Dans une interview exclusive accordée à IGIHE, l’ambassadeur Musa a annoncé que cette nouvelle liaison, opérée chaque semaine par la compagnie soudanaise Badr Airline, renforce non seulement la connectivité entre les deux pays, mais s’inscrit aussi dans une dynamique commerciale en plein essor, avec un volume d’échanges désormais estimé à 200 millions de dollars par an.
L’ambassadeur a précisé que cette compagnie aérienne privée a choisi le Rwanda comme hub pour étendre ses opérations en Afrique, avec l’intention d’augmenter la fréquence des vols en fonction de la demande.
« La liaison débutera avec un vol hebdomadaire. Si le marché se développe, d’autres vols pourront être ajoutés », a-t-il déclaré.
Pour l’instant, les vols décollent de Port-Soudan, puisque l’aéroport international de Khartoum est toujours en cours de réparation à la suite des dommages causés par la guerre. L’itinéraire prévoit une escale à Juba, renforçant ainsi la connexion entre les pays d’Afrique de l’Est et facilitant la circulation des personnes et des marchandises.
Cette nouvelle connectivité devrait stimuler davantage les échanges commerciaux annuels entre les deux pays, déjà évalués à 200 millions de dollars, un volume largement soutenu par les exportations rwandaises de thé et de café. Dans un virage stratégique, le Soudan a récemment redirigé ses importations de thé — pour une valeur de 2 millions de dollars en seulement 45 jours — directement vers les producteurs rwandais, contournant ainsi les enchères de Mombasa au Kenya, en raison de tensions politiques.
« Les entreprises soudanaises viennent désormais directement au Rwanda pour leurs achats », a souligné l’ambassadeur Musa.
Une communauté soudanaise dynamique au Rwanda
Au-delà des échanges économiques, l’ambassadeur a mis en lumière la vitalité de la communauté soudanaise au Rwanda, qui compte aujourd’hui plus de 5 000 personnes, contre 4 000 auparavant. Cette croissance est portée par les opportunités académiques et économiques, les résidents soudanais ayant investi plus de 10 millions de dollars, notamment dans de petites usines et des projets agricoles.
« Deux ou trois usines sont actuellement en construction et seront bientôt opérationnelles », a précisé Musa, soulignant l’engagement croissant des entreprises soudanaises dans les secteurs des infrastructures et des marchés d’exportation, notamment pour les fruits tropicaux et les produits agricoles rwandais, très prisés au Soudan.
L’éducation demeure un pilier fondamental de ce partenariat, avec les étudiants soudanais qui représentent 20 % de la population étudiante internationale au Rwanda.
« Ils se sentent comme chez eux », a expliqué Musa, mettant en avant la sécurité du pays, les affinités culturelles et la simplicité des procédures de visa.
Selon l’ambassadeur, la moitié de ces étudiants sont des femmes vivant de manière autonome, ce qui témoigne de l’environnement sûr et accueillant offert par le Rwanda.
« Aucune famille soudanaise n’accepterait que sa fille se rende quelque part sans avoir la garantie de sa sécurité », a-t-il ajouté.
Les politiques d’ouverture du Rwanda et son esprit panafricain, promus par le Président Paul Kagame, font du pays une destination privilégiée pour les étudiants soudanais, surtout alors que les infrastructures éducatives du Soudan se reconstruisent après les dommages causés par la guerre.

La coopération s’étend à la santé et au maintien de la paix
L’entretien a également mis en lumière une coopération significative dans le secteur de la santé, avec plus de 50 médecins soudanais qui enseignent et exercent dans des hôpitaux rwandais, notamment à l’hôpital King Faisal et dans des établissements militaires.
Par ailleurs, plus de 100 diplômés soudanais en médecine poursuivent actuellement leur formation au Rwanda, affichant un taux de réussite de 100 % aux récents examens médicaux, ce qui positionne le Rwanda comme un véritable centre d’excellence pour les stages médicaux.
« C’est un modèle prometteur, car un nombre croissant de diplômés en médecine choisissent le Rwanda pour leurs stages », a souligné l’ambassadeur Musa, rappelant que le Soudan formait chaque année environ 3 000 étudiants en médecine avant la guerre.
Dans une perspective d’avenir, le Soudan souhaite tirer pleinement parti de l’expertise reconnue du Rwanda en matière de maintien de la paix.
« Dès la fin du conflit, l’un des principaux axes de coopération consistera à former certaines unités de l’armée soudanaise au maintien de la paix au Rwanda », a insisté l’ambassadeur, mettant en avant la réputation du Rwanda comme deuxième plus grand contributeur de troupes et de policiers aux missions de maintien de la paix des Nations Unies, ainsi que son rôle essentiel dans la promotion de la stabilité régionale.
Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un prochain mémorandum d’entente (MoU) visant à formaliser la coopération dans sept domaines clés, notamment la réconciliation nationale, la cohésion sociale et la construction constitutionnelle, en s’inspirant du modèle de reconstruction du Rwanda après le génocide contre les Tutsi.

Le chemin du Soudan vers la paix et la reconstruction
Évoquant le conflit actuel au Soudan, l’ambassadeur Musa a indiqué que l’armée soudanaise contrôle aujourd’hui plus de 75 % du territoire, avec quelques poches de résistance encore présentes au Kordofan et au Darfour.
Il a qualifié les Forces de soutien rapide (RSF) de « milice » dépourvue de soutien populaire, responsable de dégâts estimés à plus de 300 milliards de dollars.
Malgré la guerre, Musa a souligné la résilience du Soudan : « La vie ne doit pas s’arrêter. Même en temps de guerre, la vie doit continuer. »
Le gouvernement, dirigé par un nouveau Premier ministre et qualifié de « gouvernement de l’espoir », se concentre sur un programme de transition axé sur la stabilité, la paix et l’organisation d’élections démocratiques.
Pour mettre fin au conflit, le Soudan a proposé une amnistie aux combattants des RSF qui accepteront de déposer les armes. « Toute personne appartenant aux RSF qui viendra pacifiquement se joindre à l’effort soudanais pour la paix et la réconciliation sera la bienvenue. » a précisé Musa.
Cependant, la justice pour les auteurs de crimes sera rendue dans le cadre d’un système judiciaire inspiré de l’approche adoptée par le Rwanda après 1994, afin d’éviter les représailles et de garantir que chacun rende compte de ses actes devant la loi.
Le diplomate a appelé les pays voisins, comme le Kenya, ainsi que les acteurs régionaux, notamment les Émirats, à cesser de soutenir les RSF. Il a également exhorté la communauté internationale et l’Union africaine à intervenir pour assurer une paix durable.
L’ambassadeur Musa considère le Rwanda comme une source d’inspiration pour la reconstruction du Soudan après le conflit, soulignant quatre principes essentiels : un leadership responsable, une vision claire, des mécanismes judiciaires solides et la responsabilisation de chaque citoyen.
« Nous ne devrions pas externaliser nos problèmes », a-t-il affirmé, reprenant l’accent mis par le Président Kagame sur l’importance des solutions endogènes.
Le Soudan entend s’inspirer de la réussite du Rwanda en matière de cohésion sociale et de réconciliation nationale. Des délégations, notamment le ministre soudanais de la Justice, travaillent déjà en collaboration avec leurs homologues rwandais pour tirer des enseignements de cette expérience.

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