L’heure n’est plus aux faux-semblants ni aux postures dilatoires : l’Europe doit assumer sa condition, mesurer l’étendue de ses faiblesses et, dans un sursaut lucide, forger enfin les instruments de sa souveraineté. Car il n’est de puissance que celle qui dispose des moyens de sa propre défense, et toute nation, fût-elle continentale, qui abdique cette prérogative fondamentale, s’expose à voir son destin dicté par d’autres.

L’Europe se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, confrontée à une réalité géopolitique implacable : l’illusion d’une protection pérenne assurée par les États-Unis s’effrite, laissant place à une prise de conscience brutale.

Les tenants d’un alignement atlantiste sans réserve, longtemps convaincus de l’infaillibilité du parapluie sécuritaire américain, doivent désormais admettre que la garantie de défense ne saurait reposer indéfiniment sur des intérêts qui ne sont pas les siens. En matière de sécurité, l’histoire enseigne une leçon inaltérable : seul prévaut l’intérêt propre, et toute dépendance stratégique constitue, à terme, une vulnérabilité existentielle.

Dès lors, s’impose une exigence inéluctable : celle de l’indépendance. La défense d’un État, et a fortiori d’un continent, ne se délègue pas, ne se partage pas, ne se sous-traite pas. Elle est l’apanage exclusif des nations qui aspirent à demeurer maîtresses de leur destin. Or, la puissance, pour être effective, commande des moyens à la hauteur des ambitions affichées. L’Europe ne peut plus se satisfaire d’un rôle d’auxiliaire dans le concert des puissances ; elle doit se doter des capacités militaires, industrielles et diplomatiques nécessaires à l’affirmation de sa souveraineté.
Faute de cette réorientation stratégique, elle s’exposerait à un déclassement irréversible, vouant son avenir aux décisions d’acteurs extérieurs dont les priorités ne sauraient éternellement coïncider avec les siennes.

L’Europe se tient désormais face à elle-même, confrontée au reflet implacable de ses propres contradictions