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Procès en France : Charles Onana accusé de nier le génocide contre les Tutsi, un tournant décisif contre le révisionnisme

Redigé par Alain-Bertrand Tunezerwe
Le 1er octobre 2024 à 02:37

Un procès d’ampleur historique va s’ouvrir en France contre le journaliste d’origine camerounaise, Charles Onana, accusé de nier et de minimiser le génocide des Tutsi de 1994. Connu pour ses ouvrages controversés et ses interventions médiatiques sur l’histoire du Rwanda et la région des Grands Lacs, Onana s’est imposé dans certains cercles comme une « voix dissidente » sur ces sujets. Pourtant, son travail a suscité de vives critiques, en particulier pour ses positions niant les faits établis concernant l’extermination planifiée des Tutsi.

Cette action en justice fait suite à une plainte déposée par l’Association des Rwandais de France (ARF), en réponse à des écrits et déclarations de l’intéressé, affirmant que le génocide des Tutsi n’aurait jamais eu lieu. D’après les plaignants, Onana, par ses publications, non seulement perpétue une version révisionniste de l’histoire, mais sert également d’instrument à certains milieux en République Démocratique du Congo (RDC), où l’on tente de créer une fausse équivalence entre le génocide rwandais et un prétendu génocide des Congolais. Cette thèse, jamais reconnue par la communauté internationale, est vue par beaucoup comme une tentative de brouiller la vérité historique.

Une campagne de soutien controversée

Depuis l’annonce du procès, une campagne de soutien à Charles Onana a été lancée par ses partisans, notamment des opposants farouches au régime actuel du Rwanda. Ces soutiens, souvent issus de la diaspora, peignent le journaliste comme une victime d’une persécution politique orchestrée par Kigali. Parmi eux se trouvent des individus et groupes marqués par un lourd passé d’hostilité envers le gouvernement rwandais, dirigé par le Front Patriotique Rwandais (FPR), qui mit fin au génocide.

On observe parmi ces défenseurs des anciens responsables rwandais ayant fui le pays après avoir commis des crimes graves. Ces derniers voient en Onana une opportunité de ternir l’image du régime rwandais actuel tout en dédouanant leurs propres responsabilités historiques.

Un des principaux soutiens d’Onana se trouve dans la Jambo ASBL, une organisation basée en Belgique, souvent qualifiée de relais du négationnisme rwandais en Europe. Fondée par des descendants de responsables ayant participé au génocide des Tutsi, la Jambo ASBL a à plusieurs reprises été pointée du doigt pour son discours révisionniste. Ses membres sont régulièrement accusés de collaborer avec des groupes hostiles au Rwanda, tels que les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), une organisation considérée comme terroriste, active dans l’Est de la RDC.

Certains jeunes membres de Jambo ASBL qui continuent de soutenir Onana.

Le parti FDU-Inkingi, fondé par Victoire Ingabire, est un autre acteur clé dans cette campagne. Ingabire a été condamnée pour des actes de négation du génocide et d’activités subversives contre l’État rwandais. Son parti, qui prône une gouvernance basée sur l’ethnicité, conserve une idéologie proche de celle des extrémistes hutus qui orchestrèrent le génocide de 1994.

Le FDU-Inkingi est aussi lié à des activités militaires, notamment la formation du groupe rebelle P5, qui a été responsable d’attaques contre le Rwanda en 2018. Ce réseau, en soutien à Onana, cherche à nier la réalité du génocide des Tutsi tout en nourrissant l’idée d’une revanche ethnique.

Kayumba Placide, dirigeant du parti FDU, qui collabore avec le FDLR.

Des soutiens congolais et une instrumentalisation politique

Les Congolais, soutenus par leur gouvernement, sont en première ligne pour exprimer leur soutien à Onana.

La proximité entre Charles Onana et le gouvernement de la République Démocratique du Congo, sous la présidence de Félix Tshisekedi, a mobilisé une partie de la diaspora congolaise en Europe. Certains jeunes militants congolais ont organisé des manifestations de soutien, souvent encouragés par des financements de l’État congolais. Les écrits d’Onana sont ainsi utilisés par Kinshasa pour justifier un discours anti-rwandais dans le cadre de tensions politiques entre les deux pays.

La campagne de soutien à Charles Onana s’étend également à certains journalistes influents, tels que Michaela Wrong et Judi Rever, toutes deux connues pour leurs critiques virulentes à l’encontre du Rwanda. Michaela Wrong, auteur et ancienne journaliste, a intensifié ses attaques contre le gouvernement rwandais après l’assassinat de Patrick Karegeya, un ancien cadre du FPR devenu opposant, en 2014. Elle accuse depuis lors le Rwanda de mener une répression implacable contre ses dissidents.

De son côté, Judi Rever, journaliste canadienne, s’est illustrée par ses positions négationnistes, allant jusqu’à écrire un livre controversé dans lequel elle tente de minimiser la responsabilité des génocidaires tout en blâmant le FPR pour les massacres. Son ouvrage, rejeté par les historiens sérieux, est néanmoins devenu une référence pour les cercles négationnistes.

Michaela Wrong qui s'est engagée contre le Rwanda depuis la mort de son ami Patrick Karegeya en 2014.
Judi Rever est une journaliste qui s'attaque au Rwanda depuis longtemps et qui minimise le génocide des Tutsi.

Un procès crucial pour la mémoire historique

Le procès de Charles Onana est vu par beaucoup comme un moment décisif dans la lutte contre le révisionnisme et la négation du génocide des Tutsi. Il représente un test pour la justice française, qui doit montrer qu’elle ne tolérera pas la réécriture de l’histoire et la banalisation de crimes aussi graves.

Si ce procès aboutit à la condamnation d’Onana, il pourrait marquer un tournant dans la reconnaissance du génocide des Tutsi en Europe et ouvrir la voie à d’autres poursuites contre ceux qui cherchent à déformer la vérité historique. À l’heure où des mouvements négationnistes tentent de refaire surface, il est crucial de réaffirmer l’importance de la vérité, de la mémoire et de la justice pour les victimes du génocide de 1994.

La mémoire du génocide des Tutsi ne doit pas être trahie, et ce procès en France est une étape clé dans cette lutte pour la vérité.

la flamme ibuka, symbole des millions de morts du genocide contre les tutsi en 1994 au Rwanda

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