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Dallaire dévoile les raisons du manque de soutien international au Rwanda pendant le génocide des Tutsi

Redigé par Bazikarev
Le 26 mars 2024 à 08:45

Le Général canadien Romeo Dallaire, qui commandait les forces de maintien de la paix des Nations Unies au Rwanda en 1994 pendant le génocide contre les Tutsi, a révélé que chaque fois qu’il demandait une aide pour stopper le génocide, on lui rappelait qu’il n’y avait ni pétrole, ni diamants ou d’autres ressources précieuses au Rwanda pour justifier le déploiement de troupes.

En 1994, la MINUAR comptait environ 97 soldats basés à l’ETO Kicukiro, sous le commandement du Colonel Luc Marchal, adjoint du Gén. Dallaire.

Chargés de rétablir la paix, ces Casques bleus ont dû assister impuissants au massacre de plus de 4 000 Tutsi à l’ETO Kicukiro le 11 avril 1994, après que leur convoi eut été bloqué sur la route de l’aéroport par des miliciens hutus Interahamwe.

Trois jours après le rappel des troupes belges suite à l’assassinat de leurs compatriotes chargés de la protection du Premier ministre Agathe Uwilingiyimana par les militaires proches du Président Habyarimana, ce dernier a été tué à son tour.

Dans un texte publié par le journal canadien The Globe and Mail, le Gén. Dallaire affirme que le Rwanda et ses citoyens, ainsi que les forces de l’ONU sous son commandement, ont été abandonnés à leur sort faute de moyens pour arrêter les massacres contre les Tutsis.

"Le Rwanda et son peuple, ainsi que ma mission de maintien de la paix, ont été abandonnés au massacre. Quand j’implorais de l’aide, on me rappelait qu’il n’y avait pas de pétrole au Rwanda, pas de diamants, rien d’autre d’importance stratégique. Il n’y avait que des êtres humains - des vies noires qui n’avaient aucune importance, "a-t-il écrit.

Le Gén. Dallaire explique avoir souffert de graves troubles de stress post-traumatique après son retour du Rwanda, hanté par les images des massacres.

« Pendant des décennies après le massacre de masse, j’ai été hanté par les esprits des morts, les cris des abandonnés, l’angoisse des survivants et la culpabilité d’avoir été impuissant à arrêter le carnage. Et j’ai lutté pour trouver des réponses à des questions insolubles : Comment ? Pourquoi ? Et si …”, raconte-t-il.

"À cette époque, je recherchais désespérément des réponses à mes questions sans fin : pourquoi cela s’est-il passé ainsi ? Pour quelles raisons ? Qu’adviendra-t-il ?"

Cette expérience au Rwanda a changé le cours de sa carrière militaire. Sans ce déploiement, dit-il, il aurait poursuivi son service au sein de l’armée canadienne, probablement jusqu’à une retraite avec le grade de Général.

"J’aurais pu choisir un autre emploi civil ou du bénévolat, comme nombre de mes pairs officiers après une carrière militaire. Mais quand je suis revenu du Rwanda, ma famille et mes supérieurs s’attendaient à ce que je redevienne un jour normal. Or, le génocide avait changé ma trajectoire et mes priorités", explique-t-il.

"[Le génocide] m’a profondément ébranlé dans mon développement et mon rapport à l’humanité. Je suis rentré chez moi une épave, souffrant de stress post-traumatique sévère au point d’envisager à plusieurs reprises le suicide. Mais j’en ai aussi retiré un sens renouvelé de l’humanité et du devoir de la promouvoir."

Dallaire estime que cette prise de conscience l’a amené à remettre en question son allégeance et les doctrines militaires traditionnelles.

"Au lieu de continuer à me battre pour gagner des guerres, j’ai réalisé qu’il fallait concentrer les efforts sur l’établissement de la paix", affirme-t-il.

Le Gén. Dallaire souligne que le génocide au Rwanda a été un choc pour les universitaires, les politiques, les militaires, les juristes et le personnel médical qui ont dû repenser leurs approches pour prévenir de telles tragédies.

"Nous avons établi des tribunaux, des doctrines et des rapports sans fin sur la protection des civils contre les atrocités de masse, y compris le génocide. Mais ces mesures n’apportaient que des solutions temporaires et superficielles, en stoppant les combats et en gelant les conflits sans en traiter les causes profondes", regrette-t-il.

Dallaire fait partie des voix qui n’ont pas hésité à dénoncer le génocide des Tutsi de 1994, d’autant qu’il avait été mis au courant du plan macabre avant son exécution, mais ses avertissements sont restés lettre morte auprès de ses supérieurs.

Aujourd’hui, il collabore étroitement avec l’armée rwandaise à travers l’ONG Romeo Dallaire Child Soldiers Initiative, qu’il a fondée en 2007 pour promouvoir la protection des enfants et lutter contre leur enrôlement dans les conflits armés en Afrique.

Le Général Romeo Dallaire a révélé que chaque fois qu'il demandait de l'aide pour stopper le génocide contre les Tutsi, on lui répondait qu'il n'y avait ni pétrole ni diamants au Rwanda.

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