Uni fait face à de sévères critiques, tant au niveau international que national, après l’abandon de son plan controversé de relocalisation des demandeurs d’asile vers le Rwanda. Tom Homan, chef des frontières des États-Unis, n’a pas hésité à pointer du doigt un « manque de leadership fort », affirmant sans détour que « Londres n’est pas les États-Unis d’Amérique, qui ont le président Trump aux commandes », soulignant ainsi le contraste avec la politique migratoire américaine.

Le plan britannique, initié pour traiter hors du pays les demandes d’asile des migrants entrés illégalement, a été abandonné en 2024 suite à l’arrivée au pouvoir du Parti travailliste, qui l’a jugé inefficace, soulevant des questions éthiques et juridiques. Le Premier ministre Keir Starmer est désormais critiqué pour n’avoir proposé aucune alternative crédible afin de freiner l’immigration irrégulière.

À l’inverse, les États-Unis ont engagé un accord similaire avec le Rwanda, envisageant de transférer au moins 250 migrants dans le cadre d’une politique migratoire renforcée promue par l’administration Trump. Le gouvernement du Rwanda, par la voix de sa porte-parole Yolande Makolo, a précisé que les migrants approuvés bénéficieraient d’un accompagnement complet — formation professionnelle, soins de santé et logement — leur offrant la possibilité de contribuer à l’une des économies à la croissance la plus rapide au monde.

Au-delà du Royaume-Uni et des États-Unis, l’Europe connaît un virage majeur sur la question migratoire. Kaare Dybvad, ministre danois de l’Intégration, souligne un « fort engouement » au sein de plusieurs grands États membres, notamment l’Allemagne, la France, la Pologne et l’Italie, pour externaliser la gestion des demandeurs d’asile vers des pays tiers. Le ministre allemand de l’Intérieur, Alexander Dobrindt, confirme qu’une majorité d’États soutient désormais ce modèle.

Cette évolution intervient alors que l’extrême droite renforce sa popularité à travers l’Europe, avec l’immigration devenue un enjeu majeur. L’Allemagne, qui il y a dix ans ouvrait largement ses portes aux réfugiés syriens, a adopté des mesures migratoires plus strictes sous une pression politique croissante et des incidents violents impliquant des migrants.

D’autres pays comme le Luxembourg ont également modifié leur politique migratoire suite à l’arrivée de gouvernements de droite. La Cour de justice de l’Union européenne a toutefois bloqué certains projets, comme la décision de l’Italie de désigner seule des pays « sûrs » pour renvoyer les migrants, ce qui a provoqué la colère la Première ministre italienne, Giorgia Meloni.

L’Italie, qui avait conclu un accord avec l’Albanie pour créer des centres fermés destinés à accueillir les migrants en attente de traitement de leurs demandes d’asile — le plus souvent rejetées —, a dû reconsidérer ce dispositif après des contestations juridiques. Rome utilise désormais ces centres pour loger des migrants en attente d’expulsion, une solution coûteuse et inefficace selon Maciej Duszczyk, sous-secrétaire d’État polonais à la migration.

Bruxelles prépare une loi pour autoriser les pays de l’UE à envoyer des demandeurs d’asile vers des pays considérés comme « sûrs », même si ces personnes n’ont aucun lien avec ces pays, ce qui pourrait relancer le modèle italien.

L’Allemagne pour sa part discute avec le Rwanda pour reproduire le système britannique, tandis que les Pays-Bas envisagent avec l’Ouganda, où la peine de mort est appliquée aux personnes LGBT+, la création d’un « centre de transit », soulevant de vives critiques.

Kaare Dybvad, ministre de l’Immigration du Danemark, suggère que les centres soient implantés idéalement en Afrique du Nord ou dans d’autres pays stables. Pourtant, l’UE finance déjà des pays comme la Tunisie et la Libye, où les violations des droits humains sont régulièrement dénoncées. Tineke Strik, députée européenne écologiste, dénonce une « facilitation des abus des droits humains » à la fois contre les migrants et les citoyens locaux.

Selon l’agence Frontex, Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, bien que moins de migrants aient quitté la Tunisie cette année, les départs depuis la Libye ont augmenté, demontrant les limites des stratégies de l’Europe qui reposent sur la coopération avec des régimes autoritaires

Olivia Sundberg Diez, avocate de l’Union européenne sur les questions de migration et d’asile pour Amnesty International, qualifie ces propositions d’« irréalistes et inhumaines », très coûteuses tant humainement que financièrement, et accuse les gouvernements de faire « de grandes déclarations politiques sur des promesses qu’ils risquent de ne pas pouvoir tenir », au détriment des droits fondamentaux.

Le Royaume-Uni fait face à de sévères critiques, tant au niveau international que national, après l’abandon de son plan controversé de relocalisation des demandeurs d’asile vers le Rwanda

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