M. Fayulu a tenté dans la matinée de rassembler ses troupes dans les rues de Kinshasa, devant le siège de son parti et de ses alliés du Mouvement de libération du Congo (MLC).
Au total, une cinquantaine de militants ont manifesté, très encadrés par la police anti-émeute. Plus tard, des heurts ont brièvement éclaté entre près de 300 partisans de Martin Fayulu et des conducteurs de motos-taxis, qu’ils assimilent à des proches de Félix Tshisekedi. Un homme a été grièvement blessé à la tête par un jet de pierre, avant que la police ne s’interpose.
"La population est encore dans l’étonnement. Nous allons expliquer ce hold-up puis nous allons élaborer des stratégies pour exprimer notre refus de ces résultats contraires à la volonté exprimée dans les urnes par le peuple", a déclaré Wina Lokondo.
Ce coordonnateur de la coalition politique Lamuka autour de M. Fayulu dans la province de l’Equateur (nord-ouest) avait été arrêté le 11 janvier, au lendemain de la publication des résultats par la Commission électorale pour avoir appelé à manifester, puis libéré après 48 heures.
Initialement prévue mardi dans le calendrier de la Commission électorale, la prestation de serment du président élu, devrait avoir lieu jeudi.
– "Putsch électoral" -
"D’après les informations qu’on m’a données ce matin, elle a été reportée à jeudi", a déclaré à l’AFP Lydie Omanga, porte-parole de la coalition d’opposition Cap pour le changement (Cach) de M. Tshisekedi.
Jean-Pierre Kambila, directeur de cabinet adjoint du président Joseph Kabila, a été un peu moins affirmatif, expliquant à l’AFP qu’il "subsiste encore quelques hésitations".
La validation de l’élection de l’opposant Tshisekedi et contestée par son rival Martin Fayulu par la Cour constitutionnelle dans la nuit de samedi à dimanche, a divisé l’Union africaine (UA).
Première puissance économique du continent, l’Afrique du Sud a félicité M. Tshisekedi, accusé par M. Fayulu d’être le complice d’un "putsch électoral" orchestré par le président sortant Joseph Kabila.
L’élection de M. Tshisekedi a aussi ravivé les clivages habituels parmi les neuf voisins de la RDC, le plus grand pays d’Afrique sub-saharienne.
Le Burundi et la Tanzanie, qui coopèrent avec Kinshasa dans la traque des rebelles, ont félicité le nouveau président de la République.
En revanche, le Congo-Brazzaville, l’Ouganda, le Rwanda, la Zambie et l’Angola sont restés muets.
Le Rwanda surtout a essuyé un camouflet. Son président Paul Kagame, président en exercice de l’UA a fait marche arrière. Il voulait conduire une délégation de haut niveau ce lundi à Kinshasa, pour une médiation dans le contentieux électoral.
– Première transmission pacifique -
M. Kagame a été pris de vitesse par la Cour constitutionnelle qui a validé les résultats avant l’arrivée de la mission, une manière de balayer les "doutes sérieux" émis par l’UA sur la crédibilité des résultats de l’élection présidentielle.
Mise devant le fait accompli, l’UA s’est contentée de "prendre note" de la proclamation des résultats par la Cour constitutionnelle et de "reporter" sa mission à Kinshasa.
De son côté, l’Union européenne a estimé dimanche que des "doutes subsistent" sur le résultat de la présidentielle après la proclamation définitive de M. Tshisekedi.
La France, qui avait estimé la semaine passée que Martin Fayulu était "a priori" le vainqueur de l’élection, a cependant pris "note" lundi de la victoire de Félix Tshisekedi.
Comme Jean Ping au Gabon en 2016, M. Fayulu se proclame "président élu". Il a appelé la communauté internationale à ne pas reconnaître M. Tshisekedi.
"Aux présidents africains qui demandent aux Congolais de respecter la décision de la Cour constitutionnelle, je les prie de respecter la décision souveraine du peuple congolais qui m’a élu président à plus de 60%. N’encourageons pas la fraude, le mensonge et le faux", a-t-il insisté sur Twitter.
Par ailleurs, le signal de réception de Radio France internationale (RFI), coupé dans toute la RDC depuis le 3 janvier, était rétabli lundi à Kinshasa, sans que le média, très écouté en RDC, soit en mesure de confirmer le retour à une réception normale dans tout le pays.
Sur le papier, la RDC vit une première transmission pacifique du pouvoir d’un président à l’autre.
Félix Tshisekedi, 55 ans, n’aura cependant pas la majorité à l’Assemblée nationale qui reste largement contrôlée par les amis de M. Kabila.
Le Premier ministre, selon la Constitution, devra être issu de la majorité parlementaire. L’inconnue demeure sur la façon dont sera partagé le pouvoir entre les amis de M. Kabila et les proches du président élu, notamment au sujet de la distribution des ministères régaliens.
avec voafrique.com
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